La semaine de 3 jours, une provocation ? « Je pense que c’est possible ! »

04 avr. 2024

4min

La semaine de 3 jours, une provocation ? « Je pense que c’est possible ! »
auteur.e
Kévin Corbel

Journaliste Modern Work

contributeur.e

TRIBUNE - Baptiste Hamain est le cofondateur et CEO de Pimpant, une start-up qui propose des recharges de produits du quotidien dans l’objectif de supprimer l’usage du plastique à usage unique. Depuis un an, il teste la semaine de quatre jours pour ses équipes et prône désormais même… celle de trois jours !


Ça fait maintenant trois ans qu’avec ma femme on a monté notre boîte, Pimpant, avec l’objectif de laisser un monde meilleur à nos enfants, que ce soit d’un point de vue écologique ou dans le monde du travail. Créer un environnement où les gens sont contents de venir au travail, c’est pour ça que je me lève le matin. La semaine de quatre jours, ça fait une petite année qu’on l’a adoptée chez Pimpant et j’ai beaucoup parlé de sa mise en place au sein de nos équipes dans ma newsletter Papapillon. Comme d’autres avant moi, j’ai reçu des critiques : « La semaine de 4 jours est utopique, et pourquoi pas trois jours tant qu’on y est ?! » Eh bien oui, après tout, pourquoi pas ? En décembre 2023, j’évoquais l’éventualité d’une semaine de trois jours de travail dans un post LinkedIn, en parlant d’une « opportunité d’accélérer le changement, de réinventer le travail et de créer un équilibre de vie durable. » C’est avec une certaine malice que j’amenais cette thématique, pour provoquer mes détracteurs mais aussi pour pousser la réflexion sur ces modes de travail alternatifs.

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Notre concept, chez Pimpant, ça a toujours été : « vous travaillez où vous voulez, quand vous voulez. » Le siège de la boîte est en Normandie mais la vingtaine de personnes impliquées dans le projet vivent aux quatre coins de la France, voire du monde. Les résultats de l’entreprise sont bons, et je crois aussi que c’est parce qu’on a cette vision de toujours rendre nos conditions de travail meilleures.
En 2022, il y a eu un test conséquent de la semaine de 4 jours au Royaume-Uni : au bout des six mois d’expérimentation, 92% des 61 entreprises « test » voulaient adopter ce modèle, ce qui était très encourageant. Assez vite, je me suis dit que ça correspondait à la vision du travail qu’on essayait de transmettre. Je suis donc aller voir mes équipes pour leur dire qu’on allait faire un test, nous aussi. Au départ, un tiers du personnel trouvait ça ridicule et je comprends pourquoi : naturellement, on aurait tendance à penser que bosser un jour de moins dans la semaine, c’est avoir 20% de résultats en moins à la fin du mois. Sauf que le corps et surtout le cerveau ne fonctionnent pas comme ça. Des études de VoucherCloud ont montré qu’on était vraiment productifs que 2h53 dans une journée.

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En parlant de la mise en place de la semaine de 4 jours avec Laurent de la Clergerie, de LDLC - auteur de Osez la semaine de quatre jours, ndlr. -, il m’a dit : « quand j’ai fait mon calcul, je pensais que ça allait me coûter 5 % de masse salariale en plus. » Sauf qu’au lieu de devoir embaucher, c’est le contraire qui s’est passé ! Il s’est rendu compte assez vite que ça ne lui coûtait rien. Avec une semaine de travail raccourcie, il n’y a plus de turnover, les gens sont plus motivés et il n’y a quasiment plus d’absences. Donc en tant que CEO, t’as déjà tout gagné.

La réduction du temps de travail est un outil comme un autre

L’un de mes objectifs principaux, en tant que chef d’entreprise, est de laisser un maximum d’autonomie à mes collaborateurs. C’est pour cela que je trouve qu’analyser toutes les problématiques du monde de l’entreprise sous le prisme du temps de travail est ridicule : au-delà même du nombre de jours travaillés, que ce soit 5 jours, 4 ou même 3, se pose la question de la valeur que chacun apporte au sein de la boîte, et de comment cette valeur peut entrer en adéquation avec son équilibre de vie. Je pense donc la semaine de 4 jours comme un outil et non comme une finalité. Même si je provoque beaucoup avec la semaine de 3 jours, je pense vraiment qu’on ne peut travailler que la moitié de sa semaine. Après tout, qu’est-ce qui nous empêche de passer autant de temps au taff qu’en off ?

Comme n’importe quel outil, la réduction du temps de travail ne peut pas fonctionner seule. Bill Gates évoquait récemment l’idée que le développement de l’intelligence artificielle pourrait nous amener vers la semaine de 3 jours en supprimant de nombreuses tâches ingrates et contraignantes. J’aime cette idée d’améliorer son efficacité au travail : mine de rien, tout le monde vit des moments stériles au boulot, que ce soit l’envoi de mails, l’écriture de rapports ou bien le calcul d’un budget. Imaginez si on n’arrivait à ne faire que des choses cool au travail ! Pourrait-on même encore parler de notion de travail si toutes nos tâches « chiantes » étaient automatisées ? C’est ce genre d’idées qui m’ont motivé à passer de 5 à 4 jours de travail par semaine chez Pimpant et qui vont sûrement m’amener, à l’avenir, à améliorer davantage la façon dont on s’organise, ce qui pourra passer par une semaine de trois jours.

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Juridiquement, on est obligé de se dire : « tu bosses trois, quatre ou cinq jours par semaine. » Mais la vraie réalité du sujet, c’est que si l’un de tes collaborateurs est plus efficace sur deux jours que sur quatre ou cinq, ça te sert à quoi de faire bosser cette personne plus de deux jours ? Il est difficile, voire contre productif de mettre UNE règle en place, comme celle de la semaine de 4 jours. Même cette dernière n’est pas rigide car on ne peut pas l’appliquer pareillement pour tout le monde.

Quand on me demande si, en tant que CEO, je fais la semaine de quatre jours, je réponds « non ». Pour moi le sujet est ailleurs : il s’agit davantage d’avoir ma petite soupape de décompression quand j’en ai envie, le vendredi ou le mercredi, quand je veux passer du temps avec mes enfants. C’est mon idéal, sans aucune contrainte.


Article écrit par Kévin Corbel et edité par Clémence Lesacq - Photo Thomas Decamps pour WTTJ

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