Un job éthique et responsable dans le secteur de la mode ? C’est possible

06. 11. 2018

6 min.

Un job éthique et responsable dans le secteur de la mode ? C’est possible
autor
Clémentine Marot

Chef de projet marketing freelance dans les secteurs mode et art de vivre

« La mode est morte, vive le vêtement ». Cette phrase extraite du manifeste Anti_Fashion de la chasseuse de tendances Lidewij Edelkoort, symbolise une révolution en marche. Depuis quelques années, un vent d’éthique souffle sur la mode. La “slow fashion”, longtemps marginalisée, devient une véritable source d’inspiration pour les créateurs d’entreprise d’une part, et s’immisce doucement dans les stratégies de développement de grands groupes d’autre part. Un marché en plein bouleversement qui ouvre des perspectives nouvelles en matière d’emploi à une génération soucieuse d’allier profession et valeurs personnelles.

Un marché en plein bouleversement

Après des années d’euphorie sur fond de fast fashion et de surconsommation, le système mode semble aujourd’hui à bout de souffle. Une image écornée notamment par des drames, comme l’effondrement de l’atelier de confection textile du Rana Plaza au Bangladesh en 2013 faisant plus d’un millier de victimes et relayé par le documentaire à charge The True Cost (2015), ou encore un statut peu reluisant de seconde industrie la plus polluante au monde.

Conséquence directe de cette prise de conscience, les exigences des consommateurs changent elles aussi. La mode, avec l’alimentation, est sans doute l’industrie qui cristallise le plus d’attentes de la part d’acheteurs soucieux de consommer plus responsable, forçant peu à peu les acteurs du secteur à une profonde remise en question.

Exercer un métier éthique, un nouveau choix de carrière

Ce bouleversement sociétal bouscule également les envies des jeunes professionnels pour qui il devient de plus en plus indispensable de trouver un poste en accord avec leurs valeurs. Une étude menée en 2017 par Viavoice-ManpowerGroup fait apparaître que pour 43% des millenials, réussir sa vie professionnelle signifie donner un sens à ce que l’on fait et pourquoi on le fait. Un enjeu dont les écoles de mode semblent prendre peu à peu la mesure. Ainsi, depuis deux ans l’Institut Français de la Mode a mis en place une semaine dédiée au développement durable afin de permettre à ses étudiants d’échanger sur le sujet avec des acteurs du secteur. Cette année, Casa93, l’école de mode gratuite et ouverte à tous de Seine-Saint-Denis a collaboré avec le concept-store mode vegan Manifeste011 afin de créer une collection à partir de vêtements recyclés, quand les futurs ingénieurs textile de l’ENSAIT de Roubaix accueillaient au sein de leur école les Fashion Green Days, le premier forum de la mode circulaire.

Le boom des start-up mode éthique, un vivier d’emplois

Porte-étendard de la mode éthique, la marque de baskets Veja fut l’une des premières à déceler dès 2004, les prémisses de cette tendance et à construire un modèle autour de cet enjeu en intégrant l’écologie, le développement social et la justice économique au cœur même du produit, de la conception à la production. Un succès retentissant en France et à l’international, qui ne se dément pas et pousse encore aujourd’hui la marque à recruter sans cesse de nouveaux collaborateurs.

Ces dernières années, cet engagement pour une mode éthique et responsable est devenu un véritable levier d’innovation et de créativité pour de jeunes entrepreneurs. Des initiatives multiples qui représentent une mine d’opportunités professionnelles et la possibilité d’explorer différentes facettes de la mode durable et responsable.

Ainsi, du côté des marques de mode, les fervents défenseurs du Made in France pourront rejoindre les rangs du Slip Français qui s’attache à mettre en vedette ses sous-vêtements autant que les ouvrières passionnéesqui les confectionnent en région, quand les plus soucieux de l’environnement pourront par exemple postuler chez Faguo : la marque qui plante un arbre pour chaque paire de basket achetée stipule d’ailleurs dans ses offres d’emploi que la personnalité est essentielle _« au même titre qu’un investissement dans une mode responsable. » _En ligne, les plateformes comme Front de Mode, We Dress Fair ou La Refinery proposent elles-aussi des concepts innovants autour de l’engagement pour une mode plus durable.

Côté retail, les boutiques dédiées à la mode éthique fleurissent à Paris et dans toute la France, ouvrant là aussi tout un champ d’exploration pour des personnes désirant travailler dans le secteur. Les engagés à la fibre commerciale pourront frapper à la porte de Manifeste011, concept store de mode vegan dans le 11e arrondissement de Paris, ou se rendre dans l’une des boutiques Centre Commercial, concepts créés par les deux fondateurs de Veja et regroupant une sélection pointue des marques mode responsables les plus désirables.

Des métiers en mutation chez les grands du secteur

« Énormément de petites marques naissent actuellement avec un positionnement éthique, mais dans les grands groupes, les initiatives sont moins visibles. » - Clémence Cornet, Directrice Marketing chez Bocage

Du côté des grands acteurs de la mode, la transition vers un positionnement éthique reste pour le moment timide. Pourtant, certaines entreprises comme le chausseur français Bocage, enseigne du groupe ERAM, ont fait le pari d’entamer cette démarche induisant ainsi une transformation de certains métiers.

Un véritable défi, comme le confie Clémence Cornet, directrice marketing chez Bocage : « Énormément de petites marques naissent actuellement avec un positionnement éthique, mais dans les grands groupes, les initiatives sont moins visibles. Cette dimension a toujours fait partie de notre ADN, mais nous avons senti le besoin d’aller plus loin. Il a fallu redoubler de créativité pour trouver un modèle qui réponde aux nouvelles attentes des consommateurs tout en restant rentables et en croissance. »

Ainsi la marque a mis en place depuis septembre un nouveau service de location de chaussures, l’Atelier Bocage : les clientes souscrivent à un abonnement et reçoivent tous les deux mois une nouvelle paire de chaussures. À l’issue des deux mois, elles peuvent choisir de retourner leur paire, qui sera reconditionnée dans leurs usines et mise en vente sur une plateforme de seconde main, ou de la conserver en l’achetant à 40% de son prix de départ. « L’éthique est l’angle majeur de notre projet : c’est environnemental parce qu’on rallonge la durée de vie de notre produit, social car on revalorise les employés à travers l’évolution de leurs métiers, et sociétal, puisque l’on accompagne nos clientes pour qu’elles soient mieux dans leur peau et qu’elles gagnent confiance en elles… » explique Clémence Cornet.

Sur le front de l’emploi, cette évolution a poussé l’entreprise à adapter ses métiers en utilisant « des méthodes agiles, telle une start-up dans un grand groupe ». « Cela n’a pas encore généré d’embauches, en revanche, les missions de nos collaborateurs évoluent et sont revalorisées, c’est un aspect majeur de cette démarche. Par exemple, le rôle de nos conseillères de vente en boutique va évoluer puisque nous déployons actuellement un programme de formation pour qu’elles deviennent conseillères en style. De la même façon, des métiers renaissent, les chaussures sont reconditionnées après usage, il a donc fallu créer une nouvelle activité de cordonnerie dans nos usines. » poursuit-elle.

« Par exemple, le rôle de nos conseillères de vente en boutique va évoluer puisque nous déployons actuellement un programme de formation pour qu’elles deviennent conseillères en style. »

« De la même façon, des métiers renaissent, les chaussures sont reconditionnées après usage, il a donc fallu créer une nouvelle activité de cordonnerie dans nos usines. » - Clémence Cornet, Directrice Marketing chez Bocage

Si l’engagement éthique implique avant tout une redéfinition de certains métiers dans les grands groupes, certaines enseignes ont fait le choix de créer de nouveaux postes pour accompagner cette transition. C’est le cas, par exemple, des Galeries Lafayettes qui a désigné un directeur du développement durable, en charge notamment de porter son projet d’ampleur Go For Good, qui regroupe plus de 400 marques s’engageant pour une mode responsable.

Quelques conseils si l’on souhaite travailler dans la mode éthique :

  • Se tenir informé des actualités du secteur

Comme nous l’avons évoqué, la mode éthique comporte de multiples facettes : le made in France, le commerce équitable, la préservation de l’environnement… Pour en apprendre davantage et définir plus précisément vos envies, filez faire un tour sur SloWeAre, la plateforme dédiée à la mode éco-responsable : avec son guide des boutiques, son agenda des événements à ne pas rater, et ses articles sur les tendances du secteur, elle est une ressource idéale pour parfaire sa connaissance du marché.

  • Participer aux événements de la mode éthique

Arpenter les allées des salons consacrés au sujet reste l’un des meilleurs moyens de rencontrer directement les acteurs majeurs du secteur, d’échanger avec eux, voire de déposer un CV. Parmi les plus importants en France, on peut citer le Salon du Made in France, les Fashion Green Days ou encore Change Now, salon plus généraliste dédié au développement durable. Par ailleurs, de plus en plus de marques éco-responsables sont mises sur le devant de la scène lors des rendez-vous mode incontournables, tels que les salons Who’s Next,Première Classe ou Première Vision.

  • Garder un œil sur les offres d’emploi de Welcome to the Jungle

Et oui ! Veja, Le Slip Francais, ou encore Faguo : de nombreuses offres d’emploi chez des tribus mode engagées vous attendent actuellement ! On parie que cela pourrait vous intéresser…

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Photo by WTTJ

*Trouvez des offres d’emploi dans l’environnement et le développement durable.