« Rework », un guide pour réussir autrement

16 abr 2019

8 min

« Rework », un guide pour réussir autrement
autor
Laetitia VitaudLab expert

Autora y conferenciante sobre el futuro del trabajo

Rework est le sous-produit des activités de Fried et Hansson, Basecamp

Les auteurs de Rework sont également les fondateurs de Basecamp, société de développement de logiciels en ligne, fondée en 1999 à Chicago. Basecamp étant un outil de gestion de projet conçu pour aider les gens à travailler plus efficacement, ils considèrent leur livre comme un sous-produit de leur entreprise. Il a été écrit comme un livre sur le développement personnel où ils partagent tout ce qu’ils ont appris sur la productivité et le travail au cours de leurs activités professionnelles… et aussi destiné à motiver les lecteurs à se renseigner sur les produits qu’ils proposent. Jason Fried tient un blog renommé sur la collaboration, la productivité et la nature du travail. David Heinemeier Hansson (un Danois) est également célèbre pour la création du framework web libre Ruby on Rails (qui a de nombreux fans chez les geeks).

Sorti en 2010, le livre est instantanément devenu un best-seller. Il y a sept ans, son approche pragmatique de type small is beautiful (petit, c’est beau) des entreprises était novatrice. Le livre n’est certes plus tout jeune et l’effet de nouveauté s’est estompé, mais ses leçons restent extrêmement utiles pour toute personne qui s’intéresse à la gestion d’une entreprise, qui souhaite travailler avec une équipe et augmenter sa productivité.

Oubliez les vieilles théories sur les affaires et le monde réel

  • « *Le monde réel n’est pas un lieu, c’est une excuse. C’est une justification pour ne pas essayer.* » Rien ne peut commencer par des avertissements sur le « monde réel ». Rien de nouveau ou de révolutionnaire n’a jamais été réalisé par des personnes qui ont pris des conseils auprès d’experts du « monde réel ». Le « monde réel » est destiné aux personnes désespérées et pessimistes.
  • Ne vous concentrez pas trop sur la planification. La planification d’entreprise est toujours un fantasme. Elle est également incompatible avec l’improvisation. Il est dangereux de suivre aveuglément un plan qui ne correspond en rien à la réalité.
  • Small is beautiful (petit, c’est beau), pourquoi la croissance est-elle toujours le but ? La taille compte surtout pour ceux qui ont des problèmes d’ego surdimensionnés. Lorsque vous êtes petit, vous êtes agile et créatif. Vous pouvez également avoir une vie professionnelle heureuse. Alors, pourquoi ne pas continuer ainsi  ?
  • « Notre culture célèbre le concept de bourreau de travail. C’est stupide. Les bourreaux de travail adorent créer des problèmes pour passer du temps à les résoudre et être des héros. Le workaholism ou obsession du travail ne dure jamais bien longtemps. Cette attitude ruine le moral, crée un sentiment de culpabilité et une culture du présentéisme. C’est le contraire du travail productif  !

Go : commencez à faire quelque chose

N’attendez pas que les planètes soient alignées et que ce soit le moment parfait pour commencer quelque chose. Démarrer une entreprise ne demande pas beaucoup d’équipements. De nombreux outils et ressources sont disponibles gratuitement en ligne. Ces outils sont parfaitement adaptés à tous ceux dont l’entreprise démarre, et probablement à la plupart des personnes possédant déjà des entreprises plus matures. Vous n’avez pas non plus besoin d’énoncés de mission. Même leur nom sonne faux.

Pour commencer, vous n’avez pas besoin d’argent extérieur. Le revers de la médaille lorsque vous avez recours a de l’argent extérieur est que vous finissez par être au service de vos investisseurs plutôt que de vos clients. Dans l’économie de services, vous avez besoin de très peu de choses au départ. L’entreprise c’est vous. N’ayez pas peur de limiter votre taille. « À ce moment précis, vous êtes plus petit, plus rapide et plus flexible que vous ne le serez jamais ».

La méthode « Faites tout par vous-même » est la plus simple et la plus logique à mettre en œuvre pour commencer. Restez authentique à ce sujet. Vous ne ferez jamais plaisir à tout le monde, il est donc préférable de ne pas essayer. Vous devez « tracer une ligne dans le sable », être clair sur vos positions, même si cela vous éloigne de certaines personnes. Et de toute façon ce qui est ennuyeux ne se vend pas  !

Progressez : adaptez-vous aux contraintes et restez simple

Au fur et à mesure que vous passez à l’étape suivante avec votre entreprise, vous rencontrerez des obstacles. La manière la plus saine de résoudre ces problèmes est de comprendre et de s’adapter aux contraintes et de les utiliser pour être plus créatif. Les écrivains utilisent en permanence des contraintes pour stimuler leur créativité. Des ressources limitées vous aident à faire plus avec moins. Parfois, vous devez revoir vos ambitions à la baisse. Il vaut mieux faire moins, mais mieux. Nous cherchons souvent à en faire trop et trop vite et nous finissons par gaspiller beaucoup de ressources.

Il est essentiel de vous concentrer sur l’épicentre de votre entreprise. Quelle partie est essentielle, quel est le produit au cœur de votre activité  ? C’est l’épicentre. Trop s’intéresser aux détails dès le départ mène à la tenue de réunions à répétition, provoque des désaccords et des retards. « Fixez d’abord les bases et inquiétez-vous ensuite des détails. » Parfois, vous devez élaguer. Les menus des mauvais restaurants proposent souvent beaucoup trop de plats, ce qui provoque des problèmes de disponibilité et de stocks d’ingrédients qui amènent à une mauvaise qualité de service. Pour ces établissements, la première étape consiste à supprimer la moitié des plats proposés dans le menu et à se concentrer sur quelques spécialités.

Le cœur de votre entreprise ne doit jamais dépendre de tendances ou d’une mode. Il doit être construit autour de valeurs immuables, de choses que les consommateurs voudront toujours acheter dans cinq ans. Et une fois que votre cœur de métier est prêt, lancez-vous  ! Vous vous inquiéterez des détails superflus plus tard.

Productivité : concentrez-vous sur ce qui est essentiel… et dormez sur vos deux oreilles

Nous avons inventé de nombreuses façons de perdre du temps et d’être moins productifs. Nous pensons souvent que ces choses sont importantes pour notre travail même si elles ne le sont pas. Par exemple, nous passons beaucoup de temps à rédiger des rapports et des comptes-rendus que personne ne lit. Nous gaspillons notre temps en réunions stériles avec trop de participants. Gardons à l’esprit qu’une réunion d’une heure avec 12 personnes coûte aux entreprises 12 heures de travail, sinon plus en raison de la perte de concentration des participants.

L’interruption est l’ennemi de la concentration. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous travaillons souvent mieux tôt le matin ou tard dans le soir. Pourquoi ne pas créer des rituels pour éviter les interruptions, comme le jeudi silence ? Ou même simplement une période de la journée sans communication ? Il n’est pas nécessaire d’être connecté toute la journée !

« Assez bien c’est suffisant » : il est essentiel de trouver des moyens simples et efficaces de résoudre des problèmes. C’est ce qu’enseigne le judo : efficacité maximale avec un minimum d’efforts. Mais cette méthode ne donne pas de résultats aussi spectaculaires, il est donc important de laisser de côté votre désir d’être un héros. Il en va de même pour le sommeil. Manquer de sommeil est une très mauvaise idée. Pourtant, beaucoup de gens ont développé « un sens de l’honneur narcissique autour de la privation de sommeil ». Alors, dormez  ! Il n’y a rien d’héroïque à être fatigué ou malade !

Les listes de tâches à long terme et les planifications mensuelles trop ambitieuses sont contre-productives. Parce que personne n’arrive à estimer précisément le temps dont il aura besoin pour effectuer une tâche, et les longues listes finissent par être source de culpabilité. Travaillez une étape à la fois. De plus, en prenant de petites décisions vous ne pouvez pas faire de grosses erreurs.

Concurrence : affrontez vos concurrents, mais ne les copiez pas

Nous avons souvent tendance à vouloir faire plus que la concurrence : ajouter plus de fonctionnalités, proposer plus de quantité, etc. Il vaut mieux affronter la concurrence ! La bataille entre concurrents est une escalade sans fin, un peu comme la course aux armements pendant la guerre froide. De plus, ce processus entraîne une marchandisation de votre produit. Dans de nombreux cas, less-is-more.

Bien que la copie puisse faire partie du processus d’apprentissage, les élèves peintres commencent toujours par copier les maîtres. Pour votre entreprise, copier vos concurrents n’est jamais une bonne idée. Si vous voulez vous protéger des contrefaçons, vous devez vous-même faire partie de votre produit ou service.

Battez-vous contre vos concurrents. Faites-vous des ennemis. Vous pouvez même considérer une industrie entière comme étant votre adversaire. Le conflit est productif. Les concurrents en présence s’encouragent mutuellement et prennent parti. Voilà comment vous pouvez sublimer des passions… et vous faire remarquer.

Promotion : construire un public

Rester dans l’ombre est généralement une bonne chose : vous pouvez essayer de nouvelles choses et faire quelques erreurs sans que le monde entier ne le sache. Vous n’avez pas besoin d’une agence de relations publiques aux débuts d’une entreprise (et vous n’en aurez peut-être jamais besoin).

Au lieu de commencer à vous construire un public : parlez, écrivez, tenez un blog ou faites des vidéos, partagez des informations utiles et vous verrez que lentement mais sûrement, vous aurez un auditoire loyal. C’est ce que Jason Fried fait depuis plus d’une décennie. Le blog Signal vs Noise compte des centaines de milliers de lecteurs, qui sont le groupe de clients les plus réceptifs et de clients potentiels dont tout le monde peut rêver.

N’ayez pas peur de partager des informations précieuses, comme les « recettes » de votre entreprise. C’est comme cela que les chefs célèbres vendent leurs livres de cuisine. Permettre aux gens de disposer de vos précieux secrets d’arrière-cuisine est le meilleur moyen de susciter l’intérêt. Les gens sont très curieux de vos petits secrets de fabrication, quelle que soit votre entreprise. C’est également une occasion unique de créer une relation solide avec eux.

Les communiqués de presse sont comme des spams : un message générique envoyé à des centaines ou des milliers d’étrangers dans l’espoir que quelques-uns mordent à l’appât. Oubliez les communiqués de presse et les messages standards. Ciblez votre message. Et concentrez-vous sur les personnes qui sont déjà intéressées : les publications spécialisées et les blogueurs de niche plutôt que le Wall Street Journal.

Le marketing n’est pas un département. C’est quelque chose que tous les membres de votre entreprise doivent prendre en compte en permanence. Chaque e-mail, chaque appel téléphonique, le marketing est partout ! C’est la somme totale de tout ce que vous faites. Et cela implique d’être à l’écoute de vos clients. Lorsqu’un problème survient, dites-le immédiatement à vos clients. Soyez honnête, ouvert et réactif en cas de crise. La vitesse a tout changé : vous ne pouvez plus avoir de secrets et balayer la poussière sous le tapis. Vous devez rapidement rendre des comptes. Des excuses sincères et opportunes font de vous quelqu’un de responsable.

Embauche : avez-vous vraiment besoin d’embaucher  ?

Recrutez quelqu’un uniquement après avoir essayé de faire le travail pour lequel vous souhaitez embaucher. Et si vous vous rendez compte que vous pouvez continuer à tout faire vous-même, n’embauchez pas. C’est uniquement pour vous soulager d’une charge de travail trop importante que vous devez envisager de recruter. N’embauchez pas pour le plaisir.

Ne vous concentrez pas sur les C.V. et les années d’expérience. Ils ne fournissent pas d’informations utiles sur un candidat. « Il y a étonnamment peu de différences entre deux candidats dont l’un a 6 mois et l’autre 6 ans d’expérience. » Ce qui compte le plus, c’est l’implication et la personnalité du candidat. Peu importe la durée de leur expérience, seule importe la qualité de cette expérience et ce qu’ils ont accompli.

Plutôt que de vous concentrer sur les C.V., les diplômes obtenus et les années d’expérience, trouvez un moyen afin de tester vos candidats. La meilleure façon de savoir comment les gens travaillent est de voir comment ils fonctionnent. Vous pouvez par exemple les embaucher pour un mini-projet. Ou vous pouvez leur proposer un faux projet simplement pour observer et tester la manière dont ils travaillent. C’est avec ces méthodes que vous obtiendrez de véritables informations.

Embauchez des personnes qui savent correctement s’exprimer à l’écrit : c’est le signe d’une expression claire, de bonnes compétences en termes de communication et c’est «la monnaie d’aujourd’hui pour les bonnes idées ». Les personnes douées à l’écrit vous aideront aussi à construire et développer votre public.

Vous pouvez trouver de bons candidats n’importe où. Ne laissez pas la géographie être un obstacle. Ils peuvent travailler à distance. Organisez quelques rencontres de temps en temps. Les personnes que vous voulez recruter doivent être en mesure de se gérer elles-mêmes. Vous ne voulez pas embaucher des enfants  !

La culture est le sous-produit d’un comportement constant

Une culture ne peut pas vraiment être « créée », surtout pas avec des énoncés de mission, des déclarations ou encore des règles. « La culture est une action, et non des mots ». C’est dans la manière dont vous traitez vos équipes. Choisissez des adultes autonomes qui peuvent penser par eux-mêmes et organiser leur propre travail. Assurez-vous également qu’ils ont un bon équilibre entre vie personnelle et travail, car « vous n’avez pas besoin qu’ils travaillent plus d’heures, vous avez besoin qu’ils travaillent efficacement pendant leurs heures ». Soyez authentique dans votre communication avec eux, abandonnez le jargon d’entreprise et le verbiage juridique. Soyez vous-même.

Illustration : Pablo Grand Mourcel

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