Valeurs perso, quête de sens… En attendons-nous trop de notre entreprise ?

31 oct. 2022

12min

Valeurs perso, quête de sens… En attendons-nous trop de notre entreprise ?
auteur.e
Alison TaylorExpert du Lab

Consultante et conférencière spécialiste en gouvernance durable et éthique

Les mouvements progressistes se font entendre dans les entreprises depuis une dizaine d’années. La pression monte du côté des salariéˑe·s, qui réclament que les entreprises qui les emploient portent haut et fort leurs valeurs. Les grandes marques se sont empressées de multiplier les communiqués pour affirmer leur engagement vers plus de lien social, d’inclusion, de diversité, d’égalité et de politiques environnementales.

Si la vague de velléités responsables de la part des entreprises donne plus de pouvoir aux travailleurˑeuse·s, certains experts soulignent les limites des entreprises du secteur privé en tant que vecteurs du changement politique et social.

Les valeurs portées par les entreprises et la mobilisation des salariéˑe·s peuvent-elles remplacer l’action politique ? Dans quelle mesure le travail peut-il nourrir ce besoin fondamentalement humain qu’est la quête de sens ? Et avons-nous vraiment besoin que notre vie professionnelle revête davantage de sens ?

Voici quelques-unes des questions que nous avons posées à Alison Taylor, experte en éthique pour Le Lab de Welcome to the Jungle. Alison Taylor est la directrice exécutive d’Ethical Systems, un think-tank et centre de recherches américain qui s’est donné pour rôle de bâtir des ponts entre le monde universitaire et celui des affaires. Elle enseigne la responsabilité professionnelle et le leadership à la NYU Stern School of Business, à New York.

Les jeunes attendent beaucoup du travail, plus que leurs aînés, ce qui leur a valu le surnom de “Gen. Dreamer”, la “génération des rêveurs”. En tant qu’enseignante à la New York University, pensez-vous que ce soit mérité ?

Je suis professeure dans une école de commerce, qui attire, on le sait, des profils bien particuliers. Mais de mon expérience, aussi bien auprès des étudiant⋅e·s du premier cycle que des élèves en MBA, je dirais qu’il y a bien deux types de réactions assez binaires face au sujet des valeurs dans le monde du travail. Par exemple, je demande souvent à mes étudiant⋅e·s de MBA s’ils et elles se verraient travailler pour Amazon : la question divise clairement la classe. La moitié me dit : « Non, Jeff Bezos est un escroc et Amazon, c’est une culture d’entreprise hypertoxique. » Et les autres me répondent : « Oui, c’est une boîte incroyable et innovante. »

On retrouve ces conceptions dans le premier cycle, où certainˑe·s se voient déjà analystes chez Goldman Sachs ou Morgan Stanley – des entreprises dans lesquelles les conditions de travail sont notoirement terribles, avec des semaines de 100 heures. Mais ces personnes sont prêtes à aller au charbon en début de carrière pour décrocher ensuite un poste dans un fonds d’investissement et gagner un salaire mirobolant. La moitié d’entre elles tient le raisonnement suivant : « Je vais tenir bon et rembourser mon prêt étudiant » — ce n’est pas génial mais il faut en passer par-là. Et il y a les autres, qui n’envisageraient même pas ce type de parcours et attendent vraiment autre chose de leur carrière.

Selon vous, quels sont les aspects bénéfiques et les dangers dans le fait d’attendre autre chose de son travail qu’un salaire à la fin du mois ?

Quand je repense à mes 20 ans, j’étais persuadée qu’une fois qu’on décrochait un vrai poste, on devait aller dans une boutique de fringues s’acheter une horrible tenue, s’asseoir à son bureau et subir toutes sortes de mauvais traitements. L’idée c’était de courber l’échine, de faire ce que ton boss te disait de faire, jusqu’à ce que tu aies assez d’ancienneté pour devenir à ton tour la boss des autres. C’était vraiment comme ça que je me représentais le monde professionnel. Donc je pense que d’un côté, il est bien plus sain que les jeunes n’aient plus ce genre de représentations en tête, qu’ils se disent que vu le temps qu’ils vont y consacrer, il faut que ce soit pour une chose en laquelle ils croient.

Mais d’un autre côté, je me pose la question de la faisabilité de tout ça, de ne jamais faire de compromis. Il y a de nombreuses études sur ce sujet des jeunes générations qui veulent travailler dans une boîte dont ils partagent les valeurs, et où l’on voit qu’elles ne sont pas prêtes à faire des concessions. Pourtant, aller bosser dans une boîte privée dont le principe est de dégager du profit et penser que le boulot sera 100 % raccord avec nos valeurs et aspirations, me paraît follement irréaliste.

« Je ne pense pas que nous ayons, en tant qu’humains, tant que ça besoin d’avoir un “but supérieur” grandiose dans ce que nous faisons. » - Alison Taylor, experte en éthique

Au-delà d’une potentielle déception, voyez-vous d’autres risques à vouloir ainsi une porosité entre nos valeurs personnelles et la politique de l’entreprise ?

Les entreprises marchent sur des œufs en ce moment : on leur demande soudainement de ne plus seulement être, mais aussi d’avoir du sens. Et le gros de leurs efforts pour incarner tout ça repose sur de la com’ et du marketing. Prenez une entreprise comme Coca-Cola ou Facebook : on nous sert des visions nobles, superbes et totalement irréalistes. Côté Facebook, ça donne quelque chose du genre on va “bâtir une communauté et rapprocher les gens” ; pour Coca-Cola, on va “inspirer des moments de bonheur et d’optimisme”. Le message — à savoir qu’”on” va apporter un supplément d’âme à ce monde, que ce soit aux salarié⋅e·s ou aux consommateur⋅rice·s — est proprement fascinant venant d’un réseau social et d’un fabricant de sodas !

Mais je ne pense pas que nous ayons, en tant qu’humains, tant que ça besoin d’avoir un “but supérieur” grandiose dans ce que nous faisons. Nous avons besoin d’une culture d’entreprise axée sur la dignité et le respect des personnes. Vous devez sentir que votre travail a une réelle importance, qu’il est valorisé comme tel et que vous faites votre part, véritablement. Et on voit clairement que beaucoup de boîtes vendent l’inverse de ce qu’elles font : elles présentent un tableau impeccable sans même, en interne, se préoccuper de ces sujets fondamentaux.

Je pense que c’est ce qui motive en partie ce mouvement de “Grande démission” : ce fossé entre la belle rhétorique et la réalité. Les entreprises annoncent que ces valeurs gouverneront désormais leur activité. Mais est-ce que ces valeurs ruissellent vraiment sur votre quotidien quand vous bossez à la compta, ou est-ce qu’il n’est pas plus important, au final, d’avoir de bonnes relations avec vos collègues et de jouir d’une certaine dose de liberté ? C’est dans ce sens que parler de but supérieur ou de grandes valeurs peut s’avérer trompeur et nous éloigner des questions concrètes que nous devrions poser sur la culture d’une entreprise avant de signer.

L’autre problème que je vois dans le fait que les entreprises deviennent ainsi les dépositaires de ces valeurs est que ça ouvre la porte à certaines formes d’exploitation. Si le travail devient une sorte de réponse universelle qui incarne toutes nos valeurs, il est évident que nous allons nous donner à fond et bosser plus en étant payés moins.

Dans les années 1960, on prédisait la semaine de 10 heures pour les années 2020 — alors qu’on n’a jamais autant bossé. À mes yeux, c’est en grande partie l’héritage d’un modèle capitaliste faussement sur le déclin. Dit autrement, c’est presque pour moi une nouvelle manière de nous tromper en nous faisant croire et en se faisant croire à soi-même que si l’on gère tous les dossiers que l’univers met sur notre chemin, que l’on y met tout notre coeur, alors notre travail nous aimera en retour.

Mais la plupart du temps tu ne reçois rien de ton travail — il t’oublie dès que l’argent ne rentre plus suffisamment.

Cette tendance à la quête de sens concerne-t-elle uniquement la question de la vie professionnelle, ou y voyez-vous une impulsion générationnelle plus vaste ?

On peut déjà dire que, dans une certaine mesure, nos attentes concernant le travail ont avancé de pair avec nos aspirations amoureuses. Au XIXe siècle, le mariage était plutôt une nécessité, il fallait un⋅e partenaire pour travailler au champ, élever les enfants… Mais on faisait partie d’une sorte de communauté, on n’attendait donc pas de son mari ou de son épouse qu’il ou elle réponde tout à la fois à nos besoins spirituels, sexuels, affectifs et intellectuels.

Aujourd’hui, c’est comme si nous avions collectivement décidé qu’il revient à notre “moitié” de nourrir tous ces besoins. J’estime pour ma part qu’il s’agit d’attentes irréalistes. Et je dirais la même chose pour le travail. C’est le meilleur moyen de se prendre le mur de la déception.

L’un des leviers de cette transition opérée par les entreprises — pour employer justement un vocabulaire très corporate — est la nouvelle conception du leadership. Typiquement, on valorise de plus en plus des organisations où la hiérarchie aurait disparu… Pensez-vous que ce soit, comme on l’entend souvent, la réponse miracle à l’injustice au travail ?

Lorsque je parle d’éthique professionnelle et de leadership à mes étudiant⋅e·s de premier cycle, j’entends souvent que bientôt tout sera basé sur la crypto et l’OAD (organisation autonome décentralisée, NDLR), et que ces sujets seront donc caducs, en raison de l’émergence de ces nouveaux modèles d’organisation démocratiques. Personnellement, je n’en suis pas si certaine.

Le problème avec ces modèles holacratiques, hypertransparents — dans lesquels personne n’est aux commandes et tout est décentralisé — c’est qu’ils ont tendance à devenir toxiques. Pourquoi ? Parce qu’on pense à tort que les abus, le harcèlement, les manœuvres politiques et les dynamiques de pouvoir disparaissent juste parce qu’on décide que ça n’existe plus. Goldman Sachs vient par exemple d’annoncer l’instauration des congés illimités pour ses équipes. La nouvelle a été accueillie avec des hourras en mode “c’est la démocratisation du temps de loisir”. Mais, pour moi, cela ne change rien aux rouages sous-jacents, aux rapports de pouvoir, au jeu diplomatique ou politique au sein de l’entreprise.

« Je pense que nous avons reporté sur le secteur privé un gros morceau de notre colère et frustration à l’égard du politique. » - Alison Taylor, experte en éthique

Aux Etats-Unis où vous vivez et enseignez, on observe également un militantisme grandissant des salarié⋅e·s – notamment dans la tech et la restauration. Cet élan est-il lui aussi motivé par cette quête de sens ?

Il y a clairement un regain d’intérêt pour la notion de rapports de force dans l’entreprise. Le poids des syndicats américains demeure assez insignifiant, mais certains indicateurs montrent qu’ils ont remis le pied dans la porte. Pour revenir à mes étudiant⋅e·s, ils et elles s’avèrent bien plus pro-syndicats que ce à quoi on pourrait s’attendre dans une école de commerce. Quand j’étais jeune, des termes tels que “syndicat” ou “pouvoir des salarié⋅e·s” sonnaient vraiment gauchos et dépassés, mais là ça revient sur le devant de la scène.

Et cette relative inversion du rapport de force — le fait que les salarié⋅e·s ont bien plus de poids et d’influence dans la politique et le cap suivis par l’entreprise — est notamment due au fait que ces salarié⋅e·s sont en position de pouvoir faire fuiter des informations préjudiciables à la réputation de l’entreprise. L’exemple le plus fameux dernièrement est la lanceuse d’alerte de chez Facebook.

Je crois aussi que l’investissement croissant des salarié⋅e·s américain⋅e·s dans les actions militantes est à rapprocher d’une désillusion vis-à-vis de la politique, notamment chez les plus jeunes. Les gens se disent qu’ils ont le choix entre attendre quatre ans pour voter, en sachant que le système des grands électeurs noiera leur voix, ou faire pression sur leur direction pour changer la politique d’entreprise, ou encore boycotter une marque — et là ils savent que leur action aura plus de poids. Je pense que nous avons reporté sur le secteur privé un gros morceau de notre colère et frustration à l’égard du politique.

En parlant de politique, on assiste à un mouvement contradictoire. D’un côté, on cherche à démocratiser la vie au travail — que ce soit en Europe ou aux États-Unis, et de l’autre, la tendance semble être à l’autoritarisme, à un certain retour d’affection pour la figure “forte”.

C’est intéressant que vous évoquiez cette notion de figure forte, avec de l’autorité. Il y a certainement un lien à faire entre les périodes de pandémie, de disruption, de bouleversements et le fait que les populations se tournent vers une forme d’autoritarisme. Du côté des entreprises, je perçois un message ambivalent au sujet du leadership. Des études montrent par exemple que les descriptifs de poste ont radicalement changé en 15 ans : plutôt que de chercher quelqu’un qui aboiera les ordres venus d’en haut, les entreprises cherchent des leaders doués d’intelligence émotionnelle, en capacité de tisser un vrai réseau et de faire preuve d’empathie — tout ce qui pourrait, sur le papier, favoriser le leadership féminin.

« Nous avons toujours cette quête de la figure masculine forte, tout en recherchant cette sorte de réconfort paternaliste. » - Alison Taylor, experte en éthique

Mais parallèlement, on continue à vénérer des leaders comme Elon Musk. Vous connaissez sûrement l’expression : “si une entreprise était un être humain, ce serait un psychopathe”. Cependant, s’il est vrai que les leaders sociopathes se retrouvent plus souvent promus que les autres, j’ai le sentiment que nous avons remplacé la sociopathie par la schizophrénie. Je m’explique : on est à la recherche d’un éventail de qualités qui, tout simplement, ne peuvent exister chez une seule et même personne — nous avons toujours cette quête de la figure masculine forte, tout en recherchant cette sorte de réconfort paternaliste.

Nous avons beaucoup parlé des États-Unis jusqu’ici, mais vous qui venez du Royaume-Uni, pensez-vous que ces tendances, à savoir le fait de se focaliser sur les valeurs de l’entreprise et les nouvelles formes de leadership, soient exclusivement américaines ?

Je pense qu’on retrouve ce même élan autour de la diversité, de l’inclusion et de la responsabilité sociétale dans des pays comme le Royaume-Uni ou la France. Mais dans ces pays, la notion de classe demeure vivace, et c’est assez logique. Par exemple, beaucoup de gens avec qui je suis allée à la fac sont désormais à la tête du pays, de grands groupes médias ou de grosses boîtes — c’est un microcosme, une cabale qui regroupe des personnes issues d’un certain milieu.

Aux États-Unis en revanche, on ne parle pas de classes sociales. À l’échelle de la société, il y a plutôt cette idée que si tu bosses dur, tu peux y arriver. Et je dois avouer que je trouve l’économie américaine, de fait, plus dynamique, tout comme le système politique là-bas. J’ai eu bien plus d’opportunités outre-Atlantique que j’en aurais eu dans mon propre pays.

Ce dynamisme n’est pas que positif, cela dit. Les mythes – problématiques – de l’argent et la méritocratie vont de pair avec un certain manque de politiques purement sociales, avec un racisme systémique et une couverture de santé presque inexistante. Comme si les uns justifiaient les autres. Pour moi, le fait que l’assurance maladie dépende grosso modo du fait d’être en poste est totalement hallucinant.

On retrouve finalement cette idée derrière l’admiration de personnalités telles qu’Elon Musk. Un autre exemple : le PDG de Snapchat a récemment remboursé les emprunts étudiants des élèves d’une école de design à Los Angeles. Ici aux US, la démarche a été perçue très positivement. Mais moi je trouve ça déprimant qu’on doive compter sur la philanthropie de milliardaires. Certes, ces étudiant⋅e·s se sont retrouvé⋅e·s soulagé⋅e·s d’un poids financier important, mais quid des autres, ailleurs ? Sommes-nous censés nous en remettre à Bezos, Musk, Zuckerberg et compagnie pour pallier l’inaction des services sociaux et des politiques publiques ? C’est un vrai problème, et pas des moindres, parce que cela revient à laisser ces gens-là avoir une énorme influence dans des domaines clés comme l’éducation et la santé.

Pouvons-nous résumer en disant que vous voyez en partie d’un bon œil les évolutions actuelles, mais vous vous inquiétez du fait que nous placions notre confiance tout entière dans le secteur privé ?

« Les leaders n’ont plus la main sur la culture de la boîte et le discours qu’elle tient. » - Alison Taylor, experte en éthique

La question de l’image de marque est désormais centrale pour les entreprises. Et c’est une arme entre les mains des salarié⋅e·s. On observe un soulèvement, un mouvement qui part du bas pour toucher le haut : les travailleur⋅euse·s sont en train de trouver leur voix et de s’en servir pour ouvrir la porte à davantage de démocratie sur le lieu de travail. En d’autres termes, si l’entreprise ne se positionne pas comme il faut sur des questions telles que l’avortement, le port d’arme, l’immigration ou le changement climatique, on va le dénoncer ou faire fuiter des informations, comme des bombes à retardement pour faire pression sur elle. Et cette inversion du rapport de force — où les leaders n’ont plus la main sur la culture de la boîte et le discours qu’elle tient — est une vraie nouveauté depuis une dizaine d’années.

Il y a aussi d’autres évolutions majeures, comme la perspective de la semaine de quatre jours. L’expérience a été tentée dans divers pays — dont la Scandinavie, si je ne me trompe pas — et il semble que ça n’a pas d’impact négatif sur la productivité. Donc je le vois comme quelque chose de très positif.

Mais attention, il faut se rappeler qu’une entreprise du secteur privé reste une entreprise du secteur privé : commencer à croire qu’une boîte dont l’objectif est de faire du profit peut nous apporter un épanouissement spirituel et placer le travail au centre de notre vie, tout ça c’est s’autoriser à être un jour ou l’autre exploité⋅e.

Ce que je veux dire par là, c’est qu’il faut rester réaliste quant à ce que le secteur privé peut et ne peut pas. Encore une fois, parce que je pense qu’on a glissé, déplacé les choses de la sphère politique – qui dysfonctionne, crée de la colère et de la frustration – vers la sphère professionnelle.

Il y a quelques semaines, j’ai suivi l’intervention d’un invité dans le cadre d’un cursus sur le développement durable. Il a montré la vidéo de plein de jeunes de 19 ans qui partageaient leur inquiétude au sujet du racisme, du droit à l’avortement, du changement climatique — et leur inquiétude au sujet de leur propre avenir. Après ça, l’invité a enchaîné sur le fait que les jeunes avaient en réalité besoin d’un lien plus fort – un lien personnel plus fort, une connexion — avec des marques plus engagées.

Alors certes, les sujets qu’il a abordés sont tout à fait réels, et tout aussi sérieux, cependant je ne vois pas en quoi être “proche” d’une marque peut régler quoi ce soit de ces problèmes qui sont essentiellement d’ordre sociétal, social et politique ! Pour moi, c’est se cantonner à regarder ailleurs. C’est peut-être d’autant plus vrai pour les jeunes, qui pourraient croire que la responsabilité sociale des entreprises peut, d’une manière ou d’une autre, remplacer l’action politique.

Tout le monde semble dire que les entreprises doivent prendre la parole et se positionner sur tel ou tel sujet. Mais ça va changer quoi que Coca-Cola s’exprime en faveur du droit à l’avortement ? Ça ne va rien apporter de bon. Pire, on va se prendre un retour de bâton encore plus violent de la part des conservateurs et aggraver la polarisation qu’entraîne ce type de sujets. Je reviens donc à cette idée : nous ne pouvons pas nous appuyer sur le secteur privé — les entreprises ne sont pas là pour régler les problèmes politiques, en affichant et en promouvant des valeurs supposées, et nous apporter l’épanouissement spirituel auquel nous aspirons tous.

Je pense que ce dont nous avons réellement besoin, c’est un recalibrage de la relation entre le business et la politique. Et ça passe notamment par le fait de remettre le travail à sa place.

Article traduit par Sophie Lecoq et édité par Ana castelain ; photos : Thomas Decamps pour WTTJ

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