Career Hacking #1 : CTO, comment gérer l’onboarding de ses développeurs ?

Publié dans CTO

23 juil. 2019

auteur.e
Marine Debelloir

Freelance writer

Cet article est issu de la section Behind the Code et s’adresse à un public de développeurs. Pour avoir accès à plus de contenus similaires, comme des retours d’expérience, des interviews de personnalités du monde du développement ou encore des articles de réflexions sur la programmation, n’hésitez pas à consulter directement notre rubrique Behind the Code, entièrement en anglais.

Les développeurs constituent une population particulièrement difficile à retenir : le secteur de la tech affiche en effet actuellement les taux de turnover les plus élevés du marché. Une étude LinkedIn publiée en mars 2018 a ainsi montré que 21,7 % des data analysts et des ingénieurs sur systèmes embarqués ont changé de travail en 2017. Dans ce contexte, il devient donc primordial pour les entreprises de se demander comment elles peuvent créer un environnement qui encourage les développeurs à rester. Les premières impressions étant les plus importantes, on vous conseille de porter une attention particulière à vos processus d’onboarding lorsqu’en tant que manager, vous embauchez de nouveaux collaborateurs.

Pour vous aider à comprendre comment bien onboarder vos prochains développeurs, nous avons organisé un meet-up Career Hacking by Behind the Code le 26 juin 2019 à Paris avec les deux speakers suivants :

  • Sylvain Utard : VP of Engineering chez Algolia, une entreprise B2B parisienne qui propose un moteur de recherche et emploie 350 salariés, dont 110 dans l’équipe technique. En 2018, elle a recruté près de 170 nouveaux collaborateurs. Plus de 20 nationalités sont représentées au sein de son bureau parisien.
  • Tugdual de Kerviler : Développeur chez Automattic (l’entreprise derrière WordPress.com) qui compte environ 900 employés en full remote, dont 350 développeurs. Automattic embauche environ 150 personnes par an.

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Créez un onboarding plan automatisé

Pour définir dès le départ tous les points importants à aborder entre vous et vos nouvelles recrues, il est fortement conseillé d’utiliser un onboarding plan. Ce document listera l’ensemble des informations à connaître de la part du nouveau développeur, des vacances à la façon de déployer du code.

Algolia a ainsi l’habitude de créer les onboarding plans, intégrant des jalons à 30, 60 et 90 jours, une semaine voire plus avant l’arrivée du nouvel employé. Pour Sylvain, un onboarding plan doit répondre aux principales questions qu’un nouveau salarié va être amené à se poser : « Un nouvel employé a besoin de guidelines pour lui expliquer ce qu’on attend de lui et comment il peut réaliser correctement son travail. »

Et si les premières étapes d’accueil d’un nouveau développeur sont généralement réalisées sans trop d’effort, il sera toujours plus difficile de réaliser les tâches suivantes, une fois que vous serez retourné dans votre travail quotidien. Vous risquez ainsi d’omettre des explications importantes que vous aviez prévu de donner au nouvel arrivant. Pour éviter ces oublis, Automattic et Algolia ont élaboré des process automatisés. Sylvain explique que la création d’un Slack bot peut être un moyen très efficace de rappeler au reste de l’équipe les différentes étapes d’onboarding d’un nouveau coéquipier : « Une semaine avant, le manager reçoit un message du Slack bot. Il répond alors à quelques questions, ce qui permettra de générer l’onboarding plan qui sera ensuite envoyé au nouveau développeur. » En très peu de temps — une heure tout au plus, selon Sylvain — le manager pourra ainsi recueillir les informations nécessaires à l’onboarding. Chez Automattic, un Donut bot est mis en place pour rappeler à l’équipe ce qui est censé se passer jour après jour lors du processus d’onboarding.

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Parlez rapidement de sécurité

Si Tugdual et Sylvain s’accordent sur le fait que faire confiance à ses nouveaux employés en matière de sécurité est un excellent moyen de les faire se sentir bien accueillis, ils rappellent que cette confiance doit être accompagnée de règles à suivre.

La première semaine est idéale pour expliquer aux nouveaux développeurs les règles et recommandations liées à la sécurité au sein de votre entreprise. Chez Algolia, chaque nouvel arrivant reçoit une formation. « Les employés n’obtiennent pas leur téléphone ou leur ordinateur avant d’avoir reçu une formation concernant la sécurité », confirme Sylvain. Au cours de cette formation, l’entreprise s’assure que chaque employé utilise un gestionnaire de mot de passe tel que LastPass ou 1Password ou encore qu’il connaît l’authentification à deux facteurs et le phishing.

Et soyez clair dès le départ sur les technologies et outils externes qui ne sont pas autorisés pour des questions de sécurité. Par exemple si un développeur utilise un IDE cloud, assurez-vous que cette plateforme ne provoquera pas une brèche de sécurité pour votre entreprise.

Clarifier la politique de sécurité dès l’onboarding profitera non seulement à l’entreprise, mais aussi au développeur qui pourra alors se concentrer plus efficacement sur son travail.

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Créez et mettez à jour une base de connaissances

L’élément clé d’un onboarding réussi est de donner accès aux outils et à l’information. Une base de connaissances de qualité est ainsi absolument cruciale pour permettre aux développeurs d’apprendre à connaître votre entreprise.

« Au cours de leurs premières semaines au sein de l’entreprise, l’objectif est de leur fournir les outils nécessaires pour naviguer parmi toutes les informations à intégrer », explique Tugdual. Automattic a ainsi mis en place un Wiki qui couvre tous les process utilisés par l’entreprise et qui inclut des descriptions step-by-step ainsi que des réponses aux questions les plus fréquemment posées ; il est mis à jour dès qu’un nouveau process est mis en œuvre. Deux moteurs de recherche sont également disponibles : l’un est destiné au Wiki, l’autre aux ressources disponibles sur Slack et GitHub. Chez Algolia, la base de connaissances est documentée sur Confluence, avec des articles de type how-to décrivant des points spécifiques. Retenez que la meilleure façon de créer une base de connaissances est d’utiliser un outil que vos équipes connaissent déjà. Il sera ainsi plus facile pour eux de l’utiliser.

L’accès à l’information consiste aussi à documenter ce que fait l’équipe au quotidien. Vous et votre équipe doivent ainsi utiliser autant que possible des readmes. Par exemple, chez Automattic, chaque package et chaque module propose son propre readme pour que tout le monde puisse comprendre de quoi il s’agit.

La continuous integration/continuous delivery (CI/CD) pipeline est aussi une solution pour partager les connaissances relatives aux bonnes pratiques de développement. « Beaucoup de choses sont automatisées dans la pipeline CI/CD pour vérifier le style de programmation et lancer ESLint et Prettier », explique Sylvain. Cela permet aux développeurs de voir en un clin d’œil si leur code ne correspond pas aux bonnes pratiques mises en place par l’entreprise. Ils peuvent ainsi directement modifier le code en conséquence.

Un dernier point : n’oubliez pas que le nouveau développeur ne parle sans doute pas le même langage corporate que vous. Il aura donc besoin de ressources pour comprendre le vocabulaire employé au sein de l’entreprise. « Nous disposons d’un glossaire sur notre Wiki expliquant chaque acronyme que nous utilisons, chaque projet entrepris, tout ce que vous pourriez entendre au cours d’une conversation et que quelqu’un à l’extérieur de l’entreprise ne pourrait pas comprendre.» explique Tugdual.

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Faites déployer du code au nouveau développeur dès que possible

Il n’y a rien de pire lorsque vous engagez quelqu’un que de mettre la personne sur la touche pendant les premières semaines. Sylvain et Tugdual s’accordent pour dire que cela est tout à fait contre-productif.

Chez Automattic, les développeurs commencent même à coder pour l’entreprise pendant la période des entretiens. « La période de recrutement dure entre deux et trois mois et les deux tiers de cette période sont consacrés à un “trial project”, une étape de probation au cours de laquelle les développeurs sont rémunérés pour travailler sur les problématiques de l’entreprise », explique Tugdual. Cela permet à la fois de tester l’expertise et les soft skills du développeur en conditions réelles, comme par exemple la manière dont il réagit aux feedbacks des autres développeurs, ainsi que de fournir au développeur l’opportunité de s’acclimater à la culture de l’entreprise, à ses process et à ses outils.

Selon Sylvain, « l’impact business de la première fonctionnalité développée n’est jamais très important — ce qui importe le plus, c’est de la déployer. » Algolia encourage ainsi ses développeurs à déployer une nouvelle fonctionnalité dans les 3 à 6 premières semaines, en faisant comprendre au nouveau développeur qu’il ne sera pas pénalisé s’il fait une erreur. Il est en effet important de faire comprendre que cette période d’onboarding est davantage axée sur l’apprentissage que sur la productivité.

Sylvain conseille également de prêter attention à la façon dont les projets sont nommés. Aussi tentant qu’il serait de laisser une équipe choisir des noms en référence à Star Wars ou Harry Potter, assurez-vous surtout qu’ils sont compréhensibles pour tout nouvel employé !

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Créez un environnement bienveillant

Être en mesure d’offrir un environnement bienveillant est essentiel lorsque vous accueillez des nouveaux développeurs, en particulier lorsque que tous les employés travaillent à distance comme cela est le cas pour Automattic. Les entreprises rencontrent souvent des difficultés pour créer un bon esprit d’équipe.

Pour surmonter ce problème, Automattic utilise plusieurs outils afin de s’assurer que personne ne se sente isolé. « Chaque nouveau développeur reçoit un message de bienvenue sur le forum de l’équipe, puis le chef d’équipe programme un vidéo call », indique Tugdual. Vous pouvez également se faire se présenter chaque nouvel employé dans une vidéo qui sera envoyée au reste de l’équipe, comme chez Automattic où cela est devenu une tradition. Les vidéos des employés en poste restent ensuite disponibles pour les nouvelles recrues afin qu’elles apprennent à connaître leurs collègues.

Assurez-vous également que votre nouveau développeur est correctement entouré. Le team lead sera évidemment le premier contact qu’il aura, mais il ne doit pas rester le seul. Afin de favoriser les échanges, vous pouvez utiliser le système des buddies. Sylvain explique ainsi que deux buddies sont affectés à chaque nouvel employé d’Algolia : un au sein de l’équipe dans laquelle le nouvel employé travaillera et un à l’extérieur de l’équipe. Le buddy interne sera plutôt un point de contact pour les questions liées au travail, tandis que le buddy extérieur permettra au nouvel arrivant d’aborder des sujets plus légers. Ils pourront par exemple déjeuner avec lui et plus généralement être des interlocuteurs privilégiés.

Organiser des meet-ups avec l’équipe est également une bonne idée. Inutile d’imposer un rythme mensuel, mais essayez d’en mettre en place assez régulièrement. Si les développeurs sont légèrement allergiques aux réunions, il s’agit malgré tout d’une excellente façon de rencontrer toute la « famille » et d’assurer un bon esprit d’équipe.

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Mélangez les équipes

Une bonne manière de faire se rencontrer les équipes est d’organiser des réunions avec différentes équipes, plutôt que se concentrer uniquement sur celle au sein de laquelle le nouveau développeur travaillera. Vous pouvez aussi configurer un outil automatisé : une simple chaîne sur Slack pourra désigner au hasard deux personnes pour leur proposer d’aller déjeuner ensemble, ce qui leur permettra de rencontrer quelqu’un de nouveau chaque semaine.

Une autre solution est de faire en sorte que chaque nouveau développeur occupe pendant une très courte période un poste différent de celui pour lequel il a été embauché. Ainsi, Automattic affecte pendant quelques semaines tous ses nouveaux développeurs au support technique lorsqu’ils commencent à travailler dans l’entreprise, tandis qu’Algolia leur fait parfois intégrer d’autres équipes, comme l’équipe commerciale. Les nouveaux employés découvrent alors l’entreprise d’un point de vue différent, ce qui leur permet de mieux comprendre la façon dont les autres personnes utilisent les outils qu’ils développent.

Vous pouvez aussi avoir recours à des goodies afin de promouvoir l’esprit d’entreprise. Au cours de leurs premiers jours de travail, offrez des t-shirts, des sacs ou des autocollants. C’est un petit geste, mais c’est une excellente manière de montrer que vos nouveaux employés font maintenant partie de la famille.

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Adaptez l’onboarding à la taille de votre équipe

La scalabilité est essentielle pour développer l’entreprise et le processus d’onboarding ne fait pas exception. Tugdual affirme ainsi qu’Automattic a embauché une personne dédiée à l’onboarding, ce que vous devrez sûrement être amené à faire à mesure que votre entreprise se développe.

Et même lorsque tous les outils sont en place, revoyez périodiquement votre stratégie d’onboarding de façon à toujours garder une longueur d’avance. Sylvain relate qu’en raison de sa croissance rapide, Algolia a dû actualiser son processus d’onboarding tous les six mois. Par exemple lorsque votre entreprise démarre, vous onboarderez les nouveaux employés au fur et à mesure, mais à mesure que l’équipe grandit, il est préférable de définir des périodes d’onboarding afin de gérer efficacement les nouveaux arrivants. « Actuellement, nous ne gérons plus que deux groupes d’arrivées par mois », explique Sylvain, qui insiste sur la nécessité de remettre en question régulièrement les habitudes. « Ces mises à jour sont vraiment nécessaires pour continuer à être efficaces afin de s’assurer que personne ne perde son temps. »

En outre, n’hésitez pas à envoyer un sondage à vos nouveaux employés après l’onboarding pour savoir ce qui a fonctionné et ce qui n’a pas fonctionné pour eux.

Vous en savez maintenant un peu plus sur l’onboarding de nouveaux développeurs. Mais profitez également de votre réflexion sur le process adapté pour réfléchir à l’identité en tant de l’entreprise, à votre culture et aux process que vous utilisez. Et n’oubliez pas qu’avec un onboarding réussi, vos développeurs seront plus enclins à rester longtemps au sein de votre entreprise.

Cet article est issu de la section Behind the Code et s’adresse à un public de développeurs. Pour avoir accès à plus de contenus similaires, comme des retours d’expérience, des interviews de personnalités du monde du développement ou encore des articles de réflexions sur la programmation, n’hésitez pas à consulter directement notre rubrique Behind the Code, entièrement en anglais.

Illustration par WTTJ

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