Que faire quand votre entreprise montre des signes de mauvaise santé ?

Oct 31, 2019

5 mins

Que faire quand votre entreprise montre des signes de mauvaise santé ?
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Cécile Pichon

Psychologue du travail, coach et consultante RH

Depuis quelques semaines, quelques mois, vous le voyez bien, ça sent le roussi au bureau… Les salaires sont gelés, les managers stressés, la boîte n’atteint pas ses objectifs et l’ambiance se dégrade ? Malheureusement, vous n’êtes pas le seul à vivre ça…

Chaque année, des milliers d’entreprises en difficulté mettent la clé sous la porte. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : si en 2018, 691 000 entreprises étaient créées en France, une partie d’entre elles, seulement, perdurera : plus de 50% des entreprises créées disparaissent avant d’atteindre leur sixième année d’existence ! Et quand les entreprises vont mal, les salariés sont les premiers impactés. Gabriel, qui a vécu le déclin et la fermeture de la start-up pour laquelle il travaillait, nous partage son expérience. On vous aide à faire le point pour garder le cap quand votre entreprise est en mauvaise santé…

Bien évaluer l’état de santé de l’entreprise

Vous voyez bien que ça ne va pas… Mais comment savoir si l’entreprise est réellement en difficulté ? En l’absence de communication officielle de la part de la direction sur la situation de l’entreprise, certains signes ne trompent pas. Surtout s’ils sont cumulés et visibles à différents niveaux de l’entreprise : résultats commerciaux en baisse, restrictions budgétaires, ralentissement, voire arrêt du développement de produits, gel des salaires, des embauches, non-remplacement des personnes qui partent, fermeture de bureaux, de sites ou d’antennes…

Essayez tout de même de relativiser ces signes car les entreprises qui rencontrent des difficultés un moment dans leur vie sont nombreuses, il ne faut pas forcément s’en inquiéter. La vie de l’entreprise est cyclique, et beaucoup de structures se remettent en route naturellement. C’est à partir du moment où les problèmes se chronicisent que l’on peut commencer à se poser des questions : « On assiste à une succession de petites choses qui nous alertent au fur et à mesure » nous explique Gabriel, qui a d’abord vu les résultats commerciaux de son entreprise stagner, tandis que les budgets alloués aux projets se réduisaient comme une peau de chagrin. Et à partir de là, les bruits de couloir se sont immiscés dans la vie de l’entreprise…

Communiquer au maximum pour obtenir des informations fiables sur la situation

Avant de faire circuler des rumeurs sans fondement, le mieux est de chercher à obtenir des informations claires de la part de la direction : « Il est important de comprendre ce qui ne va pas réellement, de ne pas se baser uniquement sur les “on-dit”. Parfois, l’entreprise prend un simple tournant stratégique qui sème la panique, mais son équilibre n’est pas menacé » explique Gabriel qui met en garde contre les bruits de couloir.

La première étape pourrait être de solliciter votre manager pour obtenir des informations sur l’état de santé de votre entreprise. Même si parfois, ce n’est pas suffisant, comme l’a observé Gabriel : « Mon manager était dans la même situation que moi, il ne savait pas grand-chose lui-même. Les décisions étaient prises tout en haut par les actionnaires, le niveau d’information à notre échelle était de zéro. »

Dans ce cas là, vous pouvez essayer de faire remonter, de manière collective, votre inquiétude face au flou qui règne. Vous pouvez par exemple solliciter des représentants du personnel, ou des personnes de l’équipe RH pour demander plus d’informations à la direction. Une réunion d’information de crise pourrait alors être organisée.

Mieux vaut cependant garder en tête que, même dans les entreprises les plus transparentes, la circulation de l’information est difficile en période de crise : la direction, elle-même aux prises avec les problèmes, n’est pas toujours en mesure de tout vous dire !

Essayer de maintenir une bonne ambiance

L’atmosphère au travail se dégrade ? Bien sûr, quand une entreprise va mal, l’ambiance peut se dégrader rapidement : manque de visibilité, oscillations stratégiques, projets abandonnés, managers tendus, dirigeants qui démissionnent, tout cela ne contribue pas à rendre les journées au bureau très festives…

Cependant, si tout le monde est un peu stressé, n’est-ce pas justement le moment de redoubler d’efforts pour maintenir une bonne ambiance ? Tirer une tête de six pieds de long ou se faire la guerre entre les équipes ne sera d’aucun secours, alors mieux vaut se soutenir dans l’adversité.

Rester professionnel et impliqué aussi longtemps que possible

Baisser les bras lorsque son entreprise rencontre des difficultés peut être une mauvaise idée. Si tous les salariés se désinvestissent, il est peu probable que l’entreprise parvienne à remonter la pente. De plus, en étant désoeuvré et désinvesti, il y a de grandes chances que vous commenciez à trouver le temps long tandis que les projets stagnent !

Deux scénarios se profilent :

  • Si l’entreprise se remet de cette mauvaise passe, mieux vaut pour vous faire partie de ceux qui sont restés engagés et investis dans leur travail, même durant la tempête.
  • Dans le cas où l’entreprise met la clé sous la porte, vous être montré loyal et professionnel jusqu’au bout vous permettra de partir en bons termes avec tout le monde, ce qui est plutôt recommandé ! Car vous pourriez recroiser vos anciens collègues dans un futur professionnel…

Préparer un plan B

Rester professionnel, oui, mais attention à ne pas vous épuiser pour une cause perdue. Au cas où, préparez-vous au pire… Vous pouvez par exemple commencer à regarder le marché pour vous “benchmarker”, mais aussi activer votre réseau et mettre à jour votre CV, voire passer des entretiens pour anticiper sur une éventuelle sortie. Quelles options s’offriraient à vous si vous étiez obligé de quitter l’entreprise ? Vers quels secteurs et quels métiers souhaiteriez-vous vous diriger ?

Gabriel a pu anticiper la suite dès qu’il a vu les signes de difficulté se confirmer : « pour moi, le mieux était de rester proactif pour ne pas subir une décision. » Une stratégie qu’il n’a pas regretté et qui lui a permis de rebondir rapidement, contrairement à certains de ses anciens collègues : « Il y en a qui sont tombés de haut, notamment ceux dont c’était le premier boulot, qui venaient de commencer et étaient super enthousiastes à l’idée de rejoindre une start-up ».

Quitter le navire avant qu’il ne coule ?

Certains souhaitent quitter le navire avant qu’il ne coule. C’est ce qu’a choisi de faire Gabriel, qui se sentait de moins en moins stimulé et utile dans son travail : « J’avais depuis quelque temps un projet personnel, cela m’a poussé à partir. L’entreprise n’avait encore rien annoncé officiellement, cependant, j’ai demandé une rupture conventionnelle qu’on m’a accordée. Ils acceptaient déjà beaucoup de départs… » Parfois, partir parmi les premiers peut s’avérer judicieux : cela peut être l’opportunité de mieux négocier, individuellement, vos conditions de départ, tout en gardant en mémoire une bonne image de votre entreprise.

Tout le monde ne suit pas nécessairement cette stratégie, une grande partie des effectifs, dans l’espoir d’une amélioration, souhaite rester jusqu’à la fin. Une décision que Gabriel comprend : « On n’était sûrs de rien et puis, il y a un certain confort : tu vas au travail, tu es payé, tu n’as pas à chercher ailleurs… Au mieux, l’entreprise se fait racheter et tu gardes ton poste, au pire, tu pars avec un chèque et tu as le droit au chômage… Il y en avait plein qui continuaient à espérer, à croire au projet. »

Avant de partir en claquant la porte, il peut s’avérer nécessaire de se renseigner sur les options qui s’offrent à vous dans le pire des cas… Une démission simple ne vous ouvrirait pas le droit à l’assurance chômage, tandis qu’un licenciement économique, même s’il est un peu éprouvant psychologiquement, pourrait vous permettre d’accéder à un accompagnement sur-mesure, tout en vous donnant le droit de bénéficier d’allocations de retour à l’emploi avantageuses.

Alors, entreprise en mauvaise santé, sauve qui peut ? Prenez le temps de réfléchir dans cette période professionnelle qui n’est pas agréable. La fin d’une entreprise, c’est aussi la fin d’une histoire en laquelle vous aviez cru, cela peut être frustrant d’avoir travaillé pour un projet qui n’a pas abouti, mais cela peut aussi vous aider à vous poser de nouvelles questions sur votre vie pro’. N’oubliez pas, vous n’êtes pas marié avec la boîte et vous trouverez peut-être mieux ailleurs…

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Photo d’illustration by WTTJ

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