La “Ville des 15 minutes” : le futur du travail ?

18 nov. 2021

4min

La “Ville des 15 minutes” : le futur du travail ?
auteur.e
Pilar LlácerExpert du Lab

Head Work of the Future Center EAE Business School

Imaginez travailler à moins de quinze minutes à pied de chez vous. Dans les grandes villes, c’est considéré comme un privilège. Bien souvent, le lieu de travail détermine non seulement l’achat d’une maison, mais aussi le choix de l’école des enfants ou les soins dispensés aux aîné·e·s. Et avec la crise du Covid-19 et le déploiement soudain du télétravail, nous avons (re)pris connaissance d’une chose : nous sommes des animaux sociaux ! Rester enfermés chez nous sans croiser personne peut être une vraie atteinte à notre santé mentale… Pour garantir ce lien social, mais également s’engager dans des objectifs de développement durable : et si nous développions les “villes du quart d’heure” ?

Travailler à distance, ce n’est pas nouveau. Jack Nilles, physicien et ex-ingénieur de la NASA avait déjà posé les bases du télétravail dans les années 1970. Lors de la crise pétrolière aux Etats-Unis, Nilles a tenté de diminuer les déplacements liés au travail afin de réduire la pollution et les problèmes liés aux transports en proposant le telecommuting comme alternative à la mobilité. Son credo : «amener le travail au travailleur et non le travailleur au travail ». Pourtant, à cette époque, les moyens technologiques n’étaient pas suffisants pour qu’il puisse se développer. Quarante ans plus tard, malgré la quatrième révolution industrielle et ses nombreuses innovations, la pratique du télétravail restait anecdotique… Il aura ainsi fallu attendre la pandémie actuelle pour connaître une véritable explosion du télétravail et du concept de “mobilité durable” lié à nos déplacements quotidiens. Les restrictions sanitaires ont enclenché un changement dans notre manière de vivre, de consommer et de travailler.

En quoi consiste la ville du quart d’heure ?

Grâce à la technologie, nous n’avons plus besoin de nous déplacer pour consommer ou pour travailler. Mais il ne faut pas oublier que nous sommes des êtres sociaux, et que le mélange de cultures stimule la créativité et l’innovation.

La ville du quart d’heure est le nom du projet lancé par Carlos Moreno, professeur et directeur scientifique de la Chaire ETI (Entrepreneuriat Territoire Innovation) à l’Université parisienne de la Sorbonne. En 15 minutes à pied ou à vélo, les habitants de la ville peuvent accéder à la plupart de leurs besoins essentiels.

Ces villes du quart d’heure contribuent à l’objectif zéro émission de 2050 tout en participant à l’émergence d’une nouvelle économie de la Santé, où les activités, les produits et les services sont évalués en fonction du bien-être qu’ils procurent.

Cependant, ce nouveau modèle et les changements qu’il implique sont freinés par la tendance de ces dernières années à créer des “villes” ou espaces éloignés du centre qui exigent un déplacement physique de la part des travailleurs. Dans ce nouveau paradigme, les entreprises encouragent les employés à développer de nouvelles habitudes comme le télétravail, mais aussi à envisager des espaces de coworking à moins de 15 minutes de chez eux.

Grâce à la technologie, nous n’avons plus besoin de nous déplacer pour consommer ou pour travailler. Mais il ne faut pas oublier que nous sommes des êtres sociaux, et que le mélange de cultures stimule la créativité et l’innovation. Cet aspect n’échappe pas au modèle de la ville du quart d’heure. Cette nouvelle manière de penser les espaces de travail permettra en effet la rencontre de travailleurs de différentes entreprises, favorisant ainsi l’échange d’idées et l’innovation – éléments indispensable à la croissance des business.

Un modèle gagnant-gagnant

La mise en place du modèle de ville du quart d’heure, étroitement lié à la généralisation du télétravail, offrirait de nombreux avantages pour tous les concernés. Des bienfaits qui, en plus, vont dans le sens des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD)édictés par les Nations-unies et de l’Agenda 2030.

Pour les travailleurs :

  • Un gain de temps considérable pour les déplacements, ainsi que de réelles économies ;
  • Des bienfaits pour la santé et la qualité de vie (ODD 3 : la bonne santé et le bien-être) ;
  • L’accès à des postes en remote n’importe où sur la planète, permettant ainsi de meilleures conditions de travail et une croissance économique (ODD 8 : Travail décent et croissance économique).

Pour les entreprises:

  • Une économie des espaces de travail ; plus besoin d’acheter ou de louer de grands bureaux pour accueillir tous les employés. Un renforcement du travail en distanciel ainsi que des options plus flexibles qui combinent télétravail et travail en présentiel ou des activités en groupes restreints par ville ou par quartier ;
  • Une meilleure attractivité des entreprises grâce aux conditions avantageuses qu’elles peuvent offrir à leurs salariés, gages d’un plus grand engagement des travailleurs ;
  • Possibilité d’attirer des talents au niveau mondial.

Pour la société :

  • Une redynamisation des noyaux de population rurale ou des zones urbaines défavorisées ;
  • La création d’emploi dans les zones éloignées des centres financiers traditionnels ;
  • L’inclusion des groupes à risque d’exclusion sociale ;
  • La création de villes et de communautés durables (ODD 11 : Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables).

Le travail dans la ville du quart d’heure propose donc de nombreux défis au niveau structurel : le maintien de l’emploi, la création de nouveaux postes, l’inclusion des groupes défavorisés et la réduction des inégalités.

Pas de futur du travail sans employabilité durable

D’ores et déjà, nous sommes immergés dans un nouveau système économique qui a un impact sur notre comportement et notre identité dans la société. De fait, l’économie circulaire se présente comme un modèle de production et de consommation qui nécessite de partager, de louer, de réutiliser, de réparer et de rénover au maximum des produits existants afin de créer de la valeur ajoutée.

En parallèle, le monde du travail subit un changement radical dû aux effets de la digitalisation et de la transition énergétique. Le travail, comme l’énergie, ne se crée ni se perd, il se transforme. Et à vitesse grand V. Dès lors, le concept d’ “employabilité durable” semble fondamental et requiert le développement constant des compétences exigées par le marché du travail tout au long de la vie active. Dans cette réinvention professionnelle constante, la capacité d’apprentissage et l’esprit critique sont des compétences clés.

Malgré les nombreux rapports qui pointent l’impact de notre mode de vie sur le climat et sur les générations futures, c’est finalement la pandémie qui aura réussi à prouver que, pour de nombreuses professions, il est bien souvent inutile de se déplacer pour travailler.
Un retour au mode de croissance pré-Covid semble quasiment impossible car les Objectifs de Développement Durable des Nations-unies figurent aujourd’hui au centre de nos préoccupations. Ces 17 objectifs doivent guider la stratégie entrepreneuriale, ses processus structurels et la mise en œuvre de ses concepts-clés comme la mondialisation.

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Article traduit de l’espagnol par Manon Gustot ; Photos Thomas Decamps pour WTTJ

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