Secteur de l'impact : quelles sont vraiment les compétences recherchées ?

Jul 08, 2021

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Secteur de l'impact : quelles sont vraiment les compétences recherchées ?
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Gabrielle de Loynes

Rédacteur & Photographe

Impact dans 3, 2, 1… En voilà, un secteur qui remue et qui fait bouger les choses. Postuler à un métier à impact - c’est-à-dire un job à impact positif autre que l’enrichissement personnel - demande de l’audace, de l’engagement et une bonne dose de témérité. Qui n’a pas déjà eu envie de contribuer à l’édification d’un monde meilleur, plus écologique et social ? Mais la quête de sens et la volonté de faire mieux sont-elles suffisantes pour rejoindre une entreprise engagée ? Non. Le recruteur à impact est exigeant. Il requiert un profil percutant, qui sait s’adapter à son environnement et dispose de compétences de l’espace. Alors, quelles sont les soft skills et les hard skills à mettre en avant pour faire mouche ? Réponses avec Caroline Renoux, fondatrice de Birdeo, un cabinet de recrutement spécialisé dans les métiers à impact positif.

L’impact : un secteur qui bouge…

Il y a une quinzaine d’années, « il fallait être sacrément convaincu et courageux (certains diront même ‘’marginal’’) pour renoncer à un salaire fixe, régulier et évolutif, comme à un plan de carrière souvent tracé et se lancer dans la désormais célèbre ‘‘quête de sens’’», écrivait Caroline Renoux dans une tribune au début de la crise sanitaire. Ces derniers temps, les choses ont bougé. Préoccupations écologiques, prises de conscience individuelles et collectives, le marché de l’emploi à impact positif est plus que dynamique.

En témoignent les plateformes de recrutement spécialisées dans le secteur de l’impact, Makesense et People4Impact, qui ont assisté à une recrudescence du trafic avec la crise sanitaire. On ne compte plus les générations de candidats engagés. Et côté recruteur, c’est la foire d’empoigne. Selon une étude menée par Birdeo en 2021, dans ce secteur, 67% des managers estiment qu’ils sont en manque d’effectifs et 59% d’entre eux envisagent de recruter dans les 12 prochains mois. Dans la famille des métiers à impact qui recrutent le plus, on nommera le chef de produit et innovation durable, le chef de projet climat, le chef de projet conduite du changement, le gestionnaire de fonds à impact ou encore le chef de projet concertation partie prenante. L’impact est un petit secteur qui monte, qui monte, qui monte…

Candidat à impact : les clés d’un profil percutant !

Vous souhaitez changer le monde et faire bouger les choses ? « La motivation est primordiale, mais ne suffit malheureusement pas, explique Caroline Renoux. Il existe un socle de base, commun à tous les métiers de l’impact, qu’il faut posséder. » Compétences métiers, soft skills et engagement, voici ce qu’il faut mettre en avant pour que votre candidature ait un impact auprès du recruteur et atteigne sa cible…

Avoir une solide culture générale RSE et développement durable

« Il est important de connaître les rouages de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) et du développement durable, explique Caroline Renoux. Ce n’est pas tout de vouloir s’engager, encore faut-il maîtriser les principes et les piliers qui entourent ces matières. Il ne s’agit pas nécessairement d’avoir une formation en RSE, mais au moins une bonne culture générale dans ce domaine. » En clair, on ne naît pas Responsable RSE, Chef de projet stratégie, Rédacteur RSE, Directeur du Développement Durable, ou encore Consultant RSE… C’est fort d’une solide culture générale et d’expériences professionnelles dans ce secteur que l’on peut prétendre à ces métiers. Vous n’avez pas ces qualifications ? Vous pouvez compléter votre cursus universitaire d’un des Masters 2 figurant au palmarès des formations RSE. « Aujourd’hui, compléter sa formation initiale et son expertise d’origine par un diplôme spécialisé est un must », confie l’experte. Pour vous démarquer en entretien d’embauche, il faudra donc montrer votre maîtrise de ces sujets !

Comprendre le fonctionnement économique d’une entreprise

Comment rejoindre un métier de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) si vous n’y connaissez rien au fonctionnement d’une entreprise ? « Il faut être en mesure de comprendre ses mécanismes, savoir réaliser et lire un P&L (un compte de pertes et profits, en anglais : Profit and Loss) ou encore un budget, insiste Caroline Renoux. Ne soyons pas naïfs, engagement et économie sont indissociables. » Posez-vous la question du métier à impact que vous visez. Est-ce dans le secteur de la finance durable, ou de la RSE ? Ces domaines d’intervention du secteur de l’impact ont une connotation économique franchement marquée, vous ne pourrez y accéder sans de solides connaissances en la matière. Vous savez quoi mettre en avant sur votre CV !

Compter sur un gros réseau

Qui mieux que le leader pour engager et mobiliser ses équipes, comme son réseau ? « Avoir un gros réseau et être reconnu dans son milieu professionnel est un aspect incontournable des métiers de l’impact, explique Caroline Renoux. On appelle cela le leadership d’influence. Or, il n’y a pas d’impact sans influence… » Le cumul d’expériences professionnelles dans ce secteur et les liens que vous aurez tissés à ces occasions participeront à vous créer une réputation. Un passage marquant dans une organisation internationale, une entreprise à impact ou auprès de tel acteur de renom sera très certainement valorisé. Une fois en poste, savoir jouer de ses relations et de son influence pour mener à bien ses projets est une valeur ajoutée.

Maîtriser la conduite du changement

« Dans le secteur de l’impact, il est indispensable de savoir s’adapter au changement et à son environnement, relève l’experte. Il faut être agile, adaptable et se former à de nouveaux outils sans cesse. » Rassurez-vous, il existe des méthodes pour accompagner les transformations internes de l’entreprise et gérer les résistances que nous opposons naturellement au changement. Modèle de Kurt Lewin, étapes de changement de Kotter, courbe du deuil… tous ces outils sont à portée de main ! Dévorer quelques livres avant votre entretien devrait vous aider à maîtriser ces notions de base…

Savoir gérer des projets complexes

« La gestion de projets est une compétence clé dans ce secteur, reprend Caroline Renoux. Il faut plus particulièrement savoir planifier des projets complexes, manager une équipe projet dans un environnement en constante évolution… Ce sont des hard skills incontournables. » Ce n’est pas un scoop, nous vivons dans un monde dit “VUCA” (volatile, incertain, complexe et ambigu). Managers et chefs de projets doivent donc nécessairement se former aux méthodes de gestion de projets complexes. On appelle ainsi les projets vastes, incertains, avec de nombreuses parties prenantes et au budget conséquent. Si vous avez eu l’occasion de participer à la gestion d’un projet d’envergure ? Parlez-en ! Si, au contraire, vous êtes novice, il est encore temps de briller en entretien par votre connaissance de l’ouvrage de référence en la matière…

Disposer d’une expertise pointue

Certes, de solides connaissances en matière de développement durable et de RSE sont importantes, mais ce n’est pas suffisant. Avant d’être “à impact”, le professionnel exerce un métier à part entière, il n’est finalement qu’un expert formé et expérimenté, ayant fait le choix d’exercer son métier dans ce secteur. « Dans une récente étude que nous avons menée sur le recrutement dans le secteur de l’impact, confirme Caroline Renoux, on s’est aperçu que 62% des managers sont à la recherche d’experts pointus dans leur domaine : climat, biodiversité, social… » Lors de l’entretien, ne vous contentez donc pas de vous étendre sur votre connaissance du secteur de l’impact. Mettez en avant votre expertise et la spécialité que vous avez pu acquérir au cours de votre parcours.

Détenir un bagage de hautes études

« C’est un cliché de penser que les travailleurs de l’impact sont des bénévoles sans diplôme, observe Caroline Renoux. L’étude précitée a révélé que 88% des professionnels de ce secteur possèdent un diplôme Bac+5 ou plus ! Évidemment ce n’est pas un prérequis, mais dans l’ensemble ces profils sont bien diplômés. » Vous avez une formation dans un autre domaine et souhaitez rejoindre un métier à impact ? Appuyez-vous sur vos compétences et votre spécialité. Moins qu’une véritable reconversion, il ne s’agit peut être que d’une transition professionnelle vers une carrière à impact. Il n’est pas forcément question de reprendre des études, vous aurez peut-être seulement besoin de vous faire accompagner par un coach spécialisé ou de passer par un stage pour vous faire une nouvelle expérience professionnelle.

Être tenace et courageux

Comment changer le monde si on abandonne à la première difficulté rencontrée ? Il n’y a pas de héros sans une succession d’obstacles et d’épreuves à traverser. « La première des soft skills pour survivre dans ce secteur, c’est la ténacité, affirme Caroline Renoux. Dans ces métiers, par principe, chaque fois qu’un projet est proposé on commence par nous opposer un ‘‘non’’. Il faut donc redoubler de courage et de persévérance pour que les projets voient le jour. » Vous possédez cette compétence ? Illustrez-le par des exemples concrets de votre vie professionnelle ou personnelle. Et pour obtenir cet entretien, ou même ce job, montrez-vous tenace. Ne lâchez rien !

Savoir faire preuve d’humilité

Combien sommes-nous à avoir rejoint un projet solidaire le cœur chargé d’idéaux, convaincus que notre action allait changer le monde ? Souvent, nous sommes revenus frustrés, déçus du manque d’impact de notre projet. « Il est important d’être capable de faire preuve d’humilité, rappelle Caroline Renoux. Dans le secteur de l’impact, on passe son temps à lancer de nouveaux projets. Or, un projet ne va pas nécessairement rencontrer le succès escompté. Il faut savoir reconnaître qu’on peut se tromper. » En entretien, n’hésitez pas à raconter un projet qui n’a pas abouti. Avec le recul, vous devriez être en mesure de saisir et expliquer au recruteur ce qui a échoué et pourquoi. Parlez-en sans gêne, il n’y a pas d’échec, seulement des tentatives!

Se comporter en intrapreneur

“Changer le monde”, on n’emploie pas cette expression par hasard. Le verbe changer implique une action. Il s’agit de faire autre, faire différemment, transformer, modifier… « On parle beaucoup des ‘‘makers’’, observe Caroline Renoux. C’est indéniablement une qualité essentielle aux métiers de l’impact. Comment changer le monde sans en prendre l’initiative ? Être intrapreneur c’est ne pas attendre pour faire les choses, ne pas avoir peur de bouger les lignes. Mais y aller, foncer. » Vous avez su vous montrer proactif et intrapreneur par le passé ? Racontez-le au recruteur. Il n’y a rien de tel que l’exemple concret pour le convaincre de votre capacité à lancer des projets.

Alors, c’est décidé, vous voulez rejoindre les métiers de l’impact ? Vous savez quelles cases de votre CV il vous reste à cocher… « Ce n’est pas une liste à la Prévert qu’il faut remplir à tout prix, précise Caroline Roux, évidemment le profil s’adapte pour chaque poste. » Mais vous l’aurez compris, l’engagement et la quête de sens ne suffisent pas. Il faut un socle d’aptitudes et de savoir-faire pour changer le monde ! Si vous ne les possédez pas, il est encore temps de vous former aux compétences de demain. Comme le disait l’écrivain Roger Mondoloni : « Changer le monde commence par se changer soi-même. »

Article édité par Gabrielle Predko
Photo par WTTJ

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