Votre meilleur(e) pote du boulot quitte le navire : comment gérer ?

Nov 04, 2021

6 mins

Votre meilleur(e) pote du boulot quitte le navire : comment gérer ?
authors
Thomas Decamps

Photographe chez Welcome to the Jungle

Caroline Roux

Journaliste freelance

Les inséparables, le tandem de choc, le binôme de l’open-space, Tic et Tac… Nombreux sont les termes et sobriquets qui peuvent qualifier le duo que vous formez avec votre BFF (Best friend forever pour les non-initiés) au bureau. Entre les pauses-déjeuners, les rendez-vous à la machine à café et les happy hours de la fin de semaine, vous ne vous quittez pas d’une semelle. Mais un jour, c’est le drame… Votre fidèle coéquipier·e abandonne le navire et vous laisse seul à bord. Et c’est tout votre monde qui s’écroule, opérant un bouleversement en profondeur de vos habitudes et de vos affects. Comment supporter l’absence au quotidien de notre collègue préféré·e et combler le vide laissé après son départ ? Nous avons donné la parole à des salariés qui ont connu ce chamboulement, et interrogé Plaména Dachicourt, coache professionnelle, qui nous livre les clés pour rebondir.

Votre BFF vous manque et tout est dépeuplé…

Marie, 28 ans, chargée d’études dans l’ingénierie, a fait face à cette situation pour le moins déstabilisante. Arrivée en janvier 2019 dans le cadre de son tout premier CDI, elle fait la rencontre de Matthieu, qui, lui, avait intégré l’entreprise un an plus tôt. « Il a été mon tout premier collègue. Nous étions dans une équipe de trois personnes, en transversale, et ma responsable était à distance. Matthieu était donc mon unique interlocuteur présent physiquement au quotidien, et nous partagions les mêmes tâches », se souvient-t-elle. Rapidement, il devient indispensable à son intégration « il m’a tout appris et m’a épaulée. Il m’a aidée à comprendre l’organisation, les ressorts de la structure, les missions. Très rapidement, il a fait figure de guide pour moi voire de mentor », reconnaît Marie. Ce match immédiat s’explique aussi par de grandes similarités entre eux « nous avions le même âge, le même parcours, fait le même réseau d’écoles, partagions un même background culturel, et les mêmes affinités. Nous étions tous deux issus des sciences sociales contre une majorité de scientifiques et d’ingénieurs », détaille-t-elle. Grâce à cet alignement très fort, une amitié naît et grandit au fil du temps. Au quotidien, Marie parle de son ambiance de travail comme « d’un cadre quasi privé, créé par cette relation de proximité entre les pauses où l’on jouait aux cartes, et d’autre où l’on faisait des balades ».

« Nous avions le même âge, le même parcours, fait le même réseau d’écoles, partagions un même background culturel, et les mêmes affinités » - Marie, chargée d’études

Matthieu devient un véritable soutien pour Marie, auprès duquel elle se confie. « Je lui partageais mes états d’âme, qu’ils soient professionnels ou personnels. Il comprenait ce que je vivais au quotidien car il vivait la même chose, raconte-t-elle. Il organisait beaucoup d’activités culturelles et des afterworks, avec les équipes jeunes du pôle, qu’il connaissait déjà et auprès desquelles il m’a introduite. »

Mais toutes les belles histoires ont une fin. Marie est confrontée au bout d’un an au départ de Matthieu, alors en CDD, qui décide de voler de ses propres ailes, ailleurs… Un moment très dur à vivre pour cette dernière. « Lors de son dernier jour, nous avons pris le train ensemble, nous nous sommes pris dans les bras, c’était très émouvant, explique Marie. C’était vraiment difficile. » Elle poursuit : « J’ai ressenti un immense vide le jour de son départ et une sensation de solitude terrible. Je broyais clairement du noir. Désormais seule, je n’avais que peu d’échanges avec d’autres personnes de ma boîte. » Marie a finalement réussi à rebondir, « grâce à un changement de périmètre de mes missions, et le soutien d’autres collègues », nous confie-t-elle.

C’est aussi ce qu’a expérimenté Sophie, acheteuse dans les cosmétiques. Elle fait la rencontre d’Elsa en 2017, qui devient son binôme de travail. Elle décrit cette rencontre comme « un rapprochement naturel, où nous sommes tout de suite devenues complices ». Se rendant rapidement compte de nombreux points communs, les deux collègues deviennent inséparables à la vie professionnelle comme personnelle. « Nous partions du travail ensemble et allions souvent boire un verre car nous avions les mêmes horaires, ajoute Sophie. Nous avons commencé à nous confier l’une à l’autre, nous voir le week-end. Au bureau, nous étions carrément dans une relation exclusive, elle me reboostait lors de mes coups de mou, nous communiquions de manière fluide, et avions une vraie osmose dans le travail qui aidait à notre productivité. »

« Mon quotidien était plus morose, j’ai directement ressenti le manque et je suis revenue à l’état de travail pur » - Sophie, acheteuse

En bref : c’est l’éclosion d’une grande amitié. Mais, le contrat d’Elsa prend fin. Sophie se souvient d’une période particulièrement compliquée, après avoir passé deux ans avec sa BFF au bureau « mon quotidien était plus morose, j’ai directement ressenti le manque et je suis revenue à l’état de travail pur ».

Alors, comment gérer cette étape douloureuse ? Même si vous êtes au fond du seau, il est toujours possible d’aller de l’avant. Plaména Dachicourt nous livre ses conseils pour vous aider à franchir ce cap.

De l’importance du relationnel au bureau

Les relations de travail jouent un rôle essentiel pour notre équilibre au quotidien. Évoluer dans un environnement chaleureux est, en effet, crucial. Plaména Dachicourt explique : « Lorsque l’on a une amitié forte au bureau et quelqu’un vers qui se tourner, cela nourrit notre besoin d’affection, de sécurité et d’interaction et fait souvent figure de moteur pour la motivation. » Cette ambiance favorable peut également permettre de « fidéliser les salariés, générant une attache plus forte à l’entreprise », soutient notre experte. Quand on se sent bien, on est souvent plus productif, c’est donc aussi à l’échelle de la structure que les bienfaits se font sentir. Avoir un ami au bureau participe également d’une meilleure confiance en soi, dans une logique d’intégration, ou au niveau purement professionnel. Qu’il nous aide sur ce dossier urgent, que nous partagions la parole avec lui lors d’une présentation particulièrement stressante, ou qu’il nous convie à ce déjeuner avec d’autres collègues, il fait figure de soutien à toute épreuve.

Comment faire face au départ de son collègue préféré ?

1. Faire le deuil

Cette rupture soudaine d’un lien affectif fort peut être vécue comme un véritable deuil. Plaména Dachicourt estime qu’il s’agit « d’un processus qui repose sur plusieurs étapes et se déroule de façon plus ou moins longue ». Ce passage est incontournable pour pouvoir préparer un avenir serein. Dans un premier temps, il y a une phase de choc et de déni. Mais il est nécessaire d’affronter la réalité. Pour cela, « il faut être conscient du changement - non voulu - qui arrive, s’attribuer le temps psychique nécessaire pour digérer cette information », expose notre coache.

Vient ensuite la charge émotionnelle, parcourue de différents ressentis « la colère, la peur, puis la tristesse », détaille Plaména Dachicourt. Accueillez ces émotions qui se manifestent et partagez-les avec votre entourage professionnel si besoin. Ce départ est un gros changement qui va avoir un impact direct sur vos journées au bureau, votre coup de blues est assurément légitime. Enfin, vient la phase de l’acceptation. « On rentre alors dans un moment de remobilisation. C’est lors de cette période qu’il faut songer à des pistes et essayer de trouver des solutions », affirme l’experte.

2. Identifiez vos besoins

Vous avez désormais dépassé la forte charge émotionnelle liée au départ de votre acolyte. Le temps est maintenant à la réflexion. « Profitez de ce moment pour faire le point, vous interroger », suggère Plaména Dachicourt. Par exemple, « quelle place j’ai accordé à cette relation ? Était-elle exclusive ? » Notre coache rappelle, d’autre part, qu’il est important « d’identifier ses besoins, de définir ce que vous apportait la relation, et de chercher des moyens de combler ces pertes ». Votre BFF était un joyeux luron qui vous faisait rire au travail ? Peut-être que le nouveau chef de projet fraîchement arrivé saura vous apporter cette dose d’humour quotidienne. Vous représentiez un binôme professionnel époustouflant grâce à vos compétences mises en commun ? Formez-vous également à son pôle d’expertise et gagnez en autonomie ! En bref : ouvrez-vous à un nouveau champ des possibles.

3. Sortir de sa zone de confort

Vous avez à présent retrouvé un certain équilibre, et êtes apte à atteindre un nouveau palier : le renouveau. « Essayez de voir le positif dans tout cela. Il y a sûrement certains bénéfices à tirer de cette épreuve », indique Plaména Dachicourt. Désormais seul en scène, « allez vers d’autres collègues, soyez proactif, et trouvez d’autres sources de motivation », conseille notre coache. Vous pouvez par exemple partir en quête de nouveaux projets ou réclamer plus de responsabilités… En clair : affirmez-vous ouvrez-vous davantage, vous serez sûrement surpris par votre capacité d’adaptation !

Enfin, rassurez-vous, votre BFF n’est pas perdu à jamais ! Vous le reverrez sur des temps en dehors du bureau encore plus qualitatifs, pour une amitié renouvelée, dépassant le périmètre de la machine à café.

Suivez Welcome to the Jungle sur Facebook, LinkedIn et Instagram ou abonnez-vous à notre newsletter pour recevoir, chaque jour, nos derniers articles !

Article édité par Manuel Avenel ; Photos Thomas Decamps pour WTTJ

Topics discussed