« J’ai passé un entretien d’embauche hybride et c’était l'enfer ! »

15 juil. 2021

3min

« J’ai passé un entretien d’embauche hybride et c’était l'enfer ! »
auteur.e
Coline de Silans

Journaliste indépendante

Avec la démocratisation du télétravail, les processus de recrutement ont progressivement dû être adaptés au distanciel. Là où il semblait évident de se rendre dans les locaux de l’entreprise pour rencontrer un recruteur il y a deux ans à peine, aujourd’hui, certains entretiens se font à distance, voire proposent un mix présentiel/distanciel. C’est justement ce qui est arrivé à Arthur, qui a passé un entretien face à une personne en chair et en os, mais aussi avec deux autres connectées en visio. Il nous raconte ce qui reste probablement comme l’un des pires moments de sa vie professionnelle.

Un mauvais départ

Je suis ingénieur. Quand je postule dans cette entreprise, cela fait trois mois que je suis au chômage. Je veux trouver un job avec plus de sens, et les enjeux liés à l’environnement m’intéressent beaucoup. Un jour, je vois passer une offre sur LinkedIn pour un poste de chef de service dans un établissement public administratif, dans le domaine du développement durable. Je postule. Une semaine plus tard, je reçois la réponse d’une assistante qui me « convoque » à un jury de recrutement. Le terme « convocation » me choque un peu puisqu’il implique tout de suite un rapport de domination. D’ailleurs, on ne me demande pas si je suis disponible à ce moment-là : je suis simplement « convoqué », tel jour à telle heure. Malgré tout, le côté « jury » ne m’étonne pas plus que ça, c’est assez fréquent dans le public. Généralement, on se retrouve face à deux ou trois personnes, et non à parler avec un seul interlocuteur, comme c’est souvent le cas dans le privé.

On m’informe par mail que trois personnes seront présentes à l’entretien, ma future cheffe, la directrice des ressources humaines, et une autre personne, issue d’une autre agence du groupe. Le jour J, j’arrive dans les locaux m’attendant à me retrouver face à trois personnes. Or, quand j’entre dans la pièce, seule ma ”future” cheffe est présente. Elle me demande de m’asseoir face à elle, son petit ordinateur portable calé entre nous. Très vite, je réalise qu’à gauche de la table, sur un écran de rétroprojecteur, se trouvent les deux autres recruteuses, en visio. Je ne les avais même pas vues en entrant !

Ne plus savoir où donner de la tête

Me voilà donc obligé de m’adresser à une personne physiquement présente, face à moi, et à deux autres, en visio sur ma gauche. Je ne sais pas où regarder, je passe mon temps à tourner la tête à droite à gauche… Le pire, c’est que le son sort de l’ordinateur et pas d’une enceinte, donc une fois sur deux je n’entend pas du tout ce que les recruteuses connectées disent. Je suis obligé de me pencher vers l’ordinateur pour tendre l’oreille, pendant qu’elles me regardent me dévisser le cou via écran interposé. Et le fait de garder le masque dans la salle d’entretien ne facilite pas l’exercice. À la limite, il aurait été plus simple qu’on soit tous en visio sans masque, ou tous présents avec des masques, mais se retrouver à deux à porter le masque, et deux autres non, complique vraiment la communication..

Habituellement, je suis plutôt bon en entretien, enfin disons que je ne me laisse pas facilement déstabiliser, mais là c’est presque mission impossible.

L’effet de (mauvaise) surprise

Aujourd’hui, quand je repense à cette expérience, je trouve anormal de ne pas avoir été prévenu en amont. À aucun moment elles n’ont cru bon de justifier pourquoi deux personnes sur trois n’avaient pas fait l’effort de venir, elles sont parties du principe que c’était normal. De mon côté, je trouve cela assez gonflé.

La teneur de l’entretien aussi était gênante, plus proche d’un examen de passage que d’un échange, j’étais là face à trois personnes qui me bombardaient de questions auxquelles je devais répondre du tac au tac, c’était effectivement plus un jury qu’un entretien d’embauche. Le lendemain, j’ai reçu un mail qui me demandait mes trois derniers entretiens annuels, ce que j’ai trouvé ça assez intrusif, comme s’il fallait qu’ils vérifient mes dires.

Finalement, j’ai fini par renoncer au poste. J’ai passé un autre entretien en parallèle, où tous étaient physiquement là, et c’est beaucoup plus agréable, ne serait-ce que pour mieux se vendre. La communication non verbale est hyper importante en entretien d’embauche, c’est très perturbant de ne pas y avoir accès à cause de la distance qu’impliquent les écrans.

Si j’avais un conseil à donner pour les entreprises qui font passer ce type d’entretien « hybride », c’est d’au moins prévenir le candidat, qu’il puisse être préparé, et de faire en sorte que les personnes en présentiel et en visio soient a minima sur le même plan de regard et de son. Sinon c’est vraiment difficile à gérer pour la personne en face ! Aujourd’hui, j’en garde simplement un mauvais souvenir, mais quelqu’un de très introverti, ou qui est vite impressionné en entretien, peut vraiment être un peu « traumatisé » par ce genre d’expérience…

Article édité par Romane Ganneval
Photo WTTJ

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