Comment trouver sa zone de génie (et y rester) ?

29. 2. 2024

5 min.

Comment trouver sa zone de génie (et y rester) ?
autor
Marlène Moreira

Journaliste indépendante.

prispievatel

Êtes-vous vu(e) comme le ou la virtuose de votre open-space ? Le cador du clavier ? La maestra du bureau ? Si ce n’est pas le cas, peut-être n'avez-vous simplement pas encore trouvé votre « zone de génie ». Ce fameux espace dans lequel vous excellez naturellement, qui vous permet d’accomplir des prouesses professionnelles avec une aisance et un plaisir déconcertants. Mais cette « zone de génie », est-ce un mythe ? Et si elle est bien réelle, comment la repérer… et y rester ?

Concept à la mode ou réalité ?

L’irrésistible concept de la « zone de génie » a fait une entrée fracassante dans le domaine du développement personnel en 2010, grâce à Gay Hendricks et son ouvrage The Big Leap (ou Le Grand Saut pour les adeptes de la baguette et du béret) aux éditions J’ai Lu. Pour l’auteur, cette zone serait « l’intersection entre vos talents uniques, vos passions et vos forces ». Autrement dit, c’est l’art de « s’engager dans un travail pour lequel vous avez un don naturel, utilisant des compétences innées plutôt que simplement acquises ».

Près d’une décennie et demie plus tard, le concept a résisté à l’épreuve du temps et aux fluctuations des tendances en matière de développement personnel et professionnel. On pourrait pourtant lui reprocher sa rigidité, remettre en question son universalité, pointer du doigt sa sincérité presque naïve et loin des réalités concrètes du monde professionnel… mais non. Bien rares sont les détracteurs qui osent s’opposer ouvertement à ce concept.

Car finalement, que l’on cherche désespérément son « Ikigaï », son « dharma » ou son « logos », il s’agit simplement de trouver sa voie, son chemin personnel, cet espace dans lequel il est possible de trouver du sens et de briller avec aisance, et où le travail ne rime plus avec corvée. Alors, comment le trouver ?

À la conquête de votre « zone de génie»

Pour commencer, vous êtes en droit de vous poser la question : a-t-on tous une zone de génie ? Certains sont-ils destinés à errer dans les méandres de la médiocrité, bloqués devant une formule Excel inachevée, les yeux vides, un café froid à la main ? Pour Gay Hendricks, la réponse est (évidemment) « non ». Cette zone existerait pour chacun, et la clé serait de s’engager dans une introspection honnête pour la découvrir.

Pour l’auteur, il existerait d’ailleurs quatre zones : la zone d’incompétence, de compétence, d’excellence et de génie. Et si ces deux dernières se traduisent par des activités dans lesquelles il est possible d’exceller sans effort, la zone d’excellence - elle - n’apporterait peu ou plus de satisfaction. Vous pouvez ainsi être un chef de projets reconnu, vanté pour sa rigueur et ses capacités d’organisation… mais trouver un plaisir limité dans ce rôle, tout en regardant avec envie sur l’un des profils créatifs que vous encadrez, dont vous savez que le quotidien vous correspondrait davantage. Et si elle était là, votre zone de génie ? Malheureusement, beaucoup stagneraient dans leur zone d’excellence, convaincu d’avoir atteint leur potentiel.

Alors, qu’est-ce qui empêcherait les travailleurs des temps modernes d’atteindre leur Graal ? Dans les premiers chapitres de The Big Leap, Gay Hendricks explore le paradoxe universel de la résistance innée au bonheur, révélant comment la peur - qu’elle soit de réaliser son plein potentiel, de subir le rejet, ou encore de faire face à l’échec - entraverait cette quête. Chacun disposerait ainsi d’un « thermostat interne » qui déterminerait le niveau d’amour ou de succès qu’il s’autorise à bénéficier. Une fois le niveau dépassé, l’humain mettrait en place des actions d’auto-sabotage, permettant de revenir dans la zone familière de confort dans laquelle il se sent en sécurité.

Alors, avant de se poser les questions qui permettraient de découvrir cette zone de génie, il s’agit de dissiper le pouvoir oppressant de ces peurs, de ce plafond de verre produits par le sentiment d’imperfection, la peur de la déloyauté et de l’abandon, du fardeaux, du succès, ou encore les réticences à surpasser les autres.

Alors, seulement, il serait possible de s’interroger avec sincérité : quelles sont les choses que vous aimez faire longtemps, sans ressentir ennui ou fatigue ? Quel est le talent qui vous distingue des autres ?

Quelques pistes pour guider cette réflexion :

  • Identifiez vos passions et intérêts : explorez ce qui vous passionne, ce qui vous « fait vibrer » (comme on disait dans les années 2000). Des questionnaires d’auto-évaluation de carrière, des bilans de compétences ou certains tests peuvent vous donner des premières pistes intéressantes pour explorer vos préférences et vos valeurs.

  • Reconnaissez vos talents et forces : identifiez vos compétences naturelles, ce que vous faites exceptionnellement bien. Et si vous organisiez votre propre évaluation 360°, en interrogeant vos collègues et vos proches sur les qualités qu’ils vous reconnaissent ?

  • Réfléchissez à vos succès passés : tenez un journal de réussites où vous documentez les moments où vous vous êtes senti particulièrement épanoui, en analysant les compétences et les circonstances qui ont contribué à ces succès.

  • Surmontez les croyances limitantes : identifiez et transformez les pensées négatives qui peuvent entraver votre exploration de nouvelles opportunités. Parfois, il est important d’envisager des outils de coaching ou de thérapie cognitivo-comportementale pour identifier et transformer ces croyances.

  • Créez une vision idéale : c’est le moment de sortir les crayons ! Utilisez des techniques de visualisation créative, créez des tableaux de vision visuels ou rédigez une lettre au « vous du futur », décrivant votre vie idéale. Bref, visualisez votre vie et carrière rêvées, en notant les détails pour utiliser cette vision comme boussole.

  • Alignez-vous avec vos objectifs et valeurs : assurez-vous que vos objectifs et valeurs sont en harmonie avec votre zone de génie. Vous pouvez, par exemple, réaliser une « cartographie de valeurs » : sur une feuille de papier, énumérez vos principales valeurs, puis classez-les par ordre d’importance. Alors, vous pourrez explorer la connexion entre ces valeurs et la vision idéale que vous avez dépeint. Le tout forme un ensemble cohérent ? Vous êtes sans doute sur la piste de votre zone de génie.
    Enfin, « passez à l’action », recommande Gay Hendricks. Une fois que vous avez identifié votre zone de génie et aligné votre vision, agissez concrètement pour vous rapprocher de vos aspirations. « Sortez de votre zone de confort pour saisir les opportunités qui vous conduiront vers l’abondance et le bonheur », complète-t-il.

Trouver sa zone et y rester, comme une moule à son rocher

Malheureusement, il ne suffit pas de trouver sa zone de génie pour y rester. Gay Hendricks alerte ses lecteurs sur la tendance à glisser vers les autres zones. Il partage ainsi plusieurs stratégies, plusieurs ancres, pour s’accrocher à sa zone du génie.

Notamment :

  • Pratiquer le « non éclairé » : à savoir, apprendre à dire « non », et créer un bouclier imparable contre les influences délétères. Un collègue vous propose un projet très important pour l’entreprise mais qui suppose de grignoter le temps que vous aviez prévu de dédier à un projet moins crucial mais plus aligné avec vos objectifs à long terme ? Next. En bref, concentrez-vous sur les tâches qui vous permettent de mettre en œuvre vos talents et de rester aligné avec votre objectif. Et évitez de vous disperser dans des activités qui ne contribuent pas à votre zone de génie… plus facile à dire qu’à faire, évidemment.

  • Accepter le soutien : Gay Hendricks souligne l’importance d’accepter le soutien des autres dans les domaines qui ne relèvent pas de votre zone de génie. Par exemple, en déléguant les tâches qui ne correspondent pas à vos forces, quand c’est possible.

  • Passer du « temps Newtonien » au « temps Einsteinien » : le temps est souvent source de stress. L’auteur invite à cesser de se cacher derrière le « manque de temps » et de l’assumer comme sa responsabilité, le créer et le gérer. Vivre dans le temps d’Einstein signifie reconnaître que chacun a les mêmes 24 heures par jour, et que s’approprier ce temps est essentiel pour la réussite.

Finalement, que l’on y croit ou non, la « zone de génie » reste une quête louable pour trouver un chemin vers un succès et un bonheur durables. Et l’auteur le rappelle : il ne s’agit pas de trouver sa zone et d’oublier le reste, mais au contraire de maximiser notre potentiel global sans sacrifier les autres compétences que nous possédons.

Article édité par Gabrielle Pedko, photo Thomas Decamps pour WTTJ

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