Pour développer votre leadership... Taisez-vous !

16 oct. 2023

5min

Pour développer votre leadership... Taisez-vous !
auteur.e
Sarah Torné

Rédactrice & Copywriter B2B

contributeur.e

En quoi le silence et le calme transforment-ils le leadership ? Comment apprendre à se taire pour mieux écouter et mieux décider ? Voici les 4 conseils du coach Mathieu Thomé.

Il fut un temps où le monde de l’entreprise était le royaume des orateurs charismatiques, des dirigeants au discours percutant et des leaders qui savaient imposer leur volonté avec autorité. Le bruit, l’agitation et la compétition pour faire entendre sa voix semblaient être les clés du succès. De nos jours, un leader efficace n’est plus celui qui sait parler le plus fort, mais plutôt celui qui sait quand se taire, écouter avec attention, et « respirer » avant de prendre des décisions éclairées. Découvrez comment ajouter le silence et le calme à votre leadership, avec les conseils éclairés de notre expert, Mathieu Thomé, coach, facilitateur et co-fondateur de Kalima.

Le silence et le calme, les nouveaux atouts des leaders

Autrefois perçus comme les caractéristiques des personnalités introverties, le calme et le silence sont aujourd’hui des qualités que partagent les leaders exemplaires. Pourquoi y voir les soft skills des meilleurs décideurs ?

  • La réflexion stratégique : le silence n’est pas seulement d’or, il est stratégique. Lorsqu’un leader se retire dans le calme, il peut prendre du recul et se connecter avec ses pensées profondes. Une étude d’Abeer Imam et Do-Yeong Kim (Current Psychology - 2023) a d’ailleurs montré que « le silence, lorsqu’il est utilisé positivement, peut résoudre des problèmes potentiels ». Selon Mathieu Thomé, s’accorder ce type de respiration, « au moins 5 minutes par jour », favorise une réflexion plus claire et la capacité à envisager des solutions innovantes.

  • L’importance d’écouter : « Il existe en nous un bon et un mauvais silence. Le bon silence, c’est celui de l’écoute, de l’ouverture de l’âme  », explique le poète Claude Vigée. Lorsque nous nous taisons, nous ouvrons la porte à une écoute active. Cette qualité est indispensable pour comprendre les enjeux auxquels votre équipe est confrontée. L’étude d’Abeer Imam et Do-Yeong Kim souligne comment le silence, notamment le « silence prosocial » (qui est délibéré et motivé par des raisons positives), peut aider à renforcer les comportements positifs au travail. Ici, il n’est pas signe de passivité, mais devient un outil puissant pour renforcer la communication et la prise de décisions collectives.

  • La sérénité dans la décision : la prise de décision est l’une des facettes les plus cruciales du leadership. Un leader serein est capable de prendre des décisions éclairées, débarrassées de l’influence des émotions impulsives, y compris dans des situations de stress. Leur capacité à rester constants, même sous pression, renforce l’engagement de leurs collaborateurs et la stabilité de l’organisation. L’étude mentionne notamment l’exemple du capitaine Chesley Sullenberger, qui a atterri en urgence sur l’Hudson en 2009. Dans un moment de crise, sa capacité à instaurer un sentiment de sécurité psychologique parmi son équipe, tout en faisant preuve de silence et de calme, est un exemple emblématique de leadership.

  • Un cercle silencieux… vertueux : le calme n’est pas qu’une affaire d’attitude, c’est aussi un gage de confiance. Les leaders qui gardent leur sang froid dans des situations tendues inspirent non seulement la confiance, mais encouragent aussi un silence prosocial, où les employés se taisent non par peur et pour retenir des informations, mais par respect et conviction.

En somme, le leadership silencieux est en train de redéfinir la manière dont nous considérons le pouvoir et l’efficacité dans le monde professionnel. Le silence n’est pas une absence de voix, mais une force qui permet aux leaders de guider leurs équipes et d’améliorer leur esprit stratégique.

Quels sont les défis du leader silencieux ?

Comme le souligne Mathieu Thomé, « le silence et la tranquillité dans les environnements professionnels sont cruciaux car non seulement ils favorisent la réflexion et la clarté de pensée, mais ils sont aussi facteurs de cohésion et de confiance ». Cependant, malgré ses avantages évidents, l’intégration du silence et de la tranquillité dans le leadership peut être entravée par plusieurs obstacles. Le premier ? « C’est la culture d’entreprise. Dans des environnements où l’activité constante et le bruit sont la norme (des “trading rooms” aux centres d’appels, en passant par les open spaces, ndlr), *le silence peut être mal perçu, associé à de l’inactivité ou de l’indécision. »

Sur le plan individuel, les leaders peuvent aussi rencontrer des résistances. « Un leader peut rencontrer des résistances internes par rapport à de fausses croyances, la peur du jugement, ou un sentiment d’inconfort face au silence », précise l’expert. Au niveau collectif, il peut y avoir une résistance au changement culturel, car « le silence peut être perçu comme embarrassant ».

Un autre défi réside dans le manque de formation et de sensibilisation. Les formations des managers et leaders se concentrent souvent sur le développement de compétences techniques, la gestion de projet ou l’amélioration des performances. Le silence et la tranquillité sont rarement au cœur de ces programmes. Ces compétences, pourtant essentielles, nécessitent une éducation spécifique.

Même en reconnaissant l’importance du silence et du calme, vous pourriez vous sentir démunis face à la mise en pratique de ces concepts dans votre gestion quotidienne : « Comment puis-je être silencieux sans paraître distant ? », « Comment puis-je introduire des moments de calme dans un agenda déjà surchargé ? » ou encore « Comment favoriser un environnement de travail calme tout en restant productif ? ». Face à ces interrogations légitimes, il est clair que la formation et la sensibilisation sont essentielles pour vous aider à naviguer dans cette nouvelle dimension du leadership.

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Mise en pratique : 4 conseils pour cultiver le silence et le calme au quotidien

Pour maîtriser l’art du leadership silencieux, il existe des pratiques et des outils concrets. Mathieu Thomé vous en partage 4.

1. Pratiquer la méditation et la pleine conscience

La méditation calme l’esprit, améliore la clarté mentale, et encourage une réflexion profonde. Elle peut devenir un outil puissant pour les leaders à la recherche de tranquillité et de clarté. Mathieu Thomé recommande de « commencer par des sessions quotidiennes de méditation, même de courte durée, telles que 5 minutes ». Il existe de nombreuses applications pour soutenir cette pratique. Notre expert conseille notamment Headspace, Calm ou Petit Bambou afin de guider les leaders dans leur pratique méditative.

2. Intégrer le silence dans les réunions

L’introduction du silence au début des réunions peut avoir des effets positifs sur la communication. Comme l’explique notre expert, « une ou deux minutes de silence avant de démarrer une réunion, un séminaire, un comité de pilotage ou de direction, peut apaiser les esprits et permettre aux participants de se recentrer ». Cette pratique favorise une communication plus constructive et une meilleure écoute.

3. Se former en communication non-violente (CNV)

La communication non-violente permet de favoriser des interactions respectueuses, empathiques et constructives entre les individus, en particulier dans des situations où il peut y avoir des désaccords, des conflits ou des tensions.

Elle se base sur 4 étapes :

  1. l’observation neutre des faits,
  2. l’expression des émotions,
  3. l’identification des besoins sous-jacents,
  4. et la formulation de demandes claires.

Selon Mathieu Thomé, la CNV « encourage la résolution constructive des conflits ».

Les leaders peuvent mettre en place la CNV de différentes façons :

  • en l’appliquant à leurs réactions émotionnelles,
  • en favorisant l’écoute active au sein de leur équipe,
  • en exprimant emphatiquement leur point de vue tout en reconnaissant les sentiments et les besoins des autres,
  • en facilitant la résolution de conflits,
  • et en organisant des formations en CNV pour leur équipe.

4. Se former à la facilitation de cercles de parole

Les cercles de parole sont des réunions où les participants s’assoient en cercle pour partager leurs pensées, leurs sentiments et leurs expériences de manière ouverte et respectueuse. Dans un cadre professionnel, ces cercles peuvent être utilisés pour favoriser la communication, la compréhension mutuelle et la résolution de problèmes au sein de l’équipe. Ils peuvent être intégrés dans le leadership en tant qu’outil de renforcement de la cohésion d’équipe, de développement de l’empathie et de gestion des conflits.

« Cette pratique encourage l’écoute active, la communication ouverte, et la création d’un espace où chacun peut s’exprimer librement », précise Mathieu Thomé. Notre expert, qui forme lui-même régulièrement des leaders à la facilitation de cercles de parole, souligne l’importance d’apprendre et de développer cette pratique avant de la mettre en place.


Article édité par Ariane Picoche, photo : Thomas Decamps pour WTTJ

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