L'art de flatter en entretien d'embauche (sans en faire trop)

22 déc. 2023

4min

L'art de flatter en entretien d'embauche (sans en faire trop)
auteur.e
Conner Tighe

Experienced wordsmith and storyteller, leveraging a unique perspective and creative flair to craft compelling narratives and captivate audiences across various mediums.

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On dit souvent que la flatterie peut mener loin. Mais en entretien d’embauche, il faut avoir l’art et la manière. Un compliment placé au bon moment peut faire toute la différence, une pommade constante peut faire douter de votre sincérité, voire mettre en péril vos chances d’aller plus loin. Alors comment trouver le juste milieu, pour pouvoir exprimer votre enthousiasme et votre admiration, tout en restant professionnel et respectueux ? En envisageant la flatterie de façon stratégique, vous pourrez la transformer en véritable atout et faire votre petit effet en entretien.

« De mon expérience, en tant que candidat et en tant que recruteur, une touche de flatterie peut être un vrai tremplin, témoigne Alex Mastin, à la tête de Home Grounds. En revanche, il ne faut surtout pas en faire trop. » Pensez à l’empreinte que vous souhaitez laisser et la manière dont vous pouvez recourir aux compliments pour y parvenir. Par exemple, applaudir les grands succès de l’entreprise ou les choix du management montre que vous avez bien fait vos recherches sur l’entreprise. Vous pouvez aussi remercier la personne en face de vous pour ses questions pertinentes….

Mais attention, en entretien, la flatterie n’est pas sans risque. Selon Alex Mastin, il faut savoir la jouer finement et commencer par respecter deux règles si l’on veut éviter le fiasco :
« Pour avoir un impact positif, un compliment doit être personnalisé et… sincère. En faire trop, c’est foncer droit vers le manque de franchise, réel ou apparent, et perdre l’autre pour de bon. Si vos éloges paraissent fausses, c’est un signal d’alarme direct pour votre interlocuteur, qui risque alors de vous disqualifier, ou pas loin. » On évite d’aller sur le terrain personnel. Les remarques sur l’apparence physique de la personne, par exemple, peuvent la mettre mal à l’aise. Concentrez-vous uniquement sur le professionnel. Lorsque vous faites un compliment, soyez spécifique : la précision est un signe d’authenticité.

Faites des compliments personnalisés

Pour que vos compliments sonnent vrai, Alex Mastin conseille de les adapter à la personne que vous avez en face de vous et au poste que vous briguez. « Par exemple, dans un service RH, vous pouvez louer la culture de l’entreprise. Dans un service marketing, vous pouvez féliciter votre interlocuteur sur une campagne réussie… »

Les compliments ciblés montrent que vous accordez de l’attention aux détails, que vous avez fait vos recherches et que vous avez vraiment envie de travailler dans cette boîte. C’est une forme de flatterie qui peut faire bonne impression sur la personne qui vous reçoit. Bethan Winn, formatrice en pensée critique et compétences interpersonnelles, conseille cependant de veiller au vocabulaire que vous employez, de ne pas faire de compliments d’ordre personnel et d’éviter tout comportement tactile. Mieux vaut vous concentrer sur ce qui touche à l’entreprise et au poste pour lequel vous postulez. Bien entendu, toute posture qui pourrait être considérée comme inappropriée ou même sexualisée est à proscrire. Bethan Winn rappelle que l’art de tisser un contact humain peut être différent d’une culture ou d’une personnalité à l’autre. Il existe cependant des gestes universels qui, au-delà des différences, permettent de créer du lien, comme le fait de sourire, de regarder l’autre dans les yeux ou d’évoquer des aspects positifs (chez la personne ou dans l’entreprise) concrets.

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Pas facile de savoir comment trouver un terrain commun sur lesquels baser vos compliments. Sally Dillon, consultante RH au Revolution Consulting Group, explique qu’il existe quelques pistes pour les identifier. La première commence, avant l’entretien, par des recherches.
Préparer vos questions en amont est déjà un bon moyen de montrer que vous n’êtes pas là par hasard. Votre intérêt pour l’entreprise et le poste est un riche terreau pour les échanges. Renseignez-vous aussi sur le secteur et ses grandes tendances, pour témoigner à la fois de votre expertise (même si elle est relative) et de votre passion. « Un entretien doit être une conversation et aller dans les deux sens », observe Sally Dillon. N’oubliez bien sûr pas de remercier la personne pour cet échange et de demander quand vous devriez avoir un retour.

Préparez-vous à répondre aux (habituelles) questions sur vos points forts et faiblesses, votre motivation, et à expliquer en quoi vous êtes la bonne personne pour ce poste. Choisissez bien vos mots. « Vous ne connaissez ni la personne que vous avez en face de vous ni son degré de tolérance à la flatterie, rappelle Damian Birkel, qui a fondé le Professionals In Transition Support Group. Si vous faites un compliment sur la personne, sa tenue ou les bureaux, faites court et avec retenue. » Selon lui, les « beaux parleurs » peuvent donner l’impression d’être finalement en position de faiblesse (car ils ont vraiment besoin de ce job), pas très sincères ou prêts à tout pour parvenir à leurs fins. Bien souvent, la flatterie excessive est le fruit d’une nervosité exacerbée par le contexte. Damian Birkel invite les candidats à se recentrer sur eux, à faire des réponses concises et à se laisser porter par la personne en face, car c’est elle qui mène l’entretien, et non l’inverse. C’est un bon moyen de contenir votre anxiété et donc de prévenir tout excès de courbettes et compliments.

Trop de compliments tue le compliment

Si vous lui servez de la louange à chacune de ses paroles, votre interlocuteur peut avoir l’impression que vous cherchez à le manipuler – ce qui n’est pas l’idéal quand on convoite le poste de ses rêves. Pour que les compliments ne tombent pas comme un cheveu sur la soupe, Damian Birkel recommande avant tout de :

  • Construire du lien durant toute la conversation.
  • Montrer en quoi vous êtes la « réponse » aux besoins de l’entreprise.
  • Valoriser votre expérience et vos compétences transverses, celles que vous pourrez facilement mettre au service du poste.

La flatterie peut s’avérer un outil précieux pour créer un rapport humain plus authentique et montrer que vous êtes vraiment content d’être là. Mais attention, cela doit rester un outil pro et bien manié. Il existe toujours une (voire plusieurs) dynamique de pouvoir entre la personne qui postule et celle qui recrute : tenez-en compte dans la manière dont vous faites vos compliments. Ces derniers ne doivent pas vous servir à exploiter ou créer le rapport de force : un compliment est un outil, pas une arme.

Flattez, mais restez pro

Comment bien flatter, à savoir complimenter l’autre tout en restant pro jusqu’au bout des ongles ? Christa Reed, Head of Job Market Research chez JobSearcher, cite cinq règles :

  1. Pensez au contexte : le cadre, l’objectif de l’interaction, la ou les personnes présentes. Les compliments seront-ils de bon ton ? Posez-vous la question, car la réponse n’est pas toujours « oui ».

  2. Soyez sincère. Restez dans une posture assez authentique et dosez bien ce que vous dites. Privilégiez les compliments précis, par exemple sur le travail de la personne ou ce qu’elle apporte à l’entreprise.

  3. N’en faites pas trop. Comme nous l’avons dit, trop de flatterie peut confiner au manque de sincérité ou à la manipulation. Pensez bien à ce que vous allez dire avant de vous lancer : cela doit être précis, pertinent et approprié.

  4. Faites preuve de respect. Si compliments et respect peuvent être liés, ce n’est pas la même chose. Le respect (de votre interlocuteur et de son travail) passe par le fait de reconnaître la valeur et l’intérêt de la personne en face de vous, d’écouter ce qu’elle expose et faire des réponses constructives.

  5. Restez dans le professionnel. Compliment ou pas, votre comportement doit rester exclusivement professionnel. On évite donc le terrain plus détendu ou informel.

Article traduit par Sophie Lecoq ; Photo de Thomas Decamps

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