Recruteurs : 6 conseils pour tester la motivation de vos candidats

17 juil. 2023

5min

Recruteurs : 6 conseils pour tester la motivation de vos candidats
auteur.e
Barbara Azais

Journaliste freelance

Bien jauger la motivation des candidats en entretien et s’assurer qu’ils et elles ont sincèrement envie de rejoindre vos équipes est essentiel. Recruteurs, voici 6 techniques efficaces pour tester leur détermination et repérer les red flags.

Parfois difficile à évaluer lors du processus de recrutement, la motivation des candidats reste un enjeu majeur pour les entreprises. Car outre le fait de recruter des talents qualifiés, encore faut-il en trouver qui soient sincèrement enthousiasmés par le poste pour éviter un éventuel désengagement, de l’absentéisme, voire du turnover. « Le marché du travail est très dynamique », observe Laure Charbonneau, directrice régionale du cabinet de recrutement Robert Half. « Les candidats sont beaucoup sollicités, même sans être actifs, il est donc important de tester leur motivation pour éviter une erreur de casting ».

Les recrutements ratés ont en effet un coût financier et humain conséquent pour une boîte. Mais malgré cela, « 43 % des dirigeants disent avoir loupé un recrutement dans l’année », informe-t-elle. Alors comment évaluer efficacement la motivation des talents que vous recevez en entretien et réussir votre pari ? Voici 6 techniques faciles à mettre en place.

1. Mieux comprendre ce qu’est la motivation au travail

Le premier outil, c’est la connaissance. En effet, pour saisir toute la complexité de ce que l’on appelle « la motivation au travail » et flairer les bons candidats, sachez qu’elle ne relève pas uniquement de la simple volonté personnelle. Les experts notent en effet deux types de motivation au travail qu’il est intéressant de connaître :

  • la motivation intrinsèque qui repose sur les désirs et besoins personnels (intrinsèques) d’un individu. C’est-à-dire qui correspondent à sa personnalité, à sa nature profonde et ne relève d’aucun élément extérieur. C’est par exemple sa motivation à exercer un travail stimulant qui a du sens, à s’épanouir dans son job ou encore à recevoir de la reconnaissance. Tout ce qui lui procure de la satisfaction personnelle et contribue à son bien-être.

  • la motivation extrinsèque qui, elle, se déploie dans le travail en fonction de facteurs extérieurs comme le salaire, le statut, les promotions ou encore les avantages professionnels.

Bien que la motivation extrinsèque était jusque-là le type de motivation prédominant chez les actifs, on observe aujourd’hui un changement de paradigme : l’équilibre personnel, le bien-être, la santé, l’impact sur les autres et la planète, ainsi que la qualité du management sont devenus des sources de motivation additionnelles. Une récente étude du cabinet Robert Half révèle à ce sujet que 53 % des actifs sont plus exigeants concernant leur équilibre vie pro / vie perso, 37 % le sont au sujet du sens de leur travail et 36 % par rapport à la flexibilité.

Tenir compte de ces deux types de motivation permet donc d’avoir une perception plus réaliste de ce qui anime aujourd’hui un candidat d’un point de vue personnel et individuel (sa motivation intrinsèque) ainsi que social et professionnel (sa motivation extrinsèque). Parfait pour orienter vos questions !

2. Opter pour des questions ouvertes

Le reste se joue lors de l’entretien et c’est vous, recruteurs, qui en êtes les chefs d’orchestre. Alors n’hésitez pas à ouvrir le bal avec des questions ouvertes « telles que ‘Qu’est-ce qui vous motive à vous lever tous les matins pour travailler ?’ », cite Laure Charbonneau. Ou encore « ‘Qu’est ce qui vous intéresse sur le poste proposé ? Dans le fait de venir travailler chez nous ? Pourquoi je vous choisirais plutôt qu’un autre ?’ ». Les questions ouvertes permettent d’offrir un large espace d’expression aux candidats et de mieux cerner leur motivation.

« Je pose la même question au début et à la fin de l’entretien, un peu comme une intro et une conclusion, détaille la spécialiste. D’abord : ‘Qu’est-ce qui vous a motivé à ce que l’on échange aujourd’hui ?’. C’est une question très ouverte qui permet de voir comment la réponse va être détaillée. Puis : ‘Qu’est-ce qui vous motive à poursuivre le processus de recrutement ?’. C’est la même question, mais formulée autrement. Cela permet d’orienter la suite des échanges. »

3. Savoir lire entre les lignes

L’écoute est aussi très importante, alors tendez l’oreille et prêtez attention aux réponses de vos interlocuteurs. Car la tournure de leurs phrases, le choix de leurs mots et ce qu’ils ou elles décident d’expliquer en dit long sur leur motivation. « Soit la formulation de la réponse est globale, généraliste, soit plus affinée, ce qui montre que la personne s’est renseignée sur le poste et/ou l’entreprise. C’est déjà un signe de motivation qu’elle vienne préparée », estime Laure Charbonneau.

De plus en plus de candidats posent également des questions lors de l’entretien et challengent les recruteurs. Notamment sur les valeurs et la culture d’entreprise, le type de management exercé ou l’ambiance au sein de l’équipe. « Ces questions sont récentes et montrent l’intérêt du candidat, les recruteurs doivent s’y préparer. »

Autre point positif : que la personne prenne des notes. « Ça montre l’importance qu’elle accorde à notre échange et au fait de retenir les informations qui lui sont données. Si elle n’en prend pas (attention, red flag ! ndlr), c’est peut-être parce qu’elle a une super mémoire, ironise l’experte. On peut alors tester sa mémoire (et donc son intérêt, ndlr) en lui demandant quelle était la première question posée » ou ce qu’elle a retenu de l’échange.

Enfin, une réponse tardive démontre un manque évident de motivation. « Quand j’essaie de joindre un talent et qu’il rappelle plusieurs jours après, c’est un red flag. Généralement, soit il a plusieurs propositions et ne sait pas où s’engager. Soit il n’est pas très motivé par le poste et ce qu’on lui propose. Je fais toujours remarquer que j’ai laissé un message par exemple lundi et qu’on est vendredi : ‘Qu’est-ce qu’il s’est passé, pourquoi vous ne m’avez pas rappelée ?’. Cela ouvre la voie à un nouvel échange qui permettra de savoir s’il est motivé et s’il a d’autres propositions. »

4. Analyser le langage corporel

Le non-verbal vous donne aussi des repères sur la personnalité, l’état d’esprit et la motivation des candidats. La gestuelle est en effet inconsciente et se contrôle plus difficilement que la parole, alors ouvrez l’œil. Car « la posture des candidats en dit long, confirme Laure Charbonneau. Si le candidat est avachi ou a les bras croisés, il ne dégage pas le même intérêt qu’une personne dont le buste est avancé ». Sa motivation sera également différente selon que ses coudes sont sur ou sous la table, si ses sourcils sont froncés (cela peut traduire une incompréhension ou un désaccord), si elle a le regard fuyant ou encore, si elle recule à l’énoncé d’une information. « Tous ces signaux peuvent s’interpréter. Le pire red flag, c’est une personne qui regarde son téléphone ! C’est un signe de détachement, c’est éliminatoire. »

5. Tenir compte de « l’après entretien »

À la fin d’un entretien, lorsque les deux parties ont longuement échangé, il est normal de se laisser du temps et de l’espace pour digérer les infos et faire le point… Mais quand elle s’éternise, la perte de contact révèle aussi un manque d’intérêt. « Je leur propose de m’envoyer un mail en fin de journée, en fonction de ce qu’on s’est dit et pour confirmer leur motivation à continuer le processus de recrutement. Cela permet d’avoir un retour à tête reposée et pour certains candidats réservés ou stressés, de s’exprimer plus aisément à l’écrit ».

Les recruteurs doivent en effet garder à l’esprit que l’entretien d’embauche est une source de stress pour 61 % des candidats, selon un sondage Indeed (2019). Cet échange provoque même un sentiment de peur chez 34 % d’entre eux. Un Français sur deux estime avoir déjà compromis ses chances d’être embauché à cause du stress. « On a pas tous la possibilité d’exprimer facilement ses sentiments en entretien », concède l’experte. D’où l’intérêt de jauger à nouveau la motivation des candidats après l’entretien en les invitant à envoyer un mail de confirmation. « Il arrive que je n’en reçoive pas, ce qui est un signe clair de non motivation », précise-t-elle. Mais qui, au moins, a le mérite d’être clair.

6. Organiser un temps d’immersion pour le candidat

Enfin, l’un des meilleurs moyens de s’assurer jusqu’au bout de la motivation d’un candidat est de lui permettre un petit moment d’immersion dans l’entreprise avant la signature du contrat. « C’est une étape assez simple à mettre en place en fin de process. C’est plus concret qu’une discussion pour jauger sa motivation car il peut se rendre compte que quelque chose ne lui convient pas, comme par exemple le fait de travailler en open space ». Pour vous, c’est aussi l’occasion de voir la personne sur le terrain aux côtés des équipes et de vous assurer que vous faites le bon choix.


Article édité par Ariane Picoche, photo : Thomas Decamps pour WTTJ

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