La conformité en entreprise : entre corporate et oubli de soi ?

08. 6. 2018

6 min.

La conformité en entreprise : entre corporate et oubli de soi ?
autor
Ingrid Dupichot

Freelance Content Writer

En débarquant dans une nouvelle tribu, on se met sur son 31 pour paraître sous son meilleur jour, se faire apprécier et se fondre parmi ses nouveaux collaborateurs. On désire être conforme à l’image qu’on veut renvoyer et à l’idée que nos nouveaux collaborateurs ont pu se faire de nous. Si certains aiment être corporate, d’autres le perçoivent comme une obligation. Et, même après quelques années au compteur, il est rare que cette inclinaison à fiter avec ses collègues, son manager et les valeurs de l’entreprise, disparaisse entièrement.

Pourquoi ? Le besoin d’appartenance sociale de l’être humain, gage de sa survie émotionnelle et psychologique, explique cette nécessité d’être accepté au travail. Les salariés ont ainsi naturellement tendance à se conformer aux normes de l’entreprise. En effet, le cerveau vit l’environnement professionnel avant tout comme un système social. Pourtant les différences de chaque individu sont des atouts précieux et basculer du côté de l’oubli de soi peut être dangereux pour le collaborateur.

Welcome to the Jungle vous donne des clefs pour garder un équilibre entre effort d’appartenance à l’entreprise et nécessité de rester soi-même.

Corporate, conformité ou authenticité ? L’avantage de cultiver une part d’authenticité sur son lieu de travail

Le collaborateur (trop) “corporate” ringard ?

L’appellation “corporate”, fait initialement écho à l’idée d’être engagé au sein de son entreprise et de partager la culture d’entreprise, de faire jouer le collectif, bien s’intégrer, afin de rendre la vie de l’entreprise plus agréable. Autant de qualités louables et recherchées dans le milieu professionnel qu’on ne remet pas en question. Seulement, l’appellation peut être connotée d’une image assez lisse, sage, consensuelle et impersonnelle.

On ne sait pas quoi penser de ces profils. Tour à tour ils nous touchent, on les admire et parfois on trouve juste que c’est trop… presque fayot :

  • celui qui est de tous les évènements : les pots de départs, les sorties, les évènements sportifs organisés par l’entreprise … Il est souvent lui-même à l’initiative de la moitié d’entre eux,
  • celui qui est le meilleur sponsor de l’entreprise. Il fait une meilleure publicité pour l’entreprise que les cofondateurs et l’équipe marketing & communication réunis. Il est très fier d’y travailler, porte les sweats personnalisés, distribue des stylos à toutes ses connaissances…,
  • celui qui connaît sur le bout des doigts le langage de la boite, les process, les organigrammes. Il est en poste depuis 6 mois mais saura mieux que quiconque accueillir un nouvel arrivant.

L’excès de conformité freine l’engagement des salariés et leur capacité d’innovation

La limite est fine. Lorsque le sentiment d’appartenance et de sécurité prennent trop le pas, le conformisme devient préjudiciable pour vous et… peut être même pour votre entourage.

Les célèbres expériences menées dans les années 50 par le psychologue, Solomon Asch, révèlent que les sujets étaient disposés à prendre les mauvaises décisions pour continuer à être acceptés et en accord avec le groupe. Pourquoi ? Pour essayer de se conformer à ce que les psychologues appellent le statu quo. C’est-à-dire adopter le comportement que l’on croit approprié et fidèle aux attentes des autres :

  • en s’alignant sur le comportement des autres personnes occupant des fonctions similaires,
  • en portant la bonne tenue,
  • en exprimant son accord avec l’opinion générale des managers ou collègues à chaque fois,
  • en soutenant les mauvaises décisions de notre équipe,
  • en refoulant nos émotions pour exprimer celles qu’on pense appropriées,
  • en oubliant de prendre en compte les points de vue divergents des collègues.

Ainsi, en entreprise, de nombreux process, routines ne sont pas remis en cause car les personnes qui exercent une influence positive sont souvent celles qui connaissent les règles, les respectent mais savent aussi quand il convient de les contourner. À terme, une trop grande conformité pourra être synonyme, de lassitude, de désengagement au travail et de frein à l’innovation. Et l’habileté des salariés et de l’entreprise à performer à haut niveau en sera réduite.

Les avantages de la conformité

Pour autant, adhérer aux préférences, normes, valeurs professionnelles de ceux qui réussissent le mieux au sein de la tribu est gage d’épanouissement au travail! En effet, il est prouvé que l’engagement des collaborateurs, qui peut être lié au sentiment d’appartenance, est une source de performance de l’entreprise. Ainsi, partager la culture de l’entreprise pour laquelle on travaille améliore le quotidien professionnel. En témoigne l’engouement des entreprises pour la valorisation de leur culture interne et l’importance qui y est accordée par les candidats dans le choix de leur future tribu. À chacun de trouver le bon équilibre.

L’authenticité, source de confiance et de performance

« Aller à contre-courant nous donne confiance dans nos actions, ce qui nous vaut le sentiment d’être uniques et engagés et se traduit par des performances plus élevées et une plus grande créativité » Francesca Gino, auteur de l’article Rebel Talent publié dans la Harvard Business Review.

Certains décident de ne pas être (trop) corporate, de ne pas se conformer au valeurs de la direction par conviction. Et, ils peuvent même prendre confiance dans le fait d’être à contre courant. En effet, des études ont démontré que les employés révélant leur vraie personnalité sur leur lieu de travail étaient 16% plus engagés et plus dévoués à leur entreprise que ceux qui avaient le sentiment de devoir cacher qui ils étaient vraiment.

Pour cela, il faut avoir pris le temps de bien se connaître, d’examiner ce qui compte, nos valeurs, notre personnalité. Une fois que vous connaissez ce qui est important à vos yeux, il vous sera plus facile de gagner en assurance dans vos actions, décisions, communications, résoudre des problèmes ou même fixer des limites. Il sera également plus facile de donner du sens à ce que vous accomplissez et dites.

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Cependant, il reste surement plus facile d’adhérer à une entreprise dont la culture correspond à votre personnalité. Ceux qui ne rentrent pas dans le moule, que ce soit délibéré ou non, peuvent avoir un peu plus de mal à se faire accepter. Certains pourront être mal perçus surtout si ils sont radicalement différents, mais d’autres pourront au contraire être une source d’inspiration, de créativité et d’idées nouvelles.

Mais alors que faut-il faire ou éviter pour bien s’intégrer à sa tribu sans pour autant s’oublier ?

Les DO

Dépasser sa peur

Avoir le courage d’aller à contre-courant tout en recherchant de l’équilibre. L’exercice n’est pas si facile quand on sait que le sentiment d’être exclu provoque le même type de réaction dans le cerveau que celle causée par une douleur physique.

Cultiver ses différences et mettre en avant ses forces

Réfléchissez à ce qui vous rend unique et ce que vous faites de mieux. Interrogez-vous sur vos différences, votre vision et vos valeurs … Et surtout de quelle façon rester authentique au sein de votre tribu. Vous pourrez ainsi façonner au mieux votre job pour qu’il s’appuie sur vos forces et qualités et choisir la façon dont vous allez exécuter les missions qui vous sont assignées. Et, lorsqu’un problème se présente, discernez ce qui relève de votre compétence ou ce qui nécessite une aide des autres. Le résultat ? Vous serez confiant dans le fait que vous pouvez résoudre des problèmes seuls, et vous serez plus à même d’agir si quelque chose ne vous semble pas bien.

S’affirmer pour exprimer ce que l’on pense et ressent

N’hésitez pas à exprimer votre désaccord avec la décision d’un ou plusieurs collègues et à réfléchir à la façon dont vous aimez collaborer avec eux. Exprimez ce que vous ressentez et pas ce que vous pensez que vous devez ressentir. Rappelez-vous qu’aider l’équipe à prendre la bonne décision en étudiant les points de vue divergents est plus important que d’avoir raison ou tort. Faites alors preuve d’ouverture : entraînez-vous à voir les problèmes sous différents angles et perspectives et mettez en place une façon de fonctionner qui corresponde à tous.

Arrêter de courir après la perfection

Rappelez-vous que personne n’est parfait, même si vous êtes en admiration devant le succès de la tribu et les collaborateurs que vous venez de rejoindre. Autorisez-vous à prendre le risque de faire des erreurs et engagez-vous dans une non-conformité constructive.

Les DON’T

Oublier les valeurs et objectifs de l’entreprise

En embrassant la non-conformité, ne perdez pas de vue le but de votre entreprise, sa vocation, ses valeurs, ses objectifs. Attention, on ne vous encourage pas à devenir rebelle et anarchique non plus.

Se préoccuper du jugement des autres

Arrêtez de trop vous préoccuper de ce que les autres pensent. Passez moins de temps à tenter d’impressionner les autres. En effet, avoir trop besoin d’être aimé, éviter d’heurter les autres empêche souvent d’être honnête.

Se croire dans son salon, entre potes

Se recentrer sur son authenticité ne signifie pas être en vacances. Si vous avez un métier nécessitant de nombreux rendez-vous clients, il est probable que venir vêtu de votre plus bel assortiment short-sandale ne soit pas la solution. Et être assertif n’est pas synonyme d’émotions qui débordent. Gardez à l’esprit que la plupart des environnements de travail restent des lieux de compétitivité qui ne sont malheureusement pas toujours aussi bienveillants et feelgood qu’une conférence TED. Livrer tous vos points faibles au tout venant n’est pas recommandé. Il convient de choisir le moment opportun pour partager avec les autres le fond de votre pensée.

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Photo by WTTJ