6 compromis inévitables à envisager au cours de sa carrière

24 nov. 2022 - mis à jour le 24 nov. 2022

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6 compromis inévitables à envisager au cours de sa carrière
auteur.e
Gabrielle de Loynes

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Vous avez cru au Père Noël, à la petite souris, au prince charmant et, aussi – avouez-le – au job parfait. Pourtant, il faut vous rendre à l’évidence : tout cela relève du conte de fées. « 35 heures, 150k de salaire, 0 contrainte », ça n’existe pas. En amour, comme au travail, il faut faire des concessions. « Choisir c’est renoncer » certes, mais ce n’est pas trancher violemment au prix de douloureux sacrifices ! Pour aborder sereinement ces décisions et trouver le job qui vous convient, notre experte Roseline Laloupe démêle le vrai du faux sur les concessions à mener au cours d’une vie pro…

Les responsabilités ou une vie privée

Sac siglé et stilettos. Costard fin et pull cachemire. Coffee, sushis, taxi et compagnie… La vie de working-girl ou de business man vous fait envie ? Alors considérez toute la panoplie : soirée, weekend et congés à bosser. Nous avons vite fait de fantasmer le job des autres. Pourtant, il n’y a pas de secret, on parvient difficilement au sommet sans travailler d’arrache-pied. Julie l’a compris, cette médecin a préféré le parcours généraliste plutôt qu’une spécialité prestigieuse : « Je savais qu’ainsi j’aurais la possibilité d’arranger mon emploi du temps pour profiter de ma famille. J’ai privilégié mon équilibre de vie sur tout ce que cette spécialité aurait pu m’apporter intellectuellement et financièrement. Ce choix n’était pas évident, mais je n’ai aucun regret aujourd’hui. »

Selon Roseline Laloupe, « il n’est pas possible de se donner à 100% dans ces deux sphères, la répartition doit être plus réaliste. L’important est de trouver l’équilibre qui nous convient. Par exemple, 70% pro et 30% perso, ou l’inverse… Il faut se poser la question : qu’est-ce que je veux ? Quels sont mes besoins et mes priorités ? » Certes, avec les nouvelles technologies, le recours au télétravail ou l’apparition de modèles comme la semaine de quatre jours, « il est possible d’avoir un meilleur équilibre de vie », remarque l’experte. Néanmoins, tôt ou tard, il y a toujours des concessions à faire : « Chacun doit trouver le curseur qui lui convient. »

Le temps ou l’argent

« Travailler plus pour gagner plus », disent-ils. Et pour cause, il y a un lien indéfectible entre le temps passé à travailler et la rémunération à la clé. C’est d’ailleurs ce qui fait la spécificité des salariés « passés cadres » : mieux payés, ils ne comptent plus leurs heures de travail. On observe que ces deux valeurs ont tendance à s’opposer : le temps et l’argent. L’une permet d’économiser l’autre et réciproquement. Mais, il est bien rare de disposer des deux.

« À moins de gagner au loto, s’amuse Roseline Laloupe, cumuler le temps et l’argent est compliqué. Pour autant, une autre manière d’aborder cette concession consiste à séquencer sa vie professionnelle. On peut ainsi travailler plus intensément entre 25 et 45 ans, puis réduire son temps de travail pour disposer de plus de temps libre. » C’est ainsi qu’elle a pu observer des professionnels opter pour des postes moins opérationnels à 40 ans, tels que conseiller ou conférencier, pour profiter davantage de cette seconde partie de leur existence. « Ce sont deux parcours en un », résume-t-elle. Une autre approche dite « frugaliste », consiste à travailler moins, pour gagner moins et vivre mieux. Peu importe l’approche, « quel que soit notre rapport au temps, ou à l’argent, conclut l’experte, l’arbitrage est propre à chacun. »

La sécurité ou l’indépendance

Ici encore, on ne peut pas courir tous les lièvres à la fois. Il est difficile de concilier la sécurité, le confort et la protection du salarié, avec la liberté et la flexibilité du travailleur indépendant. Le plus souvent, le travail nous offre l’un ou l’autre. Les deux font rarement bon ménage. Pour certains, travailler c’est entreprendre, prendre des risques et saisir des opportunités. Pour d’autres, le travail doit assurer stabilité et sécurité. Antoine le sait, il ne pourra pas jouir des attributs d’un salarié. « Je suis de nature à entreprendre, avoue-t-il. Quand je me suis mis à mon compte, j’ai dû faire des concessions. Adieu les tickets resto, la voiture de fonction, les congés à foison et la protection sociale… J’ai eu du mal à l’accepter, à voir les autres bénéficier d’un confort auquel je ne pouvais pas accéder. Mais entreprendre, c’est vital pour moi. Ma liberté et mon indépendance, ça n’a pas de prix ! ».

Liberté ou sécurité, il faut choisir. « Le choix se fait selon sa propre personnalité et, parfois, selon la génération à laquelle on appartient, analyse Roseline Laloupe. Aujourd’hui, le modèle de l’entrepreneur est très valorisé. Pour autant, influenceur, créateur, freelance, cela ne convient pas à tous les profils. Il faut avant tout apprendre à se connaître pour savoir si ce type de job est fait pour nous car, salarié ou indépendant sont deux états d’esprit très différents. On peut penser avoir une attirance pour l’indépendance, mais est-elle suffisante pour s’engager dans cette voie ? »

L’aventure pro ou le 9h-17h au bureau

S’envoler pour New-York ou Singapour, prendre un train pour Londres ou Bruxelles, dormir à l’hôtel et voyager en première. Certains jobs impliquent de fréquents déplacements. Un mode de vie palpitant, mais qui ne convient pas à tout le monde. Partir en voyage d’affaires est une aventure qui bouscule le quotidien et nécessite de réorganiser sa vie personnelle. On ne devient pas pilote, reporter de guerre ou sous-marinier sans compromis pour soi et son entourage…

« En amour comme au travail, c’est la même chose, observe Roseline Laloupe. On ne peut pas épouser un sous-marinier et lui reprocher d’être trop longtemps absent. Le choix du travail est lui aussi engageant. Il faut envisager clairement ce choix de vie avant de s’engager. Un job qui implique des déplacements est nécessairement un engagement qui comporte un risque de frustrations. » Pour éviter une situation douloureuse, l’experte recommande de s’interroger sur le cadre et l’environnement de travail. Est-ce que cet environnement et ce rythme de travail me correspondent ? « Comme les périodes d’absence sont inhérentes à la vie de sous-marinier, l’entreprise à sa culture propre, observe-t-elle. C’est au collaborateur de s’adapter et d’accepter la réalité de son métier. C’est pourquoi, j’incite toujours à se renseigner au préalable et à tester un métier avant de signer. »

Les feux de la rampe ou agir dans l’ombre

Vous souhaitez épouser une carrière professionnelle ‘’shining’’ ? Briller au Co-Dir ou en management ? Mais ce job est-il vraiment fait pour vous ? Qui dit ascension professionnelle, dit responsabilités et exposition augmentée au stress. Êtes-vous prêt à diriger une équipe, prendre des décisions ? Acceptez-vous d’endosser la responsabilité en cas d’échec ? Ou bien avez-vous besoin de couper après une journée de travail et partir l’esprit libre ? Pour certains, le bonheur réside dans la gloire. D’autres lui préfèrent le dicton « Pour vivre heureux, vivons cachés ».
« En France, on a tendance à encourager les cadres à devenir manager, observe Roseline Laloupe. Comme si le management était ‘’la voie royale’’ de toute carrière professionnelle. Mais c’est faux ! On peut parfaitement avoir une carrière riche sans être manager. » Tout le monde n’est pas fait pour prendre la lumière et endosser ces responsabilités. « Qu’il s’agisse du journaliste de l’ombre ou du chroniqueur radio, tous endossent du stress et des responsabilités au travail, explique l’experte. Mais chaque rôle bénéficie d’une exposition différente. Selon les soft skills dont on dispose, l’un ou l’autre nous correspond davantage. »

L’esprit start-up ou grand groupe

Le cadre dans lequel on décide d’installer sa relation de travail a, lui aussi, toute son importance. Comme un couple choisit d’emménager en ville ou à la campagne, il est possible de travailler dans un environnement différent. Le grand groupe est souvent comparé à un « paquebot ». Grosse machine, il assure le confort et la stabilité en tout temps. Cependant, la manœuvre est complexe et seul le commandant est aux manettes. La petite entreprise est plus fragile, mais aussi plus agile. Moins nombreux à bord, elle permet à ses équipiers d’être plus autonomes et responsables.

« Deux univers s’opposent, confirme la spécialiste. D’un côté, de lourds processus de décision, de la réflexion en réunion, une solide structure. De l’autre, l’action et le mouvement, l’absence de hiérarchie et l’autonomie. À chacun de trouver le cadre qui lui va bien. » Pour mieux appréhender ce dilemme, Roseline Laloupe, conseille de « tester les deux en début de carrière, afin de savoir le cadre qui est fait pour soi ». Certes, il est possible de passer d’un monde à l’autre. « Mais à un moment donné il faut faire un choix, insiste-t-elle. En pratique, on observe que le passage du grand groupe à la start-up est souvent plus valorisé que l’inverse. Dans un sens, il est jugé plus clinquant, plus glorieux. Dans l’autre, le retour au grand groupe est assimilé à une ‘’bonne planque’’, ‘’un job pépère’’. »

Vous pensiez avoir trouvé le job de vos rêves ? Celui qui cochait tous vos critères ? Mais un jour, vous réalisez que ce job à l’allure idéale renferme des défauts. Pour autant, ces zones d’ombres sont-elles de petites concessions acceptables ou de douloureux compromis ? « Vous êtes seul capable de répondre à cette question », assure Roseline Laloupe. Lorsque vous faites face à cette sensation de tiraillement, il n’y a qu’une solution : « Faites une pause et prenez du recul, conseille l’experte. Observez-vous : que dit votre corps ? Avez-vous la boule au ventre dans certaines situations ? Effectuez un travail d’introspection : mes valeurs et mes besoins sont-ils satisfaits ? Enfin, testez votre intuition en vous consacrant à un projet concret qui vous tient à cœur (formation, side project…) Ne vous laissez pas influencer par votre entourage, la réponse est en vous. »

Article édité par Mélissa Darré, photo par Thomas Decamps.

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