Managers : 6 conseils pour contrer l'hypersollicitation

08 févr. 2024

4min

Managers : 6 conseils pour contrer l'hypersollicitation
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Ingrid de Chevigny

Freelance Content Writer & Content Strategist pour start-ups B2B

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Submergés par un déluge d'informations et de demandes, beaucoup de managers subissent une pression constante. Alors quelles sont les solutions pour faire face au phénomène d’hypersollicitation ? Décryptage et conseils.

Des dizaines d’emails non lus dans votre boîte de réception, un agenda rempli de réunions, des messages Slack qui déferlent toutes les 20 secondes, des interruptions incessantes de la part de vos collègues d’open space… Cela vous parle ? Si oui, vous êtes sûrement victime d’hypersollicitation ! C’est un phénomène de plus en plus présent dans le monde du travail, et qui touche particulièrement les managers, avec toutes les conséquences qui vont avec en matière de santé mentale. Fort heureusement, des solutions existent.

Les racines de l’hypersollicitation : start-ups vs grands groupes

Olivier Meier, professeur en stratégie et management à l’Université Paris-Est, Paris Dauphine et Sciences Po Paris, et directeur de l’Observatoire ASAP (Action Sociétale Action Publique), observe que l’hypersollicitation est de nature différente selon la taille d’entreprise : « Dans les grands groupes, elle est souvent liée à une infinité de procédures, de règles et de process, tandis que dans les start-ups, elle est plutôt le fruit d’une activité effrénée et de fortes interactions humaines », explique-t-il. Selon lui, il existe même un effet pervers dans les start-ups : l’hypersollicitation peut en effet avoir une dimension valorisante.

« Dans la FrenchTech, on valorise une culture de l’hyper-réactivité », confirme l’expert du Lab Alexis Eve, psychologue de formation et fondateur de Yaniro, cabinet de coaching et de formation pour dirigeants et managers de start-ups. Mais cet aspect culturel n’est évidemment pas le seul facteur qui explique l’hypersollicitation : l’usage omniprésent d’outils technologiques comme Slack ou Teams, le manque fréquent d’autonomie des équipes, trop souvent constituées de profils juniors, ou encore l’exigence de forte polyvalence imposée aux managers, sont autant d’explications à ce phénomène.

L’hypersollicitation : fléau des temps modernes pour les managers ?

L’hypersollicitation est un facteur important de contre-performance : « Quand on croule sous les demandes, on peut avoir tendance à perdre en concentration et à se disperser », souligne Olivier Meier. Et quand les managers sont concernés, les effets sont d’autant plus néfastes. L’hypersollicitation peut en effet altérer leur capacité à prendre des décisions éclairées et la manière dont ils gèrent leurs équipes. Moins à l’écoute, les managers hypersollicités peuvent aller jusqu’à propager une culture de travail stressante ou toxique. De quoi affecter la motivation des collaborateurs, détériorer le climat social, et faire baisser la productivité.

Les préjudices de l’hypersollicitation sur l’organisation sont donc critiques, mais ce sont évidemment surtout les conséquences sur la santé mentale des managers qui inquiètent. L’hypersollicitation donne une sensation d’intensité dans le travail, qui peut générer du stress et de l’anxiété, jusqu’à mener au burn-out ou à la dépression. Alors que faire pour la contrer ?

Guide de survie pour managers ultra-sollicités

Conseil n°1 : prendre le temps de définir précisément ses objectifs

Pour éviter de vous sentir acculé par les demandes, la première étape est de vous fixer des objectifs extrêmement clairs. Vous devez savoir précisément ce que vous devez faire, et ce que vous ne devez PAS faire, pour filtrer les sollicitations avec efficacité. Pour Alexis Eve, l’idéal est de faire l’exercice sur deux horizons temporels :

  • des objectifs pour la semaine, pour avoir une vision court terme,
  • et des objectifs pour le trimestre, pour vous projeter dans le moyen terme.

« Une fois que vous avez pris le temps de fixer vos objectifs, par exemple avec la méthode OKR, c’est simple : toute demande qui ne rentre pas dedans, ça dégage ! », déclare-t-il.

Conseil n°2 : apprendre à dire non

Savoir dire non est une compétence essentielle à travailler si vous êtes un manager surchargé. Pour Alexis Eve, c’est même un « muscle à développer ». La clé de la réussite ? Toujours expliquer pourquoi vous dites non. Et pour les sollicitations qui proviennent de votre hiérarchie, qui peuvent être délicates à refuser, adoptez une approche de questionnement constructif : challengez la demande en pointant le fait que si vous y répondez dans l’immédiat, vous ne pourrez pas atteindre vos objectifs trimestriels. Quoi qu’il en soit, « il est crucial d’établir vos limites », pointe Olivier Meier, « car l’entreprise ne se charge plus de le faire pour ses salariés ».

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Conseil n°3 : se garantir des moments de travail sans interruption

Rien de mieux, pour avancer sur vos projets, que de vous planifier des sessions de « deep work », en vous isolant de toute sollicitation extérieure, afin de vous garantir une concentration totale. Pour cela, désactivez toutes vos notifications, mettez votre téléphone en mode avion, et isolez-vous. « Si vous travaillez en open space, mettez un casque anti-bruit pour vous créer une bulle et montrer clairement à vos voisins que vous ne voulez pas être dérangé », conseille Alexis Eve. Pensez aussi à indiquer ces plages horaires dans votre agenda, pour prévenir votre équipe que vous ne serez pas disponible.

Conseil n°4 : faire gagner en autonomie à ses équipes

Le Graal de tout manager débordé, c’est évidemment d’avoir une équipe qui n’a besoin que de peu de supervision. « Je vois beaucoup de managers qui ont tendance à cocooner leurs équipes, et cela se retourne contre eux », affirme Alexis Eve. Pour lui, il faut sur-expliquer ses attentes dès l’onboarding, voire même dès le recrutement, en posant des jalons concrets : « Vous accueillez un collaborateur junior qui doit envoyer des emails à des personnes extérieures à votre entreprise ? Expliquez-lui par exemple que vous êtes disponible pour relire ses messages la première semaine, puis que vous pouvez être mis dans la boucle des échanges les deux premiers mois, mais qu’il doit ensuite être en autonomie totale à partir du troisième mois ».

Conseil n°5 : faire des (vraies) pauses

Face à l’hypersollicitation, il est essentiel de vous ménager des moments de régénération. Une vraie pause permet en effet de relâcher la pression pour retrouver ensuite une bonne capacité d’attention. « En télétravail, il est conseillé de ne pas utiliser les pauses pour faire systématiquement des courses ou des tâches ménagères. Ces moments doivent être dédiés à la détente et au repos, et non à d’autres formes de sollicitation », insiste Olivier Meier. « Il est essentiel de s’accorder du temps pour se ressourcer et prendre du recul. Vous pourrez ainsi reprendre vos activités professionnelles avec une énergie renouvelée et une efficacité accrue ! », ajoute-t-il. Sortir marcher quelques minutes, ou faire une courte sieste peuvent vous aider à contrer les effets destructeurs de l’hypersollicitation.

Conseil n°6 : savoir tirer la sonnette d’alarme

Si malgré tous ces conseils, vous n’arrivez pas à réduire votre sensation d’hypersollicitation, c’est peut-être que le problème est systémique, et que des mesures doivent être prises au niveau de votre entreprise. Dans ce cas, osez soulever le problème avec votre hiérarchie ou votre équipe RH. « Votre hypersollicitation peut venir d’un manque de process », pointe par exemple Alexis Eve. Dans ce cas, ne restez pas seul et faites-vous aider. Vous pourriez notamment proposer des initiatives telles qu’une « journée sans email », comme le suggère Olivier Meier : « Cela peut être un bon moyen de redécouvrir les bienfaits des interactions physiques, tout en limitant les demandes intempestives ». Et oui, car reconnaissons-le, si on ose facilement déranger quelqu’un par email ou sur Slack, on hésite davantage à l’idée de décrocher son téléphone ou de se déplacer en personne !


Article édité par Ariane Picoche, photo : Thomas Decamps pour WTTJ