Industries du futur : comment se préparer à des métiers qui n’existent pas ?

24 nov. 2021

6min

Industries du futur : comment se préparer à des métiers qui n’existent pas ?
auteur.e
Florence Abitbol

Journaliste indépendante et rédactrice de contenus

« Qu’est-ce que tu veux faire plus tard ? » De tout temps, la question a crispé ses destinataires, et plus encore aujourd’hui quand, en tant qu’étudiant, on ne sait pas de quoi le futur sera fait. Product manager, designer UX ou data scientist… est-ce que dans 10 ans, ces “nouveaux” métiers auront toujours la cote ? Comme personne ne vous demande d’être madame Irma, voici quelques pistes pour aborder les métiers et les postes de l’industrie du futur, et mieux vous y préparer dès aujourd’hui.

Des professions de vos aïeux, il ne reste souvent plus grand chose aujourd’hui - tout comme aucun d’entre eux/elles n’aurait pu prévoir le besoin croissant de community managers et autres web designers. Mettre en mots les métiers du futur relève sans doute du don de voyance, surtout lorsque le monde évolue à cadence rapide. Dans le secteur de l’industrie par exemple, ces changements s’opèrent à (très) grande vitesse. Du domaine de l’ingénierie à l’informatique, les produits sont notamment bouleversés par la digitalisation - et le paysage promet de changer radicalement dans les années à venir. Alors, comment faire pour se projeter dans les métiers du futur, de la production des biens aux nouveaux services, quand l’avenir est encore incertain ?

1. Avoir des envies bien précises

Sur le papier, cela peut sembler paradoxal, mais le meilleur moyen de se faire une place dans les métiers du futur, c’est encore de remettre un peu de concret dans ce flou artistique qu’est l’avenir. « En informatique, nous avons des profils très variés, mais ce qui définit les étudiants dans cette spécialité, c’est qu’ils arrivent souvent avec des projets très ancrés, voire extrêmement aboutis », explique Morgan Saveuse, directeur des études CESI, école d’ingénieurs. Des idées qui vont se peaufiner tout au long de leurs études et de leurs stages ou alternances. Cette envie de concret est indissociable pour explorer les potentialités du futur et mieux les challenger : «Pour l’industrie du futur, il faut avoir une envie définie, avec des objectifs très précis, pour arriver - seul ou en équipe - à un produit ou un objet qui répondra à des problématiques tout aussi concrètes », insiste François Xavier de Thieulloy, expert en Industrie du futur chez Bpifrance.

2. Rester curieux…

Si les technologies d’aujourd’hui ont encore quelques beaux jours devant elles, il n’empêche que leur temps est compté. Logiciel de pointe ou simple matériel du quotidien (pensez au temps pas si lointain des écouteurs avec fil), aucune innovation n’est à l’abri d’un successeur qui viendra bouleverser votre champ de compétence et vos habitudes de travail. Pour rester endurant dans la course, rien de mieux que ce que l’on appelle le long life learning, ou apprentissage sur le long terme. « L’essentiel est de développer une curiosité sur le long terme et d’aller dans le sens d’une formation continue », explique François Xavier de Thieulloy, « autrement dit, il faut apprendre à apprendre : aujourd’hui c’est par exemple Python (langage de programmation multiplateforme) qui est plébiscité, mais demain, il faudra passer à autre chose. » En d’autres termes, maîtriser ses outils de travail, c’est bien, mais être attentif aux nouveaux usages est essentiel pour préparer le travail demain.

3. … Et savoir regarder en arrière

Pour préparer l’avenir, il faut aussi savoir regarder en arrière : les innovations ne surgissent pas du néant, et il est très probable que les technologies de demain s’appuient sur des outils du présent, voire du passé. Enseignant, chercheur et cofondateur de l’agence Near Future Laboratory, Nicolas Nova s’intéresse aux objets technologiques et aux enjeux culturels entre personnes et objets. Avec ses associés, il explore les usages du futur à travers des projets de design fiction, une forme très concrète de prospective qui consiste à créer des objets fictifs, venus d’un hypothétique futur pour mieux en débattre. Un moyen aussi d’évaluer les potentialités à travers les outils fournis par les sciences sociales, l’anthropologie en tête : « Il faut remettre en question l’idée qu’un domaine ou un champ d’expertise émerge sans précédent », explique Nicolas. Dans la perspective des innovations technologiques comme dans celle de la recherche universitaire, les savoirs du futur se construisent aussi avec les connaissances passées et présentes.

« Souvent, tout part d’un raisonnement analogique avec d’autres domaines ou d’autres situations qui peuvent être proches, ou appliqués à d’autres objets. Il faut faire ce travail d’adaptation et de transposition pour faire émerger ce nouveau champ de connaissance à la lumière de ce que l’on connaît déjà. » Passionné depuis sa prime jeunesse par les objets technologiques et leurs usages, Nicolas a pu observer l’explosion du numérique dans les années 80. Sa curiosité initiale s’est muée en parcours professionnel et universitaire, avec une trajectoire double, entre informatique et science sociale lorsque les enjeux entre les cultures du numérique et le champ académique de l’anthropologie lui sont apparus.

À l’instar de Nicolas, rien de mieux que de cultiver vos intérêts personnels, qu’ils soient datés ou non, pour nourrir votre potentielle expertise d’un domaine du futur. À la croisée des expériences et des différentes étapes de votre parcours d’étude et professionnel, ils peuvent révéler de nouveaux enjeux autant théoriques que pratiques, et qui sait, ouvrir de nouvelles perspectives sur l’avenir.

4. Connaître vos valeurs

Impossible d’ignorer le tournant RSE pris par la plupart des entreprises. Celles-ci ont bien compris que le travail du futur avait intérêt à avoir du sens (pour vous) en évitant de tourner à vide (pour le bien de la planète), et misent de plus en plus sur les jobs à impact. Ces métiers ayant un sens et/ou un effet positif sur la société sont désormais plébiscités, car ils parlent autant aux collaborateurs des entreprises qu’aux prochains travailleurs. « Parmi nos étudiants, on voit bien cette envie d’avoir un métier avec du sens, et tourné vers les autres », souligne Morgane Saveuse, tandis que pour Nicolas Nova, la donne a déjà commencé à changer du côté des consommateurs. « On a vu un changement au niveau des demandes. Au départ, nous étions très sollicités pour des technologies technocentrées comme l’intelligence artificielle ou la voiture automatique. Avec le temps, la dimension environnementale est apparue. La question des technofuturs penche un peu moins du côté des technologies et tient plus compte d’une forme de sobriété. » Au-delà des compétences et de la simple reconnaissance personnelle, il sera sans doute nécessaire de faire coexister votre travail et les valeurs dans lesquelles vous vous reconnaissez sur le long terme, qu’il s’agisse de préserver et construire le monde de demain ou faciliter la vie d’autrui. Le bon job d’avenir sera celui qui collera à vos convictions - qui ne risquent pas de beaucoup bouger avec les années.

5. Peaufinez vos soft skills comme jamais

À ce stade, vous avez sans doute compris que la souplesse est de rigueur pour les métiers de demain. Les compétences techniques spécialisées (ou hard skills dans le jargon) risquent de bouger tout au long de votre carrière. Pour compenser, mettez donc l’accent sur les soft skills : travail en équipe, capacité à communiquer, écoute, pédagogie, esprit critique et remise en question de soi… Autant de méthodes et qualités pleinement intégrées par les écoles, comme celles dirigées par Morgane Saveuse, qui veulent former les ingénieurs de demain. « Dans les industries du futurs, les collaborateurs ne vont plus être sur des jobs physiques, en revanche, le travail sera beaucoup plus qualifié, plus spécifique et intellectuel. Par conséquent, le relationnel va prendre plus de place dans les tâches quotidiennes. Une sensibilité au soft est donc indispensable », appuie François Xavier de Thieulloy. Toutes ces petites choses qui ne sont pas toujours explicitement inscrites sur une fiche de poste, mais qui seront indispensables partout, tout le temps, même demain. Surtout demain. Last but not least, on n’oublie pas de travailler son anglais, indispensable selon tous nos interlocuteurs !

6. Gardez un œil sur ces secteurs qui ont beaucoup bougé

Enfin, rien de mieux que d’observer les changements opérés dans divers secteurs industriels. En tête, « l’automobile, avec une énorme bascule vers la mobilité décarbonée, l’arrêt du diesel en 5 ans… donc de très gros enjeux de repositionnement de marché pour la plupart des acteurs », explique François-Xavier de Thieulloy. Et les autres acteurs des transports promettent aussi de suivre la même voie : « L’aéronautique a également ce type d’enjeux, mais à un horizon nettement plus lointain, 10 ou 20 ans de plus, avec des technologies très avant-gardistes comme l’hydrogène. » Autre secteur prompt aux changements, le textile, « grâce à un fort retour du made in France, qui a joué un rôle dans la création récente sur le territoire français de deux usines de chaussures de sport : ASF 4.0 par la société Chamatex et Demgy, mais aussi des innovations tech plus classiques comme avec Tekyn, qui certifie la valeur du textile à l’aide de technologie, ou le tricotage 3D de 3D Tex. » Autant de domaines de l’industrie à surveiller de près, mieux anticiper leurs prochaines évolutions.


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Cet article a été réalisé en partenariat avec la French Fab. Transition écologique, industrie du futur, innovation, RSE… Retrouvez ici l’étendard des industriels français réunis sous sa bannière. Qui sait, vous y trouverez peut-être votre futur boulot ?

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Article édité par Paulina Paulina Jonquères d’Oriola, photo WTTJ

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