« Ciao les nazes ! » : comment trouver une alternance à l'étranger ?

21 dic 2023

9 min

« Ciao les nazes ! » : comment trouver une alternance à l'étranger ?
autor
Sylvain Guillet

Journaliste web

colaborador

Vous êtes apprenti et l’envie de poser vos valises hors de France vous titille de plus en plus ? Faire son alternance à l’étranger, c’est possible ! Il existe plusieurs solutions pour effectuer une période de formation au sein d’une entreprise située en Europe ou dans le reste du monde. Démarches, conditions, CV, entretien d’embauche… découvrons tous les conseils de Mila Elhamdi, coach en gestion de carrière et auteure du livre Le Petit Livre de l’entretien d’embauche (First Editions).

Réaliser son alternance à l’étranger : un tas d’avantages !

« Il faut voyager pour apprendre », disait Mark Twain. Les résultats d’une étude de la Commission européenne sur les effets de la mobilité sur les compétences et l’employabilité des étudiants ont démontré que le pourcentage des employeurs considérant une expérience à l’étranger comme importante pour l’employabilité a presque doublé entre 2006 et 2013, passant de 37 % à 64 %. Plus récemment, l’Institute of International Education (IIE) a demandé à près de 4565 Américains ce que leur a apporté leur expérience à l’étranger : 63 % des répondants partis au moins une année estiment que leur expérience à l’étranger les a aidés à trouver un emploi. Les trois quarts d’entre eux ont également noté une amélioration importante de certaines soft skills tels que l’adaptabilité, la connaissance de soi et la flexibilité au travail. Pour les entreprises avec un environnement international, c’est un réel atout : « De fait, s’il y a une expérience à l’international, on comprendra que le candidat a cette faculté d’adaptation et une réelle capacité à travailler avec une équipe multiculturelle et cosmopolite », explique Mila Elhamdi.

En tant qu’alternant, une expérience à l’étranger est indéniablement un atout pour votre future carrière. C’est d’abord un excellent moyen d’apprendre une langue et de la mettre en pratique dans un cadre professionnel. Dans un article consacré à l’impact des langues sur la carrière, nous rappelions que « 14% des offres totales publiées exigeaient un niveau d’anglais “correct” à “bilingue” ». Maîtriser une langue étrangère peut donc vous distinguer des autres candidats, mais aussi vous aider à décrocher un job dans une entreprise tournée vers l’international.

Par ailleurs, une alternance à l’étranger vous plonge dans un environnement culturel et professionnel inconnu, vous incitant ainsi à aiguiser votre curiosité, vos capacités d’adaptation et votre ouverture d’esprit. Enfin, c’est l’occasion d’apprendre des techniques, un savoir-faire propre au pays d’accueil. De quoi impressionner les employeurs lors de votre retour au bercail.

Quelles conditions pour effectuer son alternance à l’étranger ?

Avant de préparer vos bagages, renseignez-vous sur les modalités d’accès à une alternance à l’étranger. Avant toute chose, vous devez obligatoirement être inscrit en alternance en France, que ce soit en tant qu’apprenti sous contrat d’apprentissage ou en tant que salarié sous contrat de professionnalisation.
La loi Avenir Professionnel a élargi les possibilités en termes de mobilité international pour les étudiants, en ouvrant notamment l’alternance aux pays situés en dehors de l’Union européene.

Première chose à savoir : pour réaliser une alternance à l’étranger, vous devez d’abord être apprenti dans une entreprise en France, et donc être sous contrat d’apprentissage ou de professionnalisation avec celle-ci. Ce n’est qu’alors que vous pouvez demander l’accord de votre entreprise pour partir effectuer une partie de votre alternance dans une structure située hors de France. Il est possible de postuler dans n’importe quelle entreprise à l’étranger, tant que vous obtenez l’accord de votre employeur en France pour effectuer ce séjour au sein de la structure choisie. On appelle cela une « mobilité » à l’étranger, et celle-ci est d’une durée maximale de un an. Bien évidemment, durant cette période d’alternance à l’étranger, vous suspendez votre présence aux cours théoriques de votre CFA (à part si vous arrivez à voyager à la vitesse de la lumière).

Il existe deux types de mobilités à l’étranger, qui ont des conséquences différentes sur les modalités de votre contrat en tant que salarié-apprenti :

  • Mobilité dite « courte », c’est-à-dire d’une durée moins de quatre semaines : si vous partez moins d’un mois à l’étranger, votre contrat reste inchangé. Vous dépendez de votre entreprise française même en étant à l’étranger. C’est donc elle qui paie votre salaire, assure votre protection sociale, etc.

  • Mobilité dite « longue », d’une durée supérieure à un mois : dans ce cas-là, le contrat signé avec votre entreprise française est mis en veille durant toute la durée de votre séjour à l’étranger. Vous signez un nouveau contrat avec votre employeur à l’étranger, qui devient alors responsable de vous en matière de santé, sécurité au travail, rémunération, durée du travail, repos hebdomadaire et jours fériés.

Bon à savoir : Vous pouvez très bien effectuer votre séjour à l’étranger dans un établissement de formation (école, université…), et pas nécessairement au sein d’une entreprise. Parfait pour ceux qui veulent donner plus de poids à la théorie qu’à la pratique !

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Dans quels pays peut-on effectuer une alternance ?

Depuis le passage de la loi Avenir Professionnel en 2018, l’alternance à l’étranger n’est plus réservée aux pays de l’Union européenne. Vous pouvez donc vous former n’importe où sur la planète, tant que vous trouvez une entreprise qui accepte de signer une convention de mobilité, c’est-à-dire un accord signé qui stipule que ladite entreprise accepte de vous former pendant la durée choisie. Avant de choisir votre destination, pensez à bien vous renseigner sur les règles en matière de droit du travail dans le pays d’accueil. Vous pourriez parfois avoir de bien mauvaises surprises en termes de rémunération et de durée hebdomadaire de travail !

Nos conseils pour trouver une alternance à l’étranger

Le monde est tellement vaste qu’il peut être difficile de savoir par où commencer pour chercher une alternance à l’étranger. Voici quelques pistes qui devraient vous aider :

Faites des recherches et définissez vos objectifs

Au moment de choisir le pays dans lequel vous souhaitez réaliser votre alternance, ne basez pas vos critères sur la beauté des paysages et la qualité de la gastronomie locale, mais sur les possibilités en termes d’emploi : « Il est important de bien comprendre le bassin d’emploi, avec ses enjeux, ses problématiques et ses contraintes. Il y a des pays qui vivent une forte progression du secteur bancaire, alors que dans d’autres il est en phase de transformation. Pareil pour le monde du digital : il y a des enjeux qui peuvent être différents d’un pays à l’autre », avertit Mila Elhamdi. Au-delà des opportunités, intéressez-vous à la culture du travail du pays où vous comptez faire une alternance. Ce serait dommage de vous retrouver dans la même situation que Amélie Nothomb dans Stupeur et tremblements (Ldp Litterature, 2001), qui a découvert à ses dépends les particularités des codes nippons au sein d’une entreprise japonaise.

Par ailleurs, soyez cohérent avec vos objectifs professionnels lors du choix de votre alternance : « Demandez-vous quelle est l’alternance idéale pour vous. C’est super de réaliser une expérience à New-York, mais si pendant vos 6 mois d’alternance vos missions ne sont pas intéressantes ou conformes à votre cursus ou à vos ambitions, il peut y avoir un gros décalage », prévient Mila Elhamdi.

Trouver une entreprise française à l’étranger

Il existe de nombreuses entreprises françaises qui sont installées hors de la métropole ou qui possèdent des antennes à l’étranger. D’après l’Insee, en 2019, les firmes multinationales françaises (hors secteur bancaire et services non marchands) possédaient 48 200 filiales à l’étranger. Il y a de quoi faire ! Mais comment s’y prendre pour obtenir la liste de ces structures ? Voici quelques ressources qui devraient vous aider à attaquer vos recherches :

  • Business France, qui accompagne les entreprises françaises à l’international, possède des bureaux partout dans le monde. Le site Web possède un moteur de recherche qui permet de trouver rapidement les coordonnées des antennes locales qui vous intéressent.

  • La French Tech est un mouvement qui a pour but de faire rayonner les start-ups françaises à l’international. Leur écosystème est actif dans de nombreux pays et possède des sites Web dédiés pour les villes les plus dynamiques (Barcelone, Londres,Berlin… ) L’équivalent de la French Tech pour les entreprises industrielles est appelé [French Fab].

  • Les Chambres de Commerce et d’Industrie (CCI) à l’étranger et les ambassades sont également d’excellents interlocuteurs pour entrer en contact avec les entreprises françaises locales.

Les sites dédiés à la recherche d’emploi (Welcome to the Jungle, Indeed…) peuvent aussi vous aider à dénicher des offres d’alternance à l’international. Sans oublier l’incontournable réseau social professionnel LinkedIn : « LinkedIn permet non seulement de réseauter et d’augmenter sa visibilité, mais aussi de se connecter aux bonnes personnes, notamment aux ressources humaines des entreprises qui vous intéressent », explique Mila Elhamdi.

Dénicher une alternance dans une entreprise qui n’est pas française

L’alternance à l’étranger n’étant pas réservée aux entreprises marquées du coq gaulois, devenir apprenti dans une structure d’une autre nationalité peut être une expérience enrichissante. Si vous visez un pays en particulier, faites la liste des sites de recherche d’emploi les plus connus (donc là où il y a potentiellement le plus d’offres). Par exemple, en Angleterre, ce sera Reed.co.uk ou ou Jooble.org, alors qu’en Irlande, il faudra plutôt vous rendre sur IrishJobs.ie ou Jobs.ie. « Visitez aussi les onglets carrière des entreprises, à condition de maîtriser la langue utilisée par celle-ci », ajoute Mila Elhamdi.

Au sein de l’Union européenne, le réseau EURES (European Employment Services) met également des conseillers à disposition des personnes qui veulent tenter la mobilité professionnelle au sein de l’espace économique européen. L’EURES possède un portail virtuel dédié à la recherche d’emploi, sur lequel plus de 4 millions d’offres sont disponibles. Il est possible de filtrer votre recherche selon le type de contrat souhaité (ex : apprentissage), la langue parlée pour le poste, le pays d’accueil, etc.

Partir à l’étranger avec le programme Erasmus+

Saviez-vous que Erasmus+ n’est pas uniquement réservé aux étudiants ? En effet, ce programme d’échange mis en place par l’Union européenne permet également aux apprentis de bénéficier d’une bourse lors de leur alternance à l’étranger, afin de financer les transports, l’alimentation, l’hébergement… Le montant de la bourse dépend du coût de la vie dans le pays d’accueil.

Erasmus+ finance une partie de votre alternance dans les 27 pays membres de l’Union européenne, ainsi qu’en Islande, Liechtenstein, Macédoine du Nord, Norvège, Serbie et Turquie. Pour en profiter, vous devez avoir moins de 30 ans et votre CFA doit participer au programme en ayant signé la charte Erasmus.

Apprenez la langue locale

Même si ce n’est pas obligatoire, il est préférable d’avoir un niveau suffisant dans la langue officielle où se trouve votre pays d’accueil. Néanmoins, nombreuses sont les entreprises internationales au sein desquelles l’anglais est suffisant, car c’est la « langue des affaires » par excellence. De plus, certaines villes sont tellement cosmopolites qu’on peut se débrouiller dans la vie de tous les jours en maîtrisant uniquement la langue de Shakespeare. C’est par exemple le cas à Barcelone. Pour autant, rien de vous empêche de prendre des cours avant votre alternance pour bredouiller quelques mots de norvégien, catalan, roumain ou mandarin à votre arrivée. Cela facilitera votre intégration au sein de l’entreprise et du pays d’accueil, tout en donnant une bonne image de vous.

Faire un bon CV pour une alternance à l’étranger

L’art du CV n’est pas universel, il faut donc adapter ses règles de conception à l’étranger. La première erreur à ne pas commettre, c’est de le rédiger dans la langue de Molière : « Il ne faut pas postuler en français si on candidate pour un poste à Berlin », prévient Mila Elhamdi. C’est du bon sens, mais parfois les habitudes ont la peau dure. Cela dépend toutefois de l’entreprise, et surtout de la langue dans laquelle elle communique (la langue utilisée dans l’offre d’emploi constitue en ce sens un bon indice). Afin d’éviter de vous faire refouler, un CV en anglais + un CV en français (ou dans la langue locale) devraient faire l’affaire.

Mila Elhamdi conseille également de se renseigner en amont sur la meilleure façon de concevoir un CV impactant dans les pays où vous postulez : « Il faut comprendre les distinctions avec la France afin de bien se positionner sur le marché », suggère-t-elle. Dans notre article Postuler à l’étranger : comment faire le parfait CV en anglais ?, nous notions les différences entre un CV français et un CV anglais : il semblerait par exemple que dans les pays anglo-saxons, on donne davantage d’importance aux accomplissements détaillés et chiffrés, quitte à faire des CV sur plusieurs pages.

Au-delà du CV, « il faut appréhender les codes du monde du travail dans les pays où on souhaite travailler. D’un pays à l’autre, on ne va pas adopter la même posture », insiste la coach en gestion de carrière. Dans une vidéo consacrée aux différences entre le monde du travail en France et à l’étranger, on se rend compte qu’en Roumanie, l’expérience compte plus que le diplôme. Ainsi, si vous postulez dans ce pays, inutile de consacrer la moitié de l’espace sur votre CV à votre bagage académique.

Après le retour en France : comment valoriser son alternance à l’étranger ?

Vous voilà de retour en France, prêt à vous faire harceler par les recruteurs qui voudront s’arracher votre CV. Enfin, c’est ce que vous espérez. Mais la réalité est plus nuancée. Il ne suffit pas simplement d’afficher une expérience à l’étranger pour rendre votre profil attractif : « On a beau avoir occupé un super poste dans une belle entreprise à l’étranger, si les compétences et le déroulement de l’alternance ne sont pas suffisamment valorisés, cela ne fera pas une grande différence avec une alternance classique. », prévient Mila Elhamdi. Il est donc important de détailler vos réalisations, vos accomplissements, votre environnement de travail et les outils utilisés lors de votre alternance à l’étranger. C’est à vous de faire un travail de mise en lumière de votre expérience à l’étranger, et non au recruteur de le déchiffrer. S’il le faut, demandez à votre maître d’apprentissage de vous aider à valoriser votre période d’apprentissage.

Sachez aussi qu’à votre retour en France, vous pouvez faire valider vos acquis à l’étranger grâce au système européen de transfert et d’accumulation de crédits (ECTS, ou European Credits Transfer System). Votre formation et votre expérience à l’étranger sont donc reconnus en France, et sont comptabilisés sous forme de crédits. Un semestre de formation équivaut à 30 crédits ECTS, 25 à 30 heures de travail vous donnent un crédit, etc. Cela vous permet alors d’obtenir une qualification ou un diplôme français même si vous avez effectué une partie de votre formation hors du territoire national. Si vous avez effectué votre alternance dans un pays situé en-dehors de l’Union européenne, renseignez-vous auprès de votre CFA pour connaître les possibilités en matière d’équivalence.

Mila Elhamdi donne un dernier conseil à ceux qui veulent trouver une alternance à l’étranger : « Prenez les devants ! N’attendez pas le dernier moment pour candidatez, et définissez vos objectifs en amont. », conclut la coach. Et nous, on vous dit : Good luck ! Buena suerte ! Viel Glück !

Article édité par Gabrielle Predko, photographie par Thomas Decamps

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