Onboarding : comment réussir l’intégration des nouveaux salariés ?

15 déc. 2022

9min

Onboarding : comment réussir l’intégration des nouveaux salariés ?
auteur.e
Sylvain Guillet

Journaliste web

Si l’aventure pro est un voyage en mer, votre entreprise est un navire. Aussi solide soit-il, la montée à bord de l’équipage doit se faire dans les règles de l’art, au risque de tout faire chavirer. Zoom sur l’onboarding, étape clé du parcours RH.

Réussir à convaincre son ou sa prétendant(e) de venir dîner chez vous est une chose, mais encore faut-il la persuader de rester jusqu’au dessert ! Pour le recruteur, c’est à peu près la même chose. Le « oui » d’un candidat à une proposition d’embauche ne garantit en rien que celui-ci se présentera lors de son premier jour, ni qu’il restera dans l’entreprise jusqu’au bout de sa période d’essai. Pour réduire le coût lié au turnover (jusqu’à 213 % du salaire d’un employé) et faciliter l’intégration des nouveaux salariés dans votre structure, l’onboarding constitue un outil efficace, à condition de savoir comment le manier. Pour devenir un pro de l’onboarding, découvrez les conseils de Gilles Verrier, ex-DRH du groupe Décathlon France et Directeur Général d’Identité RH, et Yohann Filipe, DRH chez Stack Labs.

Onboarding RH : commençons par une définition

On ne saurait donner une bonne définition de l’onboarding RH sans commencer par sa traduction. Ce terme anglais est dérivé de « onboard », qui signifie « intégrer ». Ainsi, l’onboarding correspond à la phase d’accueil et d’intégration d’un nouvel employé au sein d’une entreprise. Sur le papier, ça semble simple, mais ce processus RH est en réalité plus complexe qu’il n’y paraît. L’onboarding est composé de plusieurs étapes distinctes, qui vont du pré-boarding aux journées d’accueil, en passant par la formation du nouveau salarié et son suivi régulier tout au long de la période d’intégration. Surtout, la réussite d’un onboarding a un impact décisif sur la fidélisation et la productivité des nouvelles recrues.

L’onboarding, pourquoi est-ce si important ?

Non, l’onboarding n’est pas seulement un terme à la mode dans le cercle très fermé des start-ups pseudo avant-gardistes. Si le monde de l’entreprise parle autant de ce processus RH, c’est parce que sa réussite peut être décisive dans le cycle de vie d’un collaborateur. « L’humain a besoin de se sentir attendu quand il arrive quelque part », assure Yohann Filipe. Soigner l’intégration des nouveaux salariés a plusieurs effets bénéfiques pour l’employeur…

Réduire le turn-over

À l’heure où les salariés se font de plus en plus volatiles, la rétention est devenue l’un des challenges principaux auxquels les entreprises doivent faire face. Selon les données fournies par l’INSEE en 2014, le taux de rotation de la main-d’œuvre aurait été multiplié par 5 en 30 ans. Les recruteurs doivent aussi résister à la montée en puissance du phénomène de « ghosting », à savoir les candidats qui ne donnent plus signe de vie après avoir accepté une proposition d’embauche… Ce qui oblige les RH à recommencer le processus de recrutement de zéro (pas cool). D’où l’importance de mettre l’accent sur les premiers pas du salarié dans l’entreprise, en veillant à ce que son intégration se déroule de manière pérenne (assurez-vous qu’il soit heureux d’être là !). Surtout qu’un onboarding raté coûte cher – environ 7000 € ! Malheureusement, à l’heure actuelle, seules 51 % des entreprises ont déclaré avoir mis en place une intégration suivie des nouveaux collaborateurs.

Améliorer la productivité

L’intégration des recrues n’a pas pour seul objectif de les faire rester dans l’entreprise. On touche ici à un enjeu crucial de l’onboarding RH : rendre le nouveau salarié opérationnel le plus rapidement possible. En effet, on constate que le temps de formation d’un employé est considérablement allongé lors de l’absence d’un processus onboarding structuré. 62 % des collaborateurs qui ont suivi une étape d’intégration sont parvenus à atteindre leurs objectifs dans l’année, tandis qu’ils ne sont que 17 % chez ceux qui n’ont pas eu d’onboarding RH. Améliorer la productivité des nouveaux employés en optimisant leur temps de formation est donc crucial. Cela permet à l’entreprise d’atteindre plus rapidement le « seuil de rentabilité » d’un salarié, c’est-à-dire le moment où les rendements apportés par ce dernier dépassent les coûts liés à son embauche.

Booster sa marque employeur

« Un client mécontent est un client perdu ; un candidat mécontent c’est 10 clients de perdus », soutient Gilles Verrier pour illustrer l’impact du bouche-à-oreille sur l’image d’une entreprise lors du processus de recrutement et d’intégration. L’expérience candidat est donc un levier de communication percutant pour les organisations, si bien que les ressources humaines jouent désormais un rôle prépondérant pour l’amélioration de l’image d’une marque. Or, on aurait tort de penser que les actions liées à la marque employeur se cantonnent à la pré-embauche. La période d’intégration est l’occasion de laisser une forte impression (positive) à un nouveau salarié. Ainsi, plus l’onboarding sera travaillé et réussi, plus il marquera les nouvelles recrues – qui se feront alors un plaisir d’aller raconter autour d’elles à quel point elles ont été bien accueillies à leur nouveau poste.

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Un onboarding RH, ce n’est pas quelque chose qui s’improvise. De la signature du contrat à la clôture de l’onboarding, l’intégration doit passer par plusieurs étapes importantes.

Le pré-boarding

Le pré-boarding correspond à la période qui suit l’acceptation de l’offre d’emploi par le candidat et qui s’étale jusqu’à son arrivée officielle dans l’entreprise. C’est à ce moment-là que les recruteurs font face au risque de ghosting. Il est donc essentiel de « créer du lien » avec la recrue avant sa prise de poste, comme le rappelait Coralie Rachet, directrice générale du Cabinet Robert Walters, dans une chronique Work In Progress de 2020. De cette manière, vous augmentez vos chances de sécuriser votre recrutement, car un candidat qui a déjà un pied dans l’entreprise risque moins de vous faire faux bond.

La communication est la clé. Assurez un suivi par e-mail, par sms, ou même en invitant le futur salarié à participer à certains évènements de l’entreprise, afin qu’il puisse rencontrer ses futurs collègues et s’imprégner en douceur de la culture de votre organisation. Par exemple, chez Stacklabs, Yohann Filipe organise deux fois par mois un « Stack Day » avec tous les collaborateurs pour échanger sur les nouveautés dans le monde de la tech, et il n’hésite pas à y convier les futurs salariés qui ne sont pas encore en poste. Ils peuvent ainsi « commencer à se présenter et à préparer l’onboarding », selon lui. Durant cette période, restez à la disposition du candidat pour répondre à toutes ses questions et expliquez-lui en détail comment va se dérouler son arrivée.

D’un point de vue administratif, le pré-boarding est également un bon moyen de vous faire gagner du temps, de sorte qu’en arrivant dans l’entreprise, « le collaborateur soit déjà un peu musclé sur certains sujets », conseille Gilles Verrier. Plutôt que de lui remettre 147 documents à lire et à signer le jour de son arrivée, commencez à lui en envoyer quelques-uns pendant la période de pré-boarding, afin qu’il puisse en prendre connaissance tranquillement et qu’il se sente moins débordé lors de son premier jour.

L’arrivée dans l’entreprise

Le jour J est là et le nouveau salarié fait son entrée officielle dans l’entreprise. La journée d’intégration se structure autour de 4 piliers fondamentaux :

  • visite du site ;
  • rencontre avec les collaborateurs ;
  • premiers échanges avec le manager ;
  • documentation et remise du matériel.

À vous de définir le programme tout en essayant de mettre la nouvelle recrue à l’aise, car l’arrivée dans une nouvelle entreprise est souvent source de stress et peut être intimidante. Envisagez de préparer un (petit-)déjeuner convivial avec l’ensemble des collègues et/ou de lui remettre un pack de bienvenue. C’est le premier contact concret que cette personne aura avec son nouveau cadre professionnel, il est important de soigner l’impression qu’il va s’en faire.

Cette étape de l’onboarding est également déterminante en termes de productivité. À la fin de son premier jour, le salarié doit certes avoir un avis positif de l’entreprise, mais il doit aussi être capable de débuter sa formation rapidement. Il s’agit « de le mettre à bord sur un certain nombre de sujets et de commencer à le faire bosser, pour l’accompagner vers l’autonomie », précise Gilles Verrier.

Suivi et montée en compétences

Passée l’étape cruciale des premiers jours, on serait tenté de laisser tomber l’onboarding en estimant que le pire a été évité. À tort ! L’intégration complète d’un salarié prend du temps et nécessite de mettre en place un processus de suivi régulier. Assurez-vous, tout au long de cette période, que le nouveau collaborateur s’adapte correctement à son environnement. Organisez un point régulier avec lui pour qu’il puisse donner des feedbacks, s’exprimer librement et poser des questions, « à des rythmes qui sont variables selon le niveau de responsabilité et l’expérience de la personne », précise toutefois Gilles Verrier. Cela vient en complément des réunions one to one avec son N+1, lesquelles seront davantage orientées vers le suivi de la formation et des compétences acquises.

De cette manière, il sera plus rapide d’identifier un problème lié à l’intégration du nouveau salarié, et de trouver une solution avant que la recrue ne décide de quitter l’entreprise. Pour rappel, 65 % des cadres démissionnent dans les 6 premiers mois à cause d’un mauvais parcours d’intégration, selon une étude de Cadremploi réalisée en 2019. Misez donc sur un processus onboarding structuré pour éviter cela !

Bien que la fin de la période d’essai ne signifie pas forcément que l’intégration du salarié soit terminée, ce moment est l’occasion de mettre en place une évaluation plus poussée des premiers mois passés dans l’entreprise. D’un côté comme de l’autre, il s’agit d’exprimer un feedback complet et structuré. On met les choses à plat et on dresse un bilan de la collaboration. Avec comme finalité : décider ou non de cristalliser cette embauche, mais aussi d’adapter s’il le faut les process de travail. Seule une communication fluide garantit à la fois une optimisation croissante de la productivité et la satisfaction de la recrue à son nouveau poste.

« Un onboarding réussi passe par une intégration structurée du nouveau collaborateur. »

Quels outils pour faciliter l’onboarding ?

De plus en plus d’entreprises décident d’utiliser la technologie et les outils digitaux pour automatiser leur processus d’onboarding RH. Chaque budget est différent, mais « quand on a la capacité de passer par des outillages, il faut le faire », préconise Yohann Filipe. Loin de remplacer l’humain, ces outils servent de support pour faciliter l’expérience d’intégration. En voici quelques-uns.

Plateforme de messagerie : Slack

Les plateformes de messagerie en ligne telles que Slack ont fait une entrée fracassante dans la vie des entreprises, boostées par la pandémie du Covid-19 et le développement du télétravail. Grâce à ce type d’outil collaboratif, la communication devient plus fluide – mais aussi plus humaine – comparé aux emails et leur cordialité parfois pompeuse. Slack permet également d’échanger des documents et des liens facilement, ce qui est fort utile lors de la période d’intégration. N’hésitez pas à inviter le nouveau salarié dans les canaux Slack de vos équipes, et ce dès le pré-boarding, afin qu’il puisse se familiariser avec l’environnement de travail de l’entreprise avant d’en devenir à son tour un acteur.

Logiciel d’onboarding : HeyTeam

HeyTeam est un célèbre logiciel d’onboarding qui propose des programmes d’intégration personnalisés. Chaque entreprise crée son propre template selon ses besoins. L’idée est de rendre l’onboarding plus ludique grâce à des jeux, des visites virtuelles et une interactivité poussée, tandis que l’avancement dans le processus d’intégration se fait à l’aide d’une checklist réalisée également par vos soins. Le logiciel peut par ailleurs se connecter à de nombreux outils externes tels que Slack, Microsoft Teams, DocuSign… afin de faciliter les échanges de documents et la communication virtuelle.

Automatisation : Arondor

De plus en plus de DRH ont adopté le RPA (Robotic Process Automation) pour automatiser certains processus d’onboarding RH et alléger leur charge de travail. C’est d’autant plus vrai pour les grandes entreprises qui ont un volume de recrutements élevé. Arondor leur propose une solution utilisant des bots RPA afin de leur confier les tâches administratives les plus lourdes (et les plus répétitives) au moment de l’onboarding. La promesse est simple : automatiser à 100 % la chaîne de création autour des nouveaux collaborateurs, plutôt qu’entrer manuellement leurs informations dans les différents serveurs. On gagne du temps, on réduit le risque d’erreurs (les contraintes liées au RGPD sont par exemple automatiquement prises en compte) et on fait baisser le coût de l’onboarding.

Exemple d’onboarding : Google a tout compris !

Le géant Google n’est pas seulement l’une des entreprises les plus puissantes et innovantes au monde, elle est aussi un employeur gourmand en main d’œuvre, puisque la firme emploie plus de 135 000 employés à travers la planète - soit l’équivalent d’une ville comme Annecy. Pour maximiser l’efficacité des onboardings, elle a mis en place un processus original qui repose sur une checklist dite « just in time ». La veille de l’arrivée d’un nouveau collaborateur, le manager reçoit un email qui contient une checklist d’onboarding avec 5 tâches à effectuer le jour J :

  • organiser une discussion sur les rôles et les responsabilités ;
  • confier le nouvel employé à un mentor ;
  • aider le nouveau salarié à se constituer un réseau social ;
  • organiser des réunions de contrôle une fois par mois pendant les six premiers mois de l’embauche ;
  • encourager le dialogue ouvert.

Le fait que le manager reçoive cette checklist seulement 24 h avant l’entrée en poste de la recrue ne doit rien au hasard. Google joue ici sur le serial position effect, une tendance de l’être humain à mieux mémoriser ce qui lui arrive en dernier plutôt que les événements intermédiaires. D’où le nom « just in time » (« juste à temps ») choisi pour cet email récap. Ce sentiment d’urgence et de responsabilité aurait d’ailleurs permis à Google d’améliorer de 25 % les résultats de son onboarding.

Si on regarde de plus près la checklist, 3 des 5 points listés concernent la culture d’entreprise. Pas étonnant lorsqu’on sait l’importance que Google lui donne, jusqu’à affirmer que « ce sont les personnes qui font de Google ce qu’elle est » (« People that make Google the kind of company it is »). « Une entreprise a une culture, des rites, des habitudes. Il y a donc un enjeu pour le salarié, lorsqu’il rejoint l’organisation, de comprendre et d’intégrer ces caractéristiques », explique Gilles Verrier.

Le géant de la Silicon Valley met l’accent sur les relations interpersonnelles et le « fun » au sein de son environnement de travail. Les études ont montré qu’un employé heureux est 12 % plus productif. D’ailleurs, Google a augmenté la satisfaction de ses employés de 37 % en mettant en œuvre des initiatives liées à la culture d’entreprise. Ce qui lui a permis d’être élu meilleur employeur de l’année pour la deuxième fois consécutive en 2022.

Vous l’aurez compris, un onboarding réussi passe par une intégration structurée du nouveau collaborateur. Outre l’aspect administratif, il est important d’accorder du temps à ce que la recrue s’imprègne de son nouveau cadre de travail, et de la culture de votre organisation. Vous réduirez ainsi le turn-over dans votre entreprise tout en augmentant la productivité des nouveaux salariés. Alors, qu’attendez-vous pour devenir un pro de l’intégration ?

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Article édité par Ariane Picoche, photo : Thomas Decamps pour WTTJ