Silence radio du recruteur : et si ce n'était pas un mauvais signe ?

04 janv. 2022

6min

Silence radio du recruteur : et si ce n'était pas un mauvais signe ?
auteur.e
Elise Assibat

Journaliste - Welcome to the Jungle

Entre l’incertitude qui vous accompagne partout et l’envie d’harceler le recruteur toutes les heures pour enfin être fixé, rien de plus normal que d’avoir la boule au ventre après avoir passé un entretien d’embauche. Mais comment rester zen, surtout quand le téléphone tarde à sonner ? Et si, cette attente qui peut sembler plus longue à passer que l’hiver, n’était pas forcément un mauvais signe ? Mila Elhamdi, coach et consultante en gestion de carrière, nous dévoile ses conseils pour mieux vivre cette période pleine d’appréhensions.

Passé la préparation et le moment fatidique de la rencontre, les cartes ne sont plus entre vos mains et l’attente peut sembler s’étirer sans fin. Le niveau de stress augmente à mesure que les doutes se multiplient et l’on aurait presque envie de jeter l’éponge plutôt que de devoir patienter encore et encore, car après tout, si on ne nous a pas déjà rappelé, c’est que ça n’augure rien de très positif. Un sentiment d’autant plus prégnant lorsque les recruteurs ne donnent plus signe de vie. Pourtant le silence est loin d’être synonyme d’échec et nombreuses sont les raisons pour l’expliquer. Alors comment gérer au mieux ce temps suspendu ?

Comment interpréter ce silence ?

Les difficultés de l’attente

Il y a quelques mois, Audrey doit passer l’entretien pour le job de ses rêves. Les missions, le secteur, les responsabilités… Tout lui plaît dans cette entreprise et elle s’y prépare comme on s’entraîne à courir un marathon. Mais le jour J, les questions sont complexes, la déstabilisent et malgré ses compétences Audrey perd un peu confiance en elle. Elle en sort dépitée, stressée et déçue d’elle-même, persuadée que la recherche de job l’attend de nouveau… Avant d’apprendre quelque temps plus tard que le poste lui était réservé.

Alexandre, quant à lui, postule après ses études dans un label qu’il aime tout particulièrement. Il connaît un peu le boss de la boîte, entre en contact avec lui et croise les doigts pour la suite. Un premier entretien lui confirme ses chances puis d’autres s’enchaînent, jusqu’à l’entretien final. Une longue attente débute. Alexandre ne perd pas espoir mais fatigue à mesure que le temps passe sans la moindre réponse. Il faudra encore compter deux mois pour que le verdict tombe : une autre candidate est finalement choisie, laissant place à autant de déception que de frustration. Tout ce temps d’attente, le jeune homme aurait sans doute pu l’investir ailleurs. Car peu importe l’issue de l’entretien, l’attente a toujours cette particularité de rendre la situation plus désagréable.

« En effet, atteste Mila Elhamdi, rien de plus humain que d’appréhender l’attente. L’autoévaluation est un réflexe quasi constant et sortir d’un entretien où l’on a été évalué par un tiers ne fait qu’intensifier le jugement que l’on porte sur soi-même. » Cette réaction immédiate pousse alors le candidat à cogiter sur sa performance après coup mais aussi à interpréter mille scénarios, tant sur le verdict que sur le panel des candidats après lui. « Et le fait de dépendre d’autrui pour pouvoir stopper ses pensées en ébullition n’arrange rien ». Comment alors reprendre le contrôle de ce processus qui nous échappe ?

Les scénarios pour l’expliquer

Lorsque certains recruteurs donnent leurs réponses finales en temps et en heure seulement quelques jours après la rencontre, d’autres donnent l’impression de vous avoir complètement oublié. « Mais si l’absence de réponse est un point de vigilance notable, ce n’est pas un mauvais signe pour autant tant les raisons pour l’expliquer sont nombreuses », énonce Mila Elhamdi. Parmi elles, quatre scénarios reviennent fréquemment.

  1. Assez simplement, le silence peut d’abord s’expliquer par le fait que le processus de recrutement soit toujours d’actualité. « Si la deadline de réponse est passée, d’autres candidats ont sans doute postulé entre-temps, été reçus par les RH et de fait retardé l’échéance. » Peut-être attendent-ils encore la réponse d’un autre candidat pour vous donner la leur ?

  2. Il peut s’agir de problèmes liés à l’organisation interne de la boîte. « Un collaborateur malade ou absent pour une raison ou une autre, un manque de communication entre le cabinet de recrutement et les chefs de service par exemple », énumère la coach. Notons d’ailleurs qu’il est important de rester vigilant si ce dernier point s’avère, car une mauvaise communication peut aussi être le signe d’une mauvaise organisation interne.

  3. Le recruteur peut également prendre du temps pour redoubler d’attention quant à votre candidature. « Si des référentiels ont été abordés pendant l’entretien, peut-être veut-il les vérifier, s’assurer que vous avez de bonnes références, une bonne acquisition des diplômes et une bonne cohérence avec le poste en question ». Il n’est pas rare qu’une réelle enquête succède à l’entretien, surtout lorsqu’il s’agit de vous assurer une nouvelle entrevue.

  4. Enfin, la phase de recrutement peut aussi être suspendue en raison d’une réévaluation de la teneur du poste. « En effet, dans la mesure où plusieurs candidats ont été rencontrés, certains ont pu prétendre faire évoluer le poste en raison de leurs compétences et de leurs perspectives », conclut Mila Elhamdi. Les RH peuvent alors repenser la définition même du job et de fait reprendre votre candidature pour s’assurer que vous êtes toujours dans la course.

Dans tous les cas, rien ne sert de paniquer dans la mesure où les dés ne sont toujours pas jetés. Et plus encore lorsque vous avez un rôle à jouer !

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6 conseils pour gérer l’attente

Certes vous n’avez pas d’autre choix que celui d’attendre face au silence. Néanmoins, il vous est possible d’adopter un comportement capable de passer outre les mauvais côtés de cette période pour patienter en toute sérénité.

1. Relativiser

Pendant cette période d’attente, faîtes un pas de côté. « L’incertitude peut-être tellement sujet à l’interprétation qu’il vaut mieux ne pas se remémorer l’entrevue en boucle », conseille la spécialiste. Au contraire, dites-vous que cela fait partie du jeu des entretiens. «Prendre du recul est d’autant plus important si le candidat est amené à potentiellement revoir les missions de la fiche de poste si cette dernière a été réévaluée. »

2. Se renseigner sur les pratiques de l’entreprise

Si la plupart des entreprises informent petit à petit les candidats du processus de recrutement, il arrive que d’autres ne tiennent pas compte des délais, ne préviennent pas les candidats quand des changements de décisions ont été pris et ne les informent pas une fois le poste occupé. Un bon moyen pour se renseigner en amont sur la suite du processus est alors de poser directement la question pendant l’entretien. « Dans le cas où la réponse du recruteur est floue, il existe également des sites tels que Glassdoor pour permettre aux candidats de jeter un coup d’œil sur les pratiques des entreprises », ajoute Mila Elhamdi. Comprendre si le comportement est dans la droite ligne de leurs habitudes ou non est un bon moyen de se faire une idée de l’après.

3. Respecter les échéances

Bien souvent, un recruteur va vous communiquer en amont le moment où il reviendra vers vous. Et qu’il s’agisse d’une date précise ou d’une durée un peu floue, si le recruteur a parlé de deux semaines c’est important de respecter les échéances fixées par l’entreprise. « Dans la mesure où rien ne sert de vouloir en savoir plus avant même que le recruteur se soit prononcé, énonce la coach. Mais aussi pour ne pas paraître trop insistant et renvoyer l’attitude d’un candidat désespéré. » Alors, rien de plus normal que de souhaiter échanger, mais seulement une fois l’échéance passée.

4. Appeler

Lorsque la date de rappel approche, entraînez-vous à relancer de vive voix le recruteur. « Car si ce dernier ne revient pas vers vous immédiatement, mon premier conseil va être de l’appeler, recommande Mila Elhamdi. Cela offre un contact bien plus facile que par écrit, évite que votre mail se perde et facilite la communication. » Pour cela, soyez sûr d’avoir le numéro du recruteur en main après l’entretien et répétez l’exercice en amont. « Personne ne va jamais reprocher à un candidat d’être intéressé par le poste pour lequel il a passé un entretien », rassure la spécialiste.

5. Ne pas subir

Contrairement à ce que l’on peut penser, ce n’est pas parce que l’on rentre dans le processus d’entretien pour un poste que l’on doit forcément se murer dans l’attente. « Il est justement très important de continuer à rester actif dans les recherches de candidature, surtout si d’autres offres vous interpellent, clarifie Mila Elhamdi. Et si d’autres opportunités s’offrent à vous, faites-le savoir, vous n’en paraîtrez que plus intéressant aux yeux des recruteurs. » Non seulement cela vous met en position de force mais cela peut aussi, dans certains cas, accélérer le processus. Vous cultivez votre rareté, et les recruteurs le remarquent.

6. Envisager l’après

Ne pas rester bloqué dans l’attente, telle est l’attitude à conserver jusqu’à la fin. « Continuez de réfléchir aux différentes perspectives et opportunités. Si après deux prises de contact pour relancer le recruteur, vous êtes toujours dans l’incertitude, passez votre chemin et continuez vos recherches. » Et dans l’éventualité où la réponse s’avère négative, reprenez le fil de l’entretien, remémorez-vous les moments qui ont pu vous porter défaut, demandez un retour et entraînez-vous. Si vous avez pu obtenir cet entretien, vous en aurez d’autres. Soyez-en sûr !

Finalement, rien n’est plus important que de rester actif en cette période de brouillard, tant sur l’attitude de relance à adopter que dans la quête d’autres opportunités. Alors à vous d’inverser la situation à votre avantage.

Article édité par Manuel Avenel, photo Thomas Decamps pour WTTJ

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