Comment accompagner des profils seniors quand on est jeune manager ? Nos 7 conseils

05 avr. 2023

5min

Comment accompagner des profils seniors quand on est jeune manager ? Nos 7 conseils
auteur.e
Florence Abitbol

Journaliste indépendante et rédactrice de contenus

Être catapulté dans la position de manager à un jeune âge n’est pas forcément facile, surtout quand les collaborateurs qui constituent votre équipe ont quelques années de route. Petit guide pour éviter les embûches.

Vous venez de rejoindre cette entreprise qui vous faisait de l’œil, occupant aussitôt des fonctions de manager. Félicitations ! Sauf que, parmi les cinq personnes qui composent votre équipe, quatre ont quinze ans de plus que vous – et l’expérience qui va avec. Aïe, votre syndrome de l’imposteur se réveille, ou peut-être est-ce votre peur de ne pas être pris au sérieux ? En fait non, vous êtes plutôt super à l’aise et impatient de leur montrer vos méthodes ultra-supra-hyper-innovantes, à ces « boomers » – au risque de vous faire prendre en grippe… Que vous appréhendiez la situation ou pas, l’écoute et le dialogue seront vos alliés. Voici nos conseils pour manager des profils expérimentés, tout en tirant parti des relations de travail intergénérationnelles.

1. Solliciter l’appui de son N+1

Dans la prise de poste, il est important d’avoir l’appui de son N+1. Celui-ci pose la légitimité du nouveau manager auprès de l’équipe tout en la rassurant sur ses qualités et en lui expliquant pourquoi il l’a choisi. Pour Patricia Ali-Khodja, co-fondatrice et co-dirigeante du cabinet de coaching et de formation Lead and Team, il est important que le N+1 pose la légitimité du jeune manager auprès de l’équipe. « Quand il le présente, il est important que le dirigeant donne du sens à son choix : pourquoi il l’a recruté et lui fait confiance pour manager cette équipe. » Vis-à-vis du jeune manager lui-même, il est aussi important que soient posées ses qualités. « Il faut lui dire quels sont ses talents, ses qualités et ses vulnérabilités, car c’est pour tout ça qu’il a été choisi. Verbaliser ces éléments à un jeune à qui a été confié ce poste à responsabilités va permettre de créer un lien de confiance. »

2. « Connais-toi toi-même », disait Socrate…

… et cela vaut aussi pour le jeune manager ! Dans son cas, il s’agit avant tout de bien comprendre ses ressorts intuitifs et émotionnels pour mieux s’en servir, ou du moins les gérer si la situation le demande. « C’est essentiel de comprendre son mode de fonctionnement, pourquoi agit-on de telle manière à un moment donné ? Le fait de se connaître soi-même va permettre de mieux comprendre les autres et de mieux entrer en communication avec les membres de l’équipe, car ceux-ci aussi vont avoir des réactions face à l’attitude de leur manager », insiste Patricia. L’introspection permet de préparer le terrain pour adopter la meilleure posture possible et une communication adaptée aux membres de l’équipe : « Faire un travail sur soi aide à l’appréhension des situations et à créer du lien ».

« Le fait de se connaître soi-même va permettre de mieux comprendre les autres. »

3. Rester souple en toutes circonstances

L’erreur à ne pas commettre : se montrer inflexible dans ses process et imposer le même modus operandi à tous les membres de l’équipe à manager car, sans surprise, cela ne risque pas de fonctionner. Au contraire, il faut savoir rester flexible et faire preuve d’un maximum d’adaptabilité. Patricia travaille régulièrement sur ce point avec les personnes qu’elle coache. « On ne manage jamais deux personnes de la même façon au sein de son équipe : les attentes ne sont pas aux mêmes endroits. Il faut décoder les personnalités qu’on a en face de soi pour mieux y répondre : que ce soit avec plus de cadre, ou au contraire de l’autonomie, ou bien un discours différent. » Pour elle, savoir moduler en fonction des individus et des situations fait partie des qualités clés du poste de manager.

4. Le manager ne fera jamais tout, tout seul

Si le jeune manager doit garder en tête les compétences et l’expertise qui légitiment son rôle, il ne doit pas se positionner indépendamment de son équipe et gérer à lui seul toutes les activités. À vouloir tout contrôler, il prend le risque de finir très vite sous l’eau. « Un jeune manager va vouloir tout faire pour démontrer ses capacités, or ce n’est pas parce qu’on a l’expertise qu’on sait déléguer », explique Patricia. Au contraire, l’alliance fera la force de son management : « Il est essentiel qu’il s’appuie sur l’expertise de chacun des membres de l’équipe, et pour cela il lui faut créer des alliances ». De même, l’alliance peut aussi venir de la hiérarchie, cette fois sous la forme d’un accompagnement. « Sur la prise de poste, le dirigeant peut apporter ses connaissances et grilles de lecture des situations au jeune manager. Sinon, le faire accompagner par un coach professionnel permet d’acquérir les bons outils et la bonne posture pour ne pas le laisser tout seul avec ses difficultés. »

5. Pratiquer l’écoute et le dialogue (le vrai !)

Gagner la confiance de son équipe, notamment lorsque le jeune manager est face à des collaborateurs plus âgés ou expérimentés, peut sembler la tâche la plus difficile à accomplir. Pour autant, elle n’est pas impossible, à condition de se mettre dans la bonne posture. « Il ne faut pas hésiter à exprimer à son collaborateur qu’on a besoin de lui et de son expertise, lui demander conseil parce que son avis a de la valeur. » L’écoute reste primordiale dans le management, mais celle-ci doit être complétée par le dialogue. « Un manager junior est aussi vecteur de changement, notamment pour des collaborateurs qui ont plus d’expérience. C’est à lui que revient la tâche de faire comprendre ce qu’il peut apporter au niveau des nouveaux process ou des nouveaux outils pour faire avancer au mieux les projets. » Il ne s’agit pas de forcer la main à son équipe et de braquer ses collaborateurs en imposant une « meilleure façon de faire » (qui risque d’être mal accueillie), mais de « donner du sens à ces nouvelles approches en portant de l’intérêt aux pratiques des collaborateurs, et de co-construire de nouvelles routines à l’aide d’arguments et de perspectives inédites ».

« Un manager qui aura une attitude de petit chef sera celui qui aura le moins de légitimité. Son poste ne fait pas de lui le “sachant”. »

6. Doser le lâcher-prise

Trouver le juste équilibre entre une attitude de leader et une position d’écoute demeure une des tâches les plus ardues du poste de manager – et ce, quel que soit son âge. Côté confiance en soi, certains ont déjà une prestance naturelle qui facilite leur prise de poste, cependant elle ne fait pas tout : « Un manager qui aura une attitude de petit chef sera celui qui aura le moins de légitimité. Son poste ne fait pas de lui le “sachant” et il faut savoir se remettre en question », éclaircit Patricia. Un brin d’humilité ne fait donc pas de mal au jeune manager qui doit autant savoir déléguer que laisser de la place à l’expertise des membres de son équipe, à pratiquer de manière mesurée : « Il faut rester en capacité de savoir dire non, tout en expliquant pourquoi », l’argumentaire étant finalement l’outil qui va donner du sens à l’autorité du manager.

7. En cas de crise, désamorcer « activement » la situation

Si le dialogue ne passe pas avec un collaborateur, on évite l’effet cocotte minute en verbalisant la situation le plus tôt possible. « Il faut entamer rapidement le dialogue et avoir une attitude ouverte », analyse Patricia. « Dire ce qui est ressenti, comme par exemple de la défiance, et discuter des attentes du collaborateur vis-à-vis du manager et inversement. » Si le dialogue ne passe toujours pas, on peut toujours se tourner vers son N+1 qui va servir de médiateur pour débloquer la situation. L’important est de ne pas mettre la poussière sous le tapis. « Mieux vaut éviter de laisser le collaborateur avec qui ça ne passe pas et s’isoler d’une partie de l’équipe, ce qui vaut pour toutes les situations de tension. Il ne faut pas être passif ou s’isoler quand quelque chose arrive. Être sur la défensive ou en retrait sont des postures à éviter quand on est manager. » Et oui, en tant que jeune manager, vous devrez aller au front et faire face à des situations pas toujours confortables, or se montrer passif n’est pas une solution. « Les collaborateurs vont chercher à faire bouger les limites du management voire à le déstabiliser : il faut rester actif et dire jusqu’où cela est acceptable. De même, pour instaurer la confiance avec les collaborateurs, il est important d’aller la chercher et la construire avec les membres de l’équipe. »

« Il faut entamer rapidement le dialogue et avoir une attitude ouverte. »

Pour résumer, un jeune manager a besoin de bien se connaître, de veiller au grain et de penser ses moyens d’action : une écoute active et une analyse des situations pour agir en accord avec les circonstances et les personnalités. Une attitude qui demande de la communication, de l’ouverture et une capacité à se remettre en question, sans perdre de vue ses compétences et sa confiance en lui / elle.

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Article édité par Ariane Picoche, photo : Thomas Decamps pour WTTJ

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