Entre doutes et ambition : rencontre avec Lisa Scarpa, manager à 24 ans

27 janv. 2020

6min

Entre doutes et ambition : rencontre avec Lisa Scarpa, manager à 24 ans
auteur.e.s
Thomas Decamps

Photographe chez Welcome to the Jungle

Née à Paris de parents italiens et partie vivre aux Etats-Unis à l’âge de deux ans, l’enfance de Lisa Scarpa n’est pas banale. Son parcours professionnel non plus. À tout juste 24 ans, elle occupe un poste de manager chez Meero.

Seulement deux ans après avoir commencé à travailler en entreprise, elle encadre aujourd’hui une équipe commerciale au portefeuille international composée de 5 personnes. Des responsabilités exceptionnelles pour quelqu’un d’aussi jeune et qui s’accompagnent forcément de défis à relever. Lisa nous raconte son parcours, sa vision du métier de manager et les doutes qu’elle a pu avoir à ses débuts. Rencontre.

Salut ! Est-ce que tu pourrais nous raconter rapidement ton parcours ?

J’ai grandi en Floride avec mes parents qui y avaient créé une entreprise et réussi à obtenir un visa investisseur. C’est un visa qui permet à toute la famille de vivre sur le sol américain jusqu’à la majorité des enfants. Depuis toute petite, je savais donc qu’à ma majorité il me faudrait rentrer en Europe et je me rends compte que cela a beaucoup influencé mon parcours et mes rêves. À 18 ans, j’ai donc pris la décision de rentrer en France pour étudier à l’American Business School à Paris. J’ai choisi cette école car je ne me sentais pas à l’aise à l’idée de suivre des cours en Français - même si je parle la langue couramment - et je souhaitais absolument faire un parcours international.

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Plus jeune, tu voulais faire quoi comme métier ?

Quand j’étais petite, j’ai eu plusieurs phases : médecin, institutrice puis caissière à un moment. Je ne sais pas vraiment pourquoi, peut-être le fait de scanner des choses et d’être en contact avec des gens toute la journée. C’est d’ailleurs un métier que j’ai fait plus jeune. J’ai commencé à travailler à 14 ans dans une boutique car aux États-Unis, tu peux commencer à travailler très tôt. Ensuite je me suis intéressée à la psychologie, je voulais étudier et comprendre pourquoi les gens agissent comme ils le font. Mais je n’ai jamais été passionnée que par une seule chose, j’ai toujours voulu expérimenter beaucoup de choses, en étant toujours à fond comme le sont mes parents. Leur parcours d’entrepreneurs a toujours été un vrai exemple pour moi !

Je n’ai jamais été passionnée que par une seule chose, j’ai toujours voulu expérimenter beaucoup de choses, en étant toujours à fond comme le sont mes parents.

Comment t’es-tu retrouvée au poste que tu occupes aujourd’hui ?

Pendant mon année de Master 1, en 2018, j’ai rejoint Meero pour un stage de 6 mois en marketing. À cette époque, c’était vraiment l’esprit start-up : la boîte avait deux ans, on était une cinquantaine et on partageait beaucoup de choses ensemble. Je me suis sentie très vite intégrée. Après ces six mois de stage, j’avais très envie de rester et l’entreprise voulait me garder, ce qui était parfait. Sauf que je savais que je ne voulais pas continuer en marketing. On a donc réfléchi ensemble au poste qui pourrait me correspondre le mieux et j’ai eu l’opportunité de m’essayer en tant que commerciale pendant une semaine. J’ai adoré et, malgré mon manque d’expérience, ils m’ont donné ma chance : un CDI en tant que key account manager. Cette manière de faire m’a convaincue de rester.

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Après 6 mois, ton poste évolue encore et tu deviens manager, comment as tu géré tous ces changements ?

Tout est effectivement allé très vite ! L’entreprise était en pleine croissance, on avait triplé de volume, j’avais atteint mes objectifs et, une nouvelle fois, on m’a fait confiance. Mon nouveau challenge : accepter un poste de team lead et prendre la responsabilité d’une équipe de cinq personnes. Je me suis toujours considérée comme une éponge, j’ai soif d’apprendre. J’ai donc vu ça comme un nouveau défi à relever !
Aujourd’hui, je gère depuis Paris toute la région Europe du Nord avec les cinq commerciaux de mon équipe, également basés à Paris. Je voyage beaucoup pour aller à la rencontre de mes comptes clés ou accompagner mes équipes lors de leurs rendez-vous clients.

Je me suis toujours considérée comme une éponge, j’ai soif d’apprendre. Je donc vu ça comme un nouveau défi à relever !

Qu’as-tu ressenti quand on t’a proposé ce nouveau poste?

J’étais d’abord été fière car je savais que je le méritais. Je ne me suis pas posé de questions, j’ai tout de suite accepté. Mais très vite, dès la première semaine, les doutes sont arrivés. J’ai alors pris conscience que j’avais dit « oui » à quelque chose que je ne connaissais pas du tout : le management. Je me souviens avoir eu terriblement peur car je ne savais pas si j’étais prête, à mon âge, pour autant de responsabilités. Je me suis rendue compte que je n’avais pas du tout confiance en moi mais j’ai vu que mon équipe me soutenait alors j’ai décidé de m’accrocher.

Je ne savais pas si j’étais prête pour autant de responsabilités. Je me suis rendue compte que je n’avais pas du tout confiance en moi mais j’ai vu que mon équipe me soutenait…

Quelles ont été les difficultés liées à cette prise de responsabilités ?

Les responsabilités, justement (rires). Être manager, c’est un tout autre challenge. On m’a toujours laissé beaucoup de liberté dans mon travail, et aujourd’hui je dois réussir à encadrer mon équipe tout en leur laissant cette même liberté. L’équilibre n’est pas toujours facile à trouver. C’est parfois compliqué mais j’aimerais arriver à faire confiance à mes équipes comme on a eu confiance en moi à mes débuts.

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> J’aimerais arriver à faire confiance à mes équipes comme on a eu confiance en moi à mes débuts.

Gardes-tu un souvenir marquant de tes premières semaines ?

Oui, un souvenir très marquant et difficile à vivre même. Car, dès ma 2ème semaine, j’ai dû me séparer d’une personne de mon équipe. J’avais réussi à convaincre mes managers de lui laisser une dernière chance car je pensais que je pourrais changer les choses, mais cela n’a pas fonctionné. Ça a été très compliqué à gérer et j’ai d’ailleurs demandé des conseils autour de moi pour pouvoir gérer au mieux cette situation.

Comment gères-tu le fait d’être une très jeune manager, d’à peine 24 ans ?

Je ne me considère pas comme une manager car je ne gère pas les comptes des personnes que je dirige, ni même leur temps. Au contraire, j’essaie de leur laisser beaucoup de liberté. Je dirais que je suis plutôt un leader ; c’est d’ailleurs mon intitulé de poste : team leader. Je me définis davantage comme une sorte de coach dont la mission est de faire en sorte que son équipe atteigne les meilleurs résultats.

Concernant mon âge, c’est vrai que ce n’est pas évident quand la majorité de mon équipe a le même âge que moi et que certains sont plus âgés. Même si pour moi, l’âge ne doit pas avoir d’importance, je le ressens quand même au quotidien : souvent j’ai l’impression qu’on me voit davantage comme une collègue que comme une team lead. Je suis de nature très directe, mais je dis ce que je veux quand je le pense, peu importe le fait d’être jeune ou d’être une femme. La clé, c’est de faire en sorte que mon expérience, bien que courte, prévale toujours sur le reste. Ce n’est pas facile tous les jours car j’apprends à devenir manager en manageant mon équipe mais c’est une expérience incroyablement enrichissante.

Je dis ce que je veux quand je le pense, peu importe le fait d’être jeune ou d’être une femme. La clé, c’est de faire en sorte que mon expérience, bien que courte, prévale toujours sur le reste.

Comment y parviens-tu au quotidien ?

Le challenge c’est de réussir à atteindre mes objectifs tout en faisant en sorte que les membres de mon équipe atteignent les leurs. Mon secret pour y arriver, c’est de toujours rester positive. On évolue dans un environnement économique qui change en permanence, il s’agit d’apprendre à mes équipes qu’on ne peut pas tout contrôler et que, peu importe le temps que cela prendra, on réussira à signer tel client ou tel contrat si on garde notre optimisme et notre esprit d’équipe. Garder cette cohésion et cette motivation avec le sourire, telle est ma mission.

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Quelle est ta plus grande réussite en tant que manager ?

On vient de vivre une levée de fond difficile avec des objectifs très élevés qui nous a obligé à travailler beaucoup et parfois assez tard. Ma réussite, ça a été de garder mes équipes motivées malgré ce rythme plus dense et surtout de les associer ensuite à ce joli succès collectif.

Qu’est-ce qui t’inspire au quotidien?

J’aime écouter, apprendre et me nourrir de ceux qui m’entourent. D’ailleurs, je pense que les gens qui doivent t’inspirer dans ton job, ce sont les personnes avec qui tu travailles en direct. Notre CEO est un vrai exemple pour moi. J’ai la chance d’avoir un boss presque aussi jeune que moi et c’est hyper inspirant. À à peine 32 ans, il a réussi à inspirer des centaines de personnes et faire en sorte qu’elles croient en son projet. Le partage, c’est la clé pour embarquer les gens dans l’aventure. Mon rêve, ce serait de créer ma propre boite et d’avoir le même succès.

Je pense que les gens qui doivent t’inspirer dans ton job, ce sont les personnes avec qui tu travailles en direct.

Justement, quel est ton rêve aujourd’hui ?

Je suis trop jeune pour y penser. Pour l’instant, je me construis un peu tous les jours, je me concentre sur l’instant présent. Je suis quelqu’un de très réaliste, je ne pense pas à long terme. Aujourd’hui, je suis épanouie, j’ai un job qui me passionne et des collègues autour de moi qui m’aident à grandir et me donnent confiance en moi. Le reste, on verra plus tard. Mais je pense souvent à mes parents qui ont réussi à partir de rien et j’aimerais pouvoir un jour leur rendre ce qu’ils m’ont donné, qu’ils soient fiers de moi, tout simplement.

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Photo d’illustration by WTTJ

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