De Sydney à Biarritz, la success story de Benjamin de DEUS EX MACHINA

18 oct. 2018

6min

De Sydney à Biarritz, la success story de Benjamin de DEUS EX MACHINA
auteur.e

Il y a dans l’air comme une odeur de gazoil et de sable chaud. C’est l’été indien à Biarritz, 30 degrés au compteur en ce vendredi de septembre et personne dans les rues. En même temps, la plage est si proche et la baignade, tentante. C’est en s’éloignant du centre-ville qu’on découvre la seule boutique DEUS de France, et la sixième mondiale, tenue par Benjamin Marigot et son équipe. 200m2 de terrain de jeu, rempli de motos, de planches de surf et de good vibes.

Si la boutique n’a que quelques mois, la rencontre entre Benjamin et la marque a eu lieu cinq ans plus tôt, à Sydney. Ce qui va suivre est une histoire d’amour et de persévérance. C’est beau.

Nous regardons passer une vielle Mustang Fastback bleue, magnifique et bruyante, avant de commencer.

Hello Ben, il paraît que c’est possible de tomber amoureux d’une marque de fringues… Tu confirmes ?

Absolument ! (rires) C’était en 2013. Je venais de débarquer en Australie pour faire un break après des expériences entrepreneuriales à Aix-en-Provence et une expérience salariale chez RVCA avant le rachat de la marque par Billabong.

Après une semaine passé à Sydney, je suis tombé par hasard sur une boutique de la marque DEUS. ll y avait tout ce que j’aimais : de la bonne bouffe, des motos, des surfs, de l’art, les fringues… Coup de foudre. Je me suis tout de suite identifié à la marque et je me suis dis : « Ok, c’est ça que je veux faire de ma vie. Je veux travailler avec eux. » C’était une évidence.

Alors, j’ai continué à voyager dans le pays tout en envoyant au moins un mail par semaine à DEUS à une adresse générique. Un mail, deux mail, dix mails…

ll y avait tout ce que j’aimais : de la bonne bouffe, des motos, des surfs, de l’art, les fringues… Coup de foudre.

Qu’est-ce que tu voulais obtenir ?

Je voulais les rencontrer pour leur proposer mon expertise, mon expérience et mon réseau pour mettre en place la distribution de leurs produits en France. À ce moment là, la marque était distribuée essentiellement en Australie, aux États-Unis et à Bali.

Après un énième mail, j’ai fini par recevoir une réponse : « Salut, est-ce que tu es toujours à Sydney ? Est-ce qu’on peut se rencontrer ? » J’ai donc mis mon plus beau t-shirt troué de baroudeur, et j’y suis allé. Je pensais discuter autour d’un café avec un mec lambda et en fait j’étais face aux deux co-fondateurs, au directeur général… En tout, ils étaient six à me regarder dans le blanc des yeux, en mode « Bon, maintenant que tu nous as bien harcelés, qu’est-ce que tu veux ? »

Et ? C’est un film à suspens ton truc !

Je leur ai expliqué mon plan et ils m’ont répondu : « C’est trop tôt, merci, au revoir. »

Benjamin Marigot - DEUS France

Fail…

Un peu. Mais après ce rendez-vous, j’étais toujours dans le pays et j’ai continué à envoyer des mails. Et puis, un jour, je leur ai posé une sorte d’ultimatum : « Soit vous me dites que c’est mort et je fais ma vie sans DEUS, soit je rentre chez moi et je ne reviens jamais en Australie, parce que je serai en train de développer votre réseau en France. » Et ça a fonctionné. Ils m’ont rappelé et en une poignée de main, c’était parti. Pas de papiers, pas de contrat, juste la confiance qu’ils me donnaient. Heureusement que ma copine Lucie m’a autant encouragé et soutenu dans cette prise de risque !

En une poignée de main, c’était parti. Pas de papiers, pas de contrat, juste la confiance qu’ils me donnaient.

Comment ça s’est passé quand tu es rentré ?

En mai 2014, je suis rentré avec une dizaine de t-shirts et un très joli book de la marque. J’ai pris ma voiture - enfin plutôt celle de mes parents car j’avais tout vendu avant de partir ! - pour aller voir mon réseau et leur présenter mon coup de coeur australien.

Comment se sont passées les premières étapes sur le terrain ?

J’ai commencé tranquillement avec quatre ou cinq magasins dans le Sud de la France. J’ai dit aux co-fondateurs : « Je ne vais pas vous ouvrir 400 points de ventes en un an, je vais vous en ouvrir 20 mais ce seront les meilleurs. »

Puis, collection après collection, le réseau s’est étendu. J’ai commencé à acheter de plus en plus de marchandise, à la stocker chez moi, puis dans un garage et enfin dans un bureau ! Je faisais les commandes, les cartons, les expéditions…. Et je me payais, au lance-pierre, avec la petite marge que j’arrivais à dégager. Mais depuis le début, je savais que je ne voulais pas en rester là et que je voulais ouvrir un magasin comme celui de Sydney regroupant une boutique, un café, de la restauration plus ou moins élaborée.

Depuis le début, je savais que je ne voulais pas en rester là et que je voulais ouvrir un magasin comme celui de Sydney

DEUS France

DEUS France

Comment as-tu réussi à convaincre les fondateurs ?

Pour beaucoup de raisons - financières, d’associations et des raisons internes à la marque - ça a été compliqué et long, mais tu sais que je ne lâche pas l’affaire (rires). Bien sûr, j’ai failli abandonner et abdiquer plus d’une fois, parce que j’étais tout seul et que l’Australie c’est quand même loin pour faire avancer les choses.

J’ai failli abandonner et abdiquer plus d’une fois, parce que j’étais tout seul et que l’Australie c’est quand même loin pour faire avancer les choses.

Quand ça a commencé à bien marcher pour la marque, les gros requins du milieu se sont réveillés. Mais pour toutes les demandes, les boss leur répondaient : « _Vous voyez ça avec Ben, c’est notre homme, c’est lui qui est là depuis le début. » _Là, j’ai compris que c’était gagné. Depuis notre première poignée de main informelle, la route avait été longue mais j’avais gagné leur confiance.

Pour ce nouveau projet, quel est ton niveau d’indépendance par rapport à la marque ?

L’indépendance est très grande car il n’y a pas de guideline, pas de to-do-list ! Les fondateurs m’ont juste dit : « À toi de jouer, montre-nous ce que c’est DEUS France. » Et DEUS Biarritz c’est évidemment complètement différent de DEUS Tokyo, de DEUS Milan etc. Ce n’est pas un concept à dupliquer. C’est un ADN à adapter à chaque pays. Et quand j’ai vu ce lieu, j’ai tout de suite su que c’était le bon endroit. On a fait deux skype avec les boss et c’était parti.

Ils ne subventionnent pas financièrement le projet, ils donnent juste un “go” ou un “don’t go”, donc j’ai financé ce projet seul, en faisant un prêt.

Benjamin Marigot - DEUS France

DEUS France

Et pourquoi as-tu choisi Biarritz ?

C’était Biarritz, la capitale du surf, ou Paris, la capitale de la mode. La première c’était plus risqué d’un point de vue commercial, mais hyper important d’un point de vue image car tu atterris rarement à Biarritz par hasard. La ville devient une destination que tu fais aussi pour découvrir la marque, notamment pendant le festival Wheels & Waves qui a lieu tous les ans au mois de juin.

J’ai avancé les deux dossiers et je me suis dis que la première réponse que j’aurais déciderait pour moi. C’était un peu du hasard, même si à titre personnel, j’avais quand même une petite préférence pour Biarritz !

Quel est ton job aujourd’hui ?

Je suis toujours sur le terrain avec les 80 revendeurs de la marque en France, je suis dans un bureau face à des tableaux Excel, puis à la caisse de la boutique et enfin derrière le bar quand c’est nécessaire ! Je fais plusieurs jobs et c’est hyper riche, mais heureusement que j’ai une super équipe - Jean-Charles, mon bras droit aussi persévérant et tenace que moi, Anthony et Marie - car tout doit être fait avec la même rigueur : du choix des distributeurs au choix du café ! On est tout le temps en train de se remettre en question et d’apprendre une nouvelle facette du métier.

Je fais plusieurs jobs et c’est hyper riche, mais heureusement que j’ai une super équipe… car tout doit être fait avec la même rigueur.

Parfois c’est dur car il y a forcément des journées moins bonnes mais si tu te rends compte que le réseau va bien, que tu as créé un lieu sympa et que les gens qui viennent ou qui y travaillent sont heureux, alors c’est déjà - un peu - gagné.

La team DEUS France : Benjamin, Anthony, Marie et Jean-Charles

C’est quoi ton rapport avec les boss en Australie maintenant ?

Depuis l’ouverture du magasin, ils m’appellent souvent pour prendre des nouvelles, plus perso que pro’ d’ailleurs car ils ont les rapports chiffrés pour ça. On a passé un cap dans notre relation. C’est bon de se dire que toutes ces années où j’ai beaucoup bossé ne sont pas passées inaperçues. Je crois que je fais un peu partie de la famille maintenant…

C’est bon de se dire que toutes ces années où j’ai beaucoup bossé ne sont pas passées inaperçues.

En même temps, après 200 mails…

Exactement ! (rires) Je t’ai expliqué le nom du magasin ? “Tenement of Tenacity”, l’immeuble de la ténacité. C’est nous qui l’avons baptisé, avec les australiens, comme un clin d’oeil à mon parcours. Depuis le début de l’aventure DEUS, ils m’ont dit n’avoir jamais trouver quelqu’un d’aussi tenace !

DEUS France

DEUS France

Photo d’illustration by WTTJ & Deus Ex Machina

Les thématiques abordées