5 raisons d’accepter les petites missions "chiantes" (avec modération)

29 mars 2022

4min

5 raisons d’accepter les petites missions "chiantes" (avec modération)
auteur.e
Marlène Moreira

Journaliste indépendante.

« Qui aurait une heure ou deux pour compiler ces tableaux Excel / corriger ce rapport de 40 pages / photocopier toutes nos factures de l’année ? », demande votre boss, avec un enthousiasme feint, presque convaincant. Comme à l’école - face au professeur de mathématiques à la recherche d’un volontaire pour passer au tableau - toutes les têtes de l’open space se baissent. Pensez-vous sérieusement que ne pas croiser son regard vous fera disparaître à ses yeux ? « Non, mais dans le doute… »

En entreprise, ces petites missions peu intéressantes et chronophages ont mauvaise presse. Elles nous prennent beaucoup de temps, ne nous apprennent pas grand chose, et par peur que celles-ci nous “dévaluent” aux yeux de notre hiérarchie, on daigne parfois même les accepter. Pourtant, elles ont aussi de bons côtés ! Voici 5 raisons d’accepter les petites missions chiantes au boulot, de temps en temps.

1. Vous montrez que vous n’avez pas peur de mettre les mains dans le cambouis… et gagnez la gratitude de vos pairs

Si vous avez l’impression que vous « rabaisser » à accepter ces missions peut vous décrédibiliser, détrompez-vous. Cela montre, au contraire, votre investissement et votre volonté de rester connecté à l’opérationnel. Apporter votre aide concrète sur un sujet sera toujours bien perçu. Car même si on n’est pas manager, plus on prend des responsabilités dans l’entreprise, plus on se détache de ces missions très pratiques (et un brin rébarbatives) et moins on se souvient de la réalité du terrain. Or cette connaissance est fondamentale pour pouvoir jauger l’importance de la tâche, le temps qu’elle prend…

Et apporter cette aide ne vous enlèvera pas votre légitimité pour autant ! Une étude du Journal of Applied Psychology s’est intéressée à l’entraide au travail, et notamment la perception d’une aide réactive (vous acceptez d’aider suite à une demande) face à une aide proactive (vous prenez les devants). L’étude révèle que lorsqu’un individu répond positivement à la demande d’un pair, il reçoit plus de gratitude que s’il propose son aide de lui-même. À leur tour, les personnes aidées se sentent plus engagées. La leçon à en tirer ? Ne tendez pas toujours la main si personne ne vous l’a demandé, mais saisissez les occasions de rendre service.

2. Vous permettez à votre cerveau de se reposer et d’être plus créatif

Les tâches les plus redoutées sont souvent les plus répétitives. Pourtant, ces moments sont aussi l’occasion de donner un peu d’air à votre cerveau, lui permettre de fonctionner en pilote automatique, de le laisser divaguer, prendre de la hauteur sur le quotidien et donc gagner en créativité.

D’après une étude publiée dans la revue Academy of Management Discoveries, les tâches les plus assommantes permettent à l’esprit de se placer dans un état de rêverie et de créer sans distraction. Sandi Mann, maître de conférences en psychologie, explique que l’ennui est simplement une recherche de stimulation neuronale qui n’est pas satisfaite. « Et quand nous ne sommes pas stimulés, notre esprit compense », explique-t-il. Par ailleurs, une autre étude menée par l’Organisational Behaviour and Human Decision Processes explique, de son côté, qu’alterner entre différentes tâches permet de rafraîchir votre réflexion. À l’inverse, se concentrer sur un problème pendant des périodes prolongées conduit à tourner en rond autour des mêmes idées inefficaces. Et si lever le nez de cette mission « super importante » pour trier des trombones vous permettait d’avoir l’idée du siècle ?

3. Vous pouvez faire autre chose en même temps, sans culpabiliser

Vous devez faire des photocopies ? Profitez-en pour écouter un podcast ou de la musique, c’est discret et personne ne vous le reprochera. Vous devez faire acte de présence dans une série de réunions inutiles en visioconférence ? Promenez votre chien, étendez votre linge, cuisinez un plat de lasagne… Bon, on pousse le bouchon un peu loin.

Si les chercheurs qui étudient le multitasking s’accordent sur le fait que le cerveau n’est pas capable d’effectuer (correctement) plus d’une tâche importante à la fois, heureusement, toutes les tâches ne nécessitent pas une véritable concentration. Et dans ce cas, distraire votre cerveau pourrait être bénéfique ! Une étude - qui s’intéresse notamment au métier de chirurgien - montre qu’écouter de la musique soulagerait une partie de l’ennui qui accompagne les tâches répétitives, et améliorerait la productivité. Rassurez-vous, les chirurgiens interrogés n’écoutent pas Miley Cyrus pendant votre opération des ligaments croisés, mais plutôt pendant leur travail administratif et leurs tâches de laboratoire (ouf !)

4. Vous pourrez peut-être apprendre quelque chose de nouveau

C’est vrai, trier des dossiers est loin d’être la mission la plus amusante que vous aurez à effectuer dans votre carrière. Mais il y a toujours quelque chose à tirer de ces petites tâches : de meilleures capacités d’organisation, un historique des missions réalisées par votre équipe, le début d’une belle amitié avec l’archiviste de l’entreprise. Peut-être même, les trois à la fois ?

Chaque mission - même la plus basique - peut vous être utile pour développer une nouvelle compétence, apprendre des informations utiles au développement de votre carrière et/ou travailler vos relations au sein de votre boîte. Dans le cas contraire, dites-vous que chaque tâche « chiante » est, a minima, l’occasion d’apprendre la persévérance et la discipline. Haut les cœurs !

5. Vous pouvez réfléchir à supprimer la nécessité de cette tâche dans le futur

Convertir un ensemble de documents Word en PDF, traduire une présentation Powerpoint en anglais, vérifier les notes de frais de votre équipe… de nombreuses tâches ennuyantes perdurent car personne ne se penche réellement sur la façon de les supprimer. Pourtant, de plus en plus d’outils permettent aujourd’hui de rendre ces missions inutiles.

Une étude du cabinet McKinsey suggère que jusqu’à 45 % de nos tâches pourraient être automatisées en adaptant les technologies existantes. En exécutant une tâche, vous êtes le mieux placé pour en comprendre les contours, puis convaincre votre boss que souscrire à un outil qui le fera à votre place est plus rentable. Aux États-Unis, ces activités « remplaçables » représenteraient environ 2 000 milliards de dollars en salaires annuels. Et si vous preniez les devants en transformant une mission peu gratifiante en une opportunité de vous débarrasser, définitivement, d’une tâche qui finira par l’être ?

Vous l’aurez compris, il est normal de ne pas apprécier l’intégralité des tâches secondaires (mais nécessaires) à votre job. C’est vrai pour les professeurs, pour les chirurgiens et pour les journalistes, autant que pour le comptable de votre entreprise. Le plus important, c’est surtout d’apprécier les missions qui constituent le cœur de votre métier. Pour le reste, prenez sur vous, cela va passer. « Alors ? Pas de volontaire ? », répète votre boss. Et si, pour cette fois, vous leviez la main ?

Article édité par Gabrielle Predko, photo Thomas Decamps pour WTTJ

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