9 signes que votre relation au travail devient toxique

22 juin 2023

6min

9 signes que votre relation au travail devient toxique
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Au début, c’était l’idylle. Le job parfait sous tout rapport : séduisant, stable, épanouissant… Puis, quelques détails vous ont mis la puce à l’oreille. Cette capacité qu’il avait à vous accaparer, ses promesses non suivies d’effet, ses humeurs changeantes et toute cette énergie qu’il vous pompe au quotidien. Bref, tout doucement, votre « grand amour » professionnel a viré au toxique. Heureusement, notre experte du Lab Lucile Quillet identifie ces neuf signes d’alerte qui doivent vous inciter à poser vos limites dans votre rapport au travail.

1. Vous ne comptez plus les promesses non suivies d’effet

Il vous parlait « promotions », vous susurrait à l’oreille de belles missions, vous promettait monts et merveilles… De belles paroles et si peu d’actes. « La relation toxique est une relation asymétrique, commente Lucile Quillet. Le rapport à l’autre n’est pas horizontal, ni égal. » Lorsqu’un collaborateur se voit promettre une situation meilleure, qu’on ne lui accorde finalement pas, il est placé dans un état d’attente, voire de dépendance. « Il y a dans toute relation des phases d’inconfort, reconnaît l’experte. Mais il n’est pas bon de s’habituer à l’inconfort. L’insatisfaction ne doit pas devenir une normalité. » Devant une demande restée sans réponse comme une promotion ou une mobilité, Lucile Quillet recommande de se fixer des limites. « Il faut poser des balises et des deadlines au-delà desquelles, la situation ne pourra plus durer. À trop tolérer l’inconfort, vous risquez de passer à côté de vos besoins fondamentaux et de faire la part belle à la frustration », conseille-t-elle.

2. Votre univers de travail ressemble à Secret Story

D’abord, il y a eu Marion, partie soudainement dans des conditions restées opaques. Puis Louison, la RH, avec qui il est impossible de parler aussi bien de qualité de vie au travail que de rémunération. Sans oublier Laurent qui ne dévoile rien de sa vie perso au bureau par peur de représailles. Votre ambiance de travail ressemble ni plus, ni moins à un triste remake de Secret Story version réalité. « Le non-dit est générateur d’inquiétudes, de stress, d’interprétations et de suspicions, analyse Lucile Quillet. Que ce soit dans le cadre privé ou professionnel, il est très important de connaître les règles du jeu. » La culture de votre entreprise manque de transparence ? Vous ne comprenez pas toujours les politiques internes ? « N’hésitez pas à demander des clarifications, incite l’auteure du livre Libre de prendre le pouvoir sur ma carrière. Vous êtes en droit d’exiger de votre manager d’éclaircir certains points ou de solliciter collectivement des explications. »

3. Vous faites face à du micromanagement

« Coucou, t’es où ? », indique le sms de votre manager à 8h15. 10h49, cette fois c’est une invitation agenda : « Point de mi-journée. » 16h00, la voix de votre manager résonne au bout du fil : « Ça avance comme tu veux ? » Votre manager sait tout, voit tout, est partout. « La relation toxique se caractérise par la confusion qui se crée entre la sphère intime et professionnelle, affirme Lucile Quillet. Les frontières se brouillent. » Plus elle est intense et intrusive, plus la relation professionnelle est pathologique. « La recherche de la traçabilité de l’autre révèle un cruel manque de confiance. Pour le collaborateur, le fait de devoir rendre des comptes en permanence est très infantilisant. Sans compter la perte d’efficacité et d’estime de soi que cela génère », constate notre experte. Pour sortir du cercle vicieux du micro management, elle recommande d’aborder le sujet avec le/la principal·e intéressé·e. « Il s’agit moins d’un problème de culture d’entreprise, que d’un problème managérial. Parler de ce qu’on ressent à son manager et les conséquences de cette attitude sur sa propre performance aura probablement un impact positif sur la relation de travail. Si possible, doublez cet échange par un mail pour garder une preuve écrite de ce malaise. »

4. « Work hard, play hard » est la devise de votre entreprise

« Avec moi, on ne s’ennuie jamais », avait-il promis. Une offre digne du scénario des Feux de l’amour avec une relation intense, passionnelle, celle qui implique que l’on sacrifie tout. Vous ne comptez plus vos heures passées auprès de lui. Pour son bonheur, vous seriez prêt à tout. « Sous couvert d’aimer ce que l’on fait, on devrait se donner sans compter, s’étonne Lucile Quillet. Ce type de culture d’entreprise, très plébiscitée par les startups, a pour conséquence d’absorber le collaborateur et de grignoter peu à peu son espace vital. » Pourtant, le travail n’a pas à être une passion dévorante. Pour éviter d’en arriver là, l’auteure suggère de fixer des limites et de s’y tenir. « Vous avez droit à la déconnexion, rappelle-t-elle. Il est essentiel de mettre la bonne distance avec son travail. On craint parfois de passer pour un rabat-joie. Pourtant, contre toute attente, savoir poser ses propres limites et ne pas se laisser déborder, contribue au respect et à l’admiration. »

5. Votre boîte est « une grande famille »

Une autre forme de relation toxique au travail réside dans la relation amicale que l’on tisse avec ses collègues. « La relation toxique naît de la charge affective que l’on met dans son travail », analyse Lucile Quillet. Afterworks, weekend d’intégration, ADN et culture d’entreprise, vous avez le sentiment d’appartenir à une tribu. « Le travail devient le lieu des confidences, du lâcher prise avec excès, des rumeurs et autres ragots, déplore l’experte. On cherche à être aimé, à s’intégrer et chaque fois que l’on décline un événement on craint d’être exclu. » On en oublierait presque que vous êtes là pour travailler… « Il faut accepter qu’on ne vienne pas au travail pour être aimé, mais pour s’accomplir professionnellement, insiste-t-elle. Notre besoin d’amour doit trouver satisfaction auprès de nos amis et de notre famille. » Mais comment parvenir au juste équilibre ? Lucile propose d’adopter la posture du « satellite » ou de « l’électron libre ». En clair, mettez-vous en orbite, prenez de la hauteur et de la distance.

6. Votre boss a ses têtes et ses humeurs

Du piédestal au bonnet d’âne, il n’y a qu’un pas. Mathias en fait régulièrement l’expérience. « Quand j’ai été recruté, raconte-t-il, j’ai senti que j’étais en odeur de sainteté. Mon manager me valorisait tout le temps devant les autres, il me prenait pour exemple, il m’emmenait en rendez-vous. À l’inverse, il avait ses têtes de turcs qu’il n’hésitait pas à engueuler ou à humilier en public. Un jour, je me suis aperçu que son estime des autres était instable. Il avait ses humeurs et, tour à tour, ça tournait. On peut être encensé un jour et, le lendemain, épinglé au mur de la honte. » Pour Lucile Quillet, le problème ne vient pas tant de l’autre, que de l’attention que l’on accorde au regard de l’autre. « Nous avons tous envie d’être aimé, chouchouté, apprécié et valorisé », assure-t-elle. Pour rester libre et ne pas souffrir d’un jugement tierce instable, elle préconise la prise de distance : « Lorsque vous analysez la situation, quittez le terrain de l’émotionnel pour revenir au factuel. De même que vous n’êtes pas au travail pour être aimé, vous n’êtes pas rémunéré pour servir de punching ball. À vous de poser vos propres limites. »

7. Vous appartenez à un clan très sélect

« On a beaucoup de chance », répète-t-on en boucle au sein de votre entreprise. D’être un salarié de cette boîte, de bénéficier d’un CSE, d’avoir une grosse rémunération, de travailler dans de beaux locaux, d’avoir une super cantine, du télétravail et une salle de sport… Bref, vous avez le meilleur job. Alors comment se plaindre ? « De nombreux avantages en entreprise sont accordés sans avoir été réclamés, constate Lucile Quillet. Pour autant, il est possible qu’ils ne vous conviennent pas. Il faut impérativement distinguer nos véritables besoins, c’est-à-dire notre part du gâteau, de ces avantages que j’appelle ces “petits cookies“ bonus qui ne nous rassasient pas. » Travailler dans une entreprise où vous vous sentez privilégié·e ne doit pas vous priver de satisfaire vos besoins fondamentaux. « Si vous avez besoin de plus de télétravail ou d’un salaire plus élevé, parlez-en à votre manager, insiste-t-elle. Vous n’êtes pas en train de solliciter une faveur ou de jouer le capricieux s’il s’agit pour vous d’un besoin fondamental. »

8. Sans vous, la boîte serait perdue

Marie est avocate collaboratrice depuis quatre ans dans un petit cabinet. Calendrier des audiences, permanences, rendez-vous client, conclusions à rédiger… « Grosso modo, je suis sur le terrain, tandis que mon boss fait entrer la clientèle, résume-t-elle. Je ne compte plus les fois où j’ai dû conclure dans un dossier ou aller plaider une affaire en last minute. L’associé ne cesse de me dire que, sans moi, il serait perdu. » Il peut être flatteur d’être perçu·e comme un « pilier ». Mais, vous voyez la charge mentale qui se cache à l’ombre de cette métaphore ? « Le burn-out est droit devant, assure Lucile Quillet. Évidemment, on dira de vous que vous êtes “quelqu’un qui a les reins solides“. Mais les applaudissements ne se mangent pas, ce n’est pas une reconnaissance suffisante ! Car à la fin de la journée, malgré la surcharge de travail accomplie, vous n’avez pas gagné plus d’argent et vous êtes exténué. » Pour s’extraire de ce rapport toxique au travail, l’experte préconise de revenir à sa fiche de poste. « Chacun est responsable de ses propres tâches, rappelle-t-elle. Si certaines tâches vous sont confiées et n’entrent pas dans votre fiche de poste, vous êtes en droit de renégocier votre salaire. »

9. Votre entreprise bat les records en burn-out et taux d’absentéisme

C’est étrange tout de même. Il y a comme une épidémie. Dans cette boîte, les salariés doivent être « un peu fragiles », car tout le monde part en congé maladie. Puis, il y a Louis, qui a fait un burn-out, Marcel qui « ne loupe jamais une occasion de se mettre en arrêt » et Géraldine qui « frise la dépression ». Sans compter, le procès « injuste » qui est fait au patron… La relation de travail n’est pas seulement toxique, elle est pathologique. « Il n’y a pas de mal à arrêter de se faire du mal », aime à dire Lucile Quillet. Quand le climat est trop toxique, il n’y a qu’une issue : fuir. « Cependant, la manière de partir est propre à chacun, précise-t-elle. Dans ces circonstances, je conseille de se faire aider d’un avocat et, au besoin d’un psychologue, pour défendre ses droits. Pour autant, certaines personnes ne sont pas prêtes à cela. Pour elles, partir au plus vite est le meilleur moyen de se protéger. »

Votre job comporte un ou plusieurs warning ? N’attendez pas de faire un burn-out ou de vous faire dévorer. Gardez en tête qu’une relation saine au travail est toujours dépassionnée et repose sur un rapport d’égalité. Prenez de la distance, tenez-vous en au factuel et posez vos limites. Après tout, ce n’est qu’un job !

Article édité par Mélissa Darré, photo par Thomas Decamps.

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