Fin de carrière : 5 conseils pour accompagner vos salariés proches de la retraite

29 mars 2023

4min

Fin de carrière : 5 conseils pour accompagner vos salariés proches de la retraite
auteur.e
Laure Girardot

Rédactrice indépendante.

Alors que la réforme des retraites fait grand bruit, le sujet du travail des seniors s’affiche dans les top priorités RH, avec un angle sociétal : quel rôle doivent jouer les entreprises en matière d'accompagnement de la fin de carrière ?

Depuis le début des hostilités démocratiques autour de la réforme des retraites 2023, le débat se perd en conjectures autour d’un seul critère : l’allongement de l’âge légal de départ à la retraite. Or, cette focale élude l’une des questions essentielles, celle du contenu et des conditions de travail des seniors. En effet, entre 55 et 64 ans, 56 % des seniors seulement exercent un emploi. Pour améliorer leur employabilité, le gouvernement a proposé plusieurs mesures entre index et CDI senior. Mais ne faut-il pas aller plus loin pour que cette tranche de vie professionnelle ait du sens et engage davantage les collaborateurs concernés ? En ce sens, le rôle social de l’entreprise n’est-il pas de proposer des dispositifs RH capables d’offrir un trait-d’union, sans couture, entre le monde professionnel et la vie post-carrière ? Radioscopie des initiatives.

1. Lever les appréhensions financières : sensibiliser et informer

Il n’est pas toujours évident d’anticiper sa vie hors du cadre professionnel après de nombreuses années impliquées dans une ou plusieurs entreprises. Cette incertitude peut même être source d’angoisse. Les entreprises ont donc tout intérêt à communiquer le maximum d’informations à leurs salariés. Des outils existent tels que le bilan social individuel (BSI) digital, un outil de communication RH donnant accès, entre autres, à des informations retraite : « Nous mettons à disposition des salariés : l’âge légal de départ et le nombre de trimestres pour partir à taux plein, en se référant au cadre légal actuel qui, vu le contexte, risque d’évoluer. Nous recommandons d’aller plus loin via notre partenaire Sapiendo, qui établit des bilans retraite individualisés et approfondis. Chacun peut ainsi disposer d’une vision claire de sa situation, à la fois actuelle et à venir, via des simulations. Cette approche inclut des projections fiables sur l’âge de départ et le montant de la pension ainsi qu’un diagnostic sur les optimisations possibles (correction de l’historique de carrière, départ anticipé, rachat de trimestres, cumul emploi-retraite…) », explique Maximilien Bialecki, cofondateur de WINCHApps.

2. Se projeter dans la vie « d’après »

Dans le cadre d’un accord de gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) signé en avril 2022, ADP, leader des solutions RH et Paie, a lancé différentes initiatives pour préparer les seniors à leur passage à la retraite. « À partir de 60 ans, les salariés peuvent bénéficier de réunions d’information collectives et d’entretiens individuels avec des conseillers retraites spécialisés, d’un stage de préparation à la retraite et d’un bilan de prévention psycho-médico social. Nous mettons à disposition un package global d’accompagnement qui est pris en charge à 100 % par l’entreprise, sur le temps de travail », explique Élodie Gourmellet, DRH ADP France et Suisse. En filigrane, l’enjeu du groupe est aussi d’endosser son rôle d’employeur responsable : « Nous avons un fort engagement de salariés : l’ancienneté moyenne est de 14 ans, l’âge moyen atteint 47 ans et le turnover reste faible pour le secteur (moins de 5 %). Il est important de reconnaître cet investissement en aidant les collaborateurs concernés à se projeter dans leur vie d’après ».

3. Alléger le temps de travail pour explorer la vie « hors du bureau »

L’autre axe issu de l’accord de gestion des emplois et des parcours professionnels d’ADP est l’aménagement des conditions de travail des salariés de plus de 55 ans. «Nous favorisons l’accès au temps partiel à 80 % ou 90 %, en garantissant le maintien des cotisations salariales et patronales d’assurance vieillesse sur la base d’un taux plein », souligne Elodie Gourmellet. Cette mesure permet à plus de 400 personnes (sur 2100), en France, d’ajuster leur rythme de travail. L’objectif est aussi de leur permettre d’explorer les possibilités d’activités en dehors de la sphère professionnelle. Une approche flexible qui est également proposée par le groupe APICIL, avec une autre architecture : « Nous proposons aux 60 ans et plus une réduction de leur temps de travail équivalent à un jour par mois ou à 2 heures et demi par semaine. Le but ? Se consacrer à autre chose dans son rituel hebdomadaire_ », explique Sofiene Chaabani, Responsable Domaine RH au sein du groupe.


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4. Créer une dynamique de transmission des savoirs

« Les seniors ont une place capitale dans notre groupe : 18 % de nos collaborateurs ont plus de 55 ans », poursuit Sofiene Chaabani. « Un senior, c’est avant tout une personne expérimentée, un ou une sachante qui doit participer à la transmission des savoirs. » C’est pourquoi APICIL a mis en place un système de tutorat, très valorisé en interne. « Nous identifions, parmi nos salariés âgés de plus de 55 ans, des profils d’expert métier, capables de transmettre leurs connaissances aux jeunes générations. Ces actions sont reconnues en interne et en externe : les tuteurs peuvent suivre une formation leur permettant d’obtenir une certification d’expert pédagogique reconnue par l’État ». Autre format proposé : ils et elles peuvent aussi jouer le rôle de tuteurs pour les alternants. Ces mesures répondent à l’enjeu de la cohabitation intergénérationnelle au sein de l’entreprise : comment créer des synergies positives alors que, de plus en plus, 4 générations travaillent sous le « même toit » ? « Il faut créer les occasions de faire travailler en binôme un senior et un junior via des ateliers opérationnels ou des événements transversaux. L’idée est de tirer parti de la diversité et de la complémentarité des compétences afin de résoudre une problématique. Mais c’est aussi une manière efficace de limiter les biais ou les stéréotypes », explique Nicolas Bonnet, DRH à temps partagé chez Avizio.

5. (Re)trouver de l’utilité et du sens dans l’associatif

Pour certaines personnes, l’engagement associatif peut être une réponse à l’épineuse question de l’utilité et du sens après sa vie active. Dans une logique de mécénat de compétences, certaines entreprises comme ADP proposent aux salariés seniors de leur dégager du temps à l’approche de la retraite. « Nous donnons 6 jours d’absence par an rémunérés aux salariés qui souhaitent s’investir dans une association », illustre Élodie Gourmellet, d’ADP. Dans le cadre de ses engagements en tant qu’entreprise à mission, KLESIA a également lancé un programme appelé « Transition Emploi / Retraite Solidaire », destiné aux collaborateurs qui sont à 6 mois de prendre leur retraite. Ils et elles ont ainsi la possibilité de consacrer une journée par semaine, sur leur temps de travail, à une association ou un autre organisme à but non lucratif, leur salaire étant maintenu à 100 %.

Si le sens de l’histoire est l’allongement de la durée de la vie professionnelle, la gestion de la fin de carrière doit s’inscrire dans un débat politique et social plus large : celui de l’inclusion et la diversité… à l’heure où l’âge reste la source potentielle de discrimination la plus crainte (39 %) et que 39 % des salariés disent avoir déjà été victimes « d’âgisme » au travail.


Article édité par Ariane Picoche, photo : Thomas Decamps pour WTTJ

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