Learning expedition : ils racontent leur pari de trouver leur voie en voyageant

27 sept. 2021

7min

Learning expedition : ils racontent leur pari de trouver leur voie en voyageant
auteur.e
Samuel Durand Expert du Lab

Auteur et confériencier sur le futur du travail, spécialiste du sens et de la reconnaissance au travail

Après avoir partagé sa propre expérience de learning expedition, notre expert Samuel Durand interroge Matthieu et Cassandre, deux étudiants qui ont eux aussi tenté un tel voyage pour trouver leur voie durant leurs études.

Ces deux-là se sont rencontrés au début de leurs études, en classes préparatoires, puis ils ont intégré une école de commerce, l’EM Lyon. C’est là qu’ils se sont lancés dans leur learning expedition, une aventure qui joue encore aujourd’hui le rôle de tremplin, tant dans leurs vies personnelles que professionnelles. Pour que vous puissiez profiter de leurs retours d’expérience et de leurs conseils, je suis allé leur poser tout un tas de questions !

Comme moi, vous vous êtes lancés dans une learning expédition pendant vos études, cela nous fait un point commun ! Pouvez-vous m’expliquer comment cette aventure s’est déroulée pour vous ?

Cassandre : On a fait un tour du monde sur l’innovation managériale ! Le projet : aller rencontrer des managers et leaders du monde entier, qui innovent en termes de management. En bref, celles et ceux qui s’émancipent des schémas classiques de management, en ayant à cœur de remettre l’humain au centre de l’entreprise.

En fait, on a intégré un projet qui s’appelait “Les baroudeurs de l’innovation managériale”, mis en place par une association qui avait déjà deux ans quand on les a rejoints. Leur idée était de faire partir deux étudiants pour s’émanciper un peu de la théorie et se concentrer sur du concret : ce qui se fait ailleurs sur le sujet. Et ainsi, nourrir les réflexions de tous les managers français qui souhaitent changer leurs méthodes de management.

Comment l’idée d’un tel projet vous est venue ? Quelles étaient vos motivations de départ ?

Matthieu : Dans notre école, Ies offres de stages circulent sur des groupes en ligne réservés aux étudiants. À l’approche des périodes de stage, on y était branchés tous les jours. Un soir, en rentrant de soirée, on est tombés sur un post d’un certain Hugo Chatel, un aventurier de la deuxième édition des baroudeurs. Il y expliquait que fraîchement rentré de son propre tour du monde, il souhaitait recruter le prochain binôme.

Cassandre : Quand on y pense, la situation était très marrante : il était 3h du mat, en pleine période de recherche de stage. À ce moment-là, on avait la pression parce que tout le monde voulait un super stage mais, après seulement une année d’école, on ne va pas se mentir, c’est difficile de trouver quelque chose d’intéressant. Quand on est tombé là-dessus, on a tout arrêté et on s’est dit “ce projet est fait pour nous”, je me souviens qu’on a même ressorti une bière et qu’on a trinqué.

C’est tombé sous le sens. Et le timing était parfait : entre la prépa et l’école, on était arrivés à un stade où on en avait marre de la théorie… On avait envie de rencontrer des gens, envie de commencer à mettre un pied dans le monde actif tout en profitant d’un contexte (notre statut d’étudiant et le voyage) qui nous permettrait de kiffer.

Matthieu : On a postulé par e-mail, on a eu plusieurs entretiens avec les baroudeurs et quelques semaines plus tard, on faisait partie de l’équipe !

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Un bon mix entre kiff et apprentissage, donc. Mais vous êtes en couple, vous n’avez jamais eu peur de ne pas réussir à être sérieux à deux ou que cela gâche votre relation ? Comment choisir la bonne personne avec qui partir, selon vous ?

Cassandre : Pour nous, partir ensemble a été une évidence. Et finalement, on a bien fait de s’écouter, je dirais que notre couple est d’autant plus fort depuis qu’on a vécu ça ensemble. C’est une expérience fondatrice, on s’est construit sur les hauts et les bas de cette aventure, en s’aidant et en se complétant. Mais, honnêtement, ça s’est fait très facilement : il y avait une vraie complémentarité naturelle, aussi bien sur la répartition des tâches que dans nos émotions respectives.

Matthieu : Et puis, ce qui a fait notre force c’est d’abord l’alignement de nos objectifs : on était d’accord sur les entreprises qu’on avait envie de visiter, les lieux où on voulait aller, le type de personnes qu’on voulait rencontrer… On en avait beaucoup parlé avant notre départ et on était sur la même longueur d’onde, je crois que c’est un point essentiel.

Il faut bien se connaître aussi, à la fois soi-même et l’autre, de manière très objective : quels sont nos points forts, nos points faibles ? On a vachement compartimenté entre le professionnel et le personnel. Et enfin, le savoir vivre à deux est bien sûr primordial : un bon binôme - en couple ou non - partage les mêmes valeurs. On doit avoir du respect pour l’autre, savoir se laisser de la place et s’écouter, surtout quand on vit 24h/24 ensemble.

Alors, oui, on aurait pu le faire seul mais c’est plus difficile, la charge de travail est plus élevée, et c’est moins sympa ! À trois, pourquoi pas, ça peut fonctionner mais c’est toujours une question de feeling. En revanche, au-delà je pense que c’est trop compliqué ! En fait quand j’y pense, le mieux c’est d’être deux.

Un bon binôme - en couple ou non - partage les mêmes valeurs. On doit avoir du respect pour l’autre

Tout ça a eu évidemment un coût, comment avez-vous financé un tel projet ? Et quelle relation aviez-vous avec vos partenaires ?

Cassandre : Au total, on avait un budget de 27 000 euros pour 6 mois.
Mais on a eu la chance de rejoindre un projet déjà établi. Quand on est arrivés, le duo de l’année d’avant nous a présenté leurs partenaires et certains se sont engagés à nos côtés. Et pour le reste, on est allés convaincre d’autres entreprises. Mais tout était plus simple pour nous : on pouvait miser sur la crédibilité des éditions précédentes.

Quand on rencontrait une entreprise pour leur proposer de devenir partenaire, on demandait toujours à nos interlocuteurs ce dont ils avaient besoin, comment on pouvait les aider. Pour certains, c’était la recherche d’informations inédites, elles avaient besoin de s’inspirer avec des bonnes pratiques venues d’ailleurs, pour d’autres c’était plutôt un besoin de communication, elles cherchaient à valoriser leur soutien au projet.

Puis, au-delà de l’aspect financier et ce, quel que soit leur besoin, les partenaires ont tous souhaité beaucoup nous aider : à creuser plus loin les sujets de management, à trouver les bonnes questions à traiter, à gagner en pertinence, etc. Ils nous ont encouragés à gratter sous le vernis des discours qu’on entendait, à mieux exploiter la donnée recueillie.

Matthieu : Ce n’était pas de simples sponsors, mais de vrais partenaires, des alliés même. On n’aurait pas pu faire le voyage sans eux. Avoir des partenaires à ses côtés, au delà de l’aspect financier, c’est un vrai atout.

Et le jour J, comment se préparer au mieux selon vous ? Y a-t-il une checklist indispensable à faire avant de partir ?

Matthieu : Il y a même plusieurs checklists à faire ! D’abord professionnelle : quelles entreprises visiter, pourquoi et quand. Généralement on les contactait un mois avant notre arrivée, et le fait d’avoir déjà fait une première sélection en amont nous faisait gagner un temps fou sur place.

Cassandre : Et puis il y a une checklist logistique. On devait déjà avoir réservé nos avions, nos Airbnbs, ça nous donnait un cadre, et de la visibilité sur le rythme du voyage. Si on n’avait pas eu cette organisation, on aurait peut-être loupé des opportunités par manque de préparation !

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Comment choisir les pays justement ? Et les bonnes personnes à rencontrer pour ne pas tomber dans le bullshit ? C’est difficile à juger à distance, non ?

Cassandre : On choisissait les pays en fonction des entreprises et des personnes qu’on avait envie de rencontrer. Il faut séparer les entreprises en deux parties, celles qui sont déjà considérées comme des pionnières : Buurtzorg, Patagonia ou d’autres, et puis les pépites qui sont plus difficiles à dénicher.

Matthieu : On allait en premier lieu voir les boîtes reconnues qui, elles, pouvaient nous recommander d’autres personnes à aller voir, au niveau local ou ailleurs. Des personnes en Nouvelle-Zélande nous ont fait des recommandations géniales en Colombie, par exemple. L’inno managériale, c’est un petit monde ! Globalement, le mieux c’est de privilégier le bouche à oreille à ce qu’on trouve sur Internet, c’est un gage de confiance alors, forcément, ça donne toujours des rencontres de meilleure qualité. Mais on a aussi trouvé de superbes pépites en farfouillant sur le web !

Qu’est-ce qui vous a le plus plu dans cette aventure ?

Matthieu : Quand on est en école de commerce, on est modelable. Or, pour ma part, j’avais besoin de rencontrer des personnes avec des convictions très fortes pour me forger les miennes. Pour mettre en place de l’holacracy en Russie, par exemple, il faut se lever de bonne heure ! Et quand on s’intéresse de plus près à des personnalités comme celles que l’on a rencontrées, on a qu’une envie, c’est de devenir comme eux. Quand on sort d’entretiens comme ça, on se dit qu’on peut changer le monde. On prend des shots d’inspiration de dingue.

Cassandre : J’ai des frissons rien qu’à t’écouter (rires). Ça fait maintenant 2-3 ans qu’on a fait ce voyage, mais ce qu’on retient vraiment après avoir pris un peu de recul, c’est vraiment les gens. C’est les gens qui nous ont ouvert leur porte alors qu’ils n’avaient rien à y gagner si ce n’est discuter quelques heures. Encore aujourd’hui, je suis nourrie par toutes ces rencontres.

On se dit qu’on peut changer le monde. On prend des shots d’inspiration de dingue.

Concrètement, à quoi ressemblait votre quotidien pendant cette aventure ?

Matthieu : Il n’y a jamais deux journées identiques : il fallait préparer les rencontres en amont, rencontrer des entreprises, faire des retours aux partenaires et écrire des articles à la fois pour nos partenaires et pour notre site, une petite communauté nous suivait. Puis on se laissait du temps pour faire du tourisme… Notre rythme changeait tout le temps.

Cassandre : En fait, la seule contrainte qu’on avait était de rencontrer les gens quand ils étaient disponibles, notre planning s’adaptait donc en continu. Mais globalement ça donnait : 80% de boulot et 20% de tourisme. D’ailleurs parfois c’était un peu frustrant dans certains pays de ne faire que travailler sans visiter.

Plusieurs années se sont écoulées depuis, qu’est ce que vous faites maintenant ?

Matthieu : Aujourd’hui on a lancé Equipe De Choc, un média sur l’innovation managériale qui se concentre sur la France. C’est à la fois une newsletter et un podcast, qui ont vocation à rester un side projet pour nous. On verra comment ça évolue, mais pour l’instant on se donne le temps.

En parallèle, Cassandre est en VIE chez Wecandoo, une start-up sociale engagée pour la mise en avant de l’artisanat, elle est country manager pour la Belgique et moi je fais mon stage de fin d’étude dans un fonds d’investissement pour startup à Paris.

Cassandre : Cette learning expedition a été un tremplin énorme pour tous les deux. Ça nous a apporté un réseau mondial. Même si les rencontres ne duraient jamais bien longtemps, c’était toujours des moments forts, hors du commun. Et puis, ça donne une certaine légitimité pour s’exprimer aujourd’hui dans le monde professionnel, et une certaine confiance en nous sur nos compétences. En fait, ça a vraiment été notre troisième formation : il y a eu la prépa, l’école de commerce… et les baroudeurs.

Matthieu : On ne peut que recommander à 100% à d’autres étudiants de tenter l’aventure à leur tour, de choisir un sujet qu’ils ont envie d’approfondir, de monter un projet avec une ou plusieurs autres personnes et de se lancer ! Les écoles et les entreprises sont aujourd’hui de plus en plus friandes de ce type de projet. Vous serez soutenus, alors foncez !

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Édité par Éléa Foucher-Créteau

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